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« Slate.fr », ou les difficultés d'équilibrer un site d'information gratuit

Jean-Marie Colombani, fondateur de « Slate »  et ancien directeur du « Monde », en 2009, à Paris.

Il n’est pas facile de faire</a> survivre</a> un média indépendant. Encore moins quand celui-ci traite d’information généraliste et que son modèle économique est l’accès gratuit financé par la publicité… C’est l’une des leçons que confirme l’aventure de Slate : pour faire face à ses difficultés financières, le site d’information lancé au début de 2009 va désormais être</a> contrôlé par Benjamin de Rothschild et son épouse, Ariane, comme l’a révèlé, vendredi 18 août, Libération.

Le très riche couple – propriétaire du groupe Edmond de Rothschild, une société de gestion d’actifs et d’investissement, installée à Genève et distincte de la banque d’affaires parisienne Rothschild & Cie par laquelle est passé Emmanuel Macron – était déjà le principal actionnaire du site depuis 2015.

Réduction de voilure

Mais une nouvelle levée de fonds est aujourd’hui nécessaire : ces 2,15 millions d’euros vont encore diluer</a> les autres actionnaires, comme le fonds d’investissement Viveris et les fondateurs, dont le président Jean-Marie Colombani, ancien directeur du Monde.

De surcroît, l’équipe va être réduite – de douze à sept personnes, selon Libération –, avec moins de journalistes écrivant et davantage d’éditeurs. Et afin de faire baisser</a> son « point mort » économique, le site compte s’appuyer davantage sur le vaste réseau de pigistes parfois prestigieux qu’il entretient depuis sa création.

Cette réduction de voilure s’accompagne d’un changement de casting : Marc Sillam, choisi par les Rothschild, est, depuis janvier, directeur général, en remplacement du cofondateur, Eric Leser ; Christophe Carron, ancien rédacteur en chef de Voici, puis du « Grand Journal » de Canal+, devient rédacteur en chef à la place de Charlotte Pudlowski ; Boris Razon, ancien directeur de la rédaction duMonde.fr et responsable des nouvelles écritures à France Télévisions, reste consultant chargé de la stratégie éditoriale.

« Mediapart », « Rue89 » et « Slate », dix ans après

Le destin de Slate illustre la fortune diverse des pure players français. Ce terme venu des Etats-Unis est souvent utilisé pour décrire</a> les nombreux sites lancés il y a une dizaine d’années par des anciens de la presse traditionnelle : Mediapart, fondé notamment par Edwy Plenel du Monde,Rue89,par Pierre Haski et Pascal Riché de Libération, et de Slate, déclinaison d’un magazine en ligne américain, Slate.com.

A une époque où l’information était très majoritairement gratuite sur le Web, Mediapart se distinguait par son modèle payant et son créneau qui mettait beaucoup en avant l’investigation. Il se targue d’avoir atteint l’équilibre dès 2010. Et il affiche, avec 130 000 abonnés à la fin de 2016, une santé assez insolente pour le secteur de la presse : 2 millions d’euros de résultats pour 11 millions de chiffre d’affaires, en 2016.

Lire aussi :   Mediapart, huit ans de succès payant

Ses détracteurs soulignent certes les 5 millions d’euros de TVA que le fisc a réclamés à Mediapart et que ce dernier conteste en justice, estimant n’avoir fait que suivre</a> le principe d’égalité en appliquant le taux réduit accordé à la presse papier.

Mais le contraste reste fort. Ainsi, Rue89, en difficulté financière, a été racheté en 2012 par L’Obs, qui en a fait une sous-section de son site, avant d’être lui-même racheté par Le Monde.

Slate a, lui, toujours été déficitaire depuis sa création. Le site ne communique pas sur ses résultats, mais il perdait 1,3 million d’euros en 2012 pour 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires, et ses revenus ont ensuite baissé, selon BFM Business. Plus de 10 millions d’euros ont été investis entre 2008 et 2016, selon le site.

Tensions sur la publicité et essor du payant

Chaque média a sa spécificité et les comparaisons ont leurs limites. Mais le modèle gratuit s’est avéré de plus en plus difficilement tenable pour les indépendants, à mesure que le marché publicitaire s’est tendu et a muté : l’affichage de bannières ou display a reculé, ainsi que ses prix, au profit de publicités ciblées avantageant les grandes plates-formes comme Facebook et Google ou les sites capables de générer</a> de très gros volumes d’audience.

Parallèlement, s’est développé le brand content, une forme de contenu créé par les médias en partenariat avec les annonceurs. Comme beaucoup de titres de la presse française, Slate est présent sur ce créneau : il a, par exemple, produit des textes sur le travail en association avec Pôle emploi ou sur les fonctionnaires pour le compte d’une mutuelle.

Mais, à terme, le site sera peut-être forcé de se convertir</a> à l’abonnement payant, sur lequel sa direction mène des réflexions. D’ailleurs, contrairement à leurs prédécesseurs, des pure players plusrécents ont choisi ce modèle économique, à l’image des Jours.fr ou, avant lui, Arrêt sur images. Mais cette voie, qui réduit le nombre de lecteurs, est également ardue.

Lire aussi :   « Les Jours », « Marsactu » : le baby boom des sites d’information

Paradoxe de la situation, Slate estime être dans une phase positive, éditorialement. Certains cadres ont été débauchés et sont partis vers Libération, BuzzFeed ou L’Equipe. Mais, depuis 2016, le site a vu son audience mobile progresser</a>, et il touchait 2,6 millions de visiteurs uniques au total, en mai 2017, selon Médiamétrie.

Sur les réseaux sociaux certains contenus de Slate sont souvent partagés, notamment les analyses de Claude Askolovitch, les chroniques de Titiou Lecoq ou des épisodes du podcast « Transfert ».

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