Selon la répression des fraudes, PSA aurait équipé près de deux millions de voitures avec des moteurs trafiqués pour passer les tests antipollution. Le groupe dément mais risque une amende de cinq milliards d'euros.
«Il faut que ces stratagèmes cessent et il est urgent qu'Emmanuel Macron se saisisse de ce dossier pour faire enfin entrer la France dans le XXIe siècle», lance Karima Delli, vice-présidente de la commission d'enquête du Parlement européen sur le Dieselgate. La députée européenne écologiste n'a pas de mots assez durs pour condamner «les pratiques» du constructeur français, qui a pourtant aussitôt démenti les accusations de fraude. Depuis vendredi, PSA est à son tour accusé d'avoir sciemment manipulé ses moteurs pour qu'ils émettent moins d'oxyde d'azote lors des tests d'homologation.
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Des Peugeot 208, 807, 5008, des Citroën C3 et C5... Au total neuf modèles, soit 1,9 million de véhicules diesel (de génération Euro 5) vendus entre septembre 2009 et septembre 2015 sont soupçonnés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) d'être équipés de «moteurs frauduleux». Son procès-verbal a été dévoilé vendredi par «le Monde». Saisie dans le cadre de l'instruction ouverte le 7 avril «pour tromperie aggravée», la répression des fraudes évoque une «stratégie globale» de la part du groupe qui a mis en place un «calculateur de contrôle moteur». Pis, elle estime que PSA a réalisé «une économie frauduleuse d'investissement», lui évitant d'investir dans un dispositif conforme à la réglementation. Au final, PSA encourt une amende de cinq milliards d'euros, calculée sur la base de 10 % de son chiffre d'affaires de 2013, 2014 et 2015.
Concrètement, selon les extraits repris par «le Monde», «les moteurs étaient paramétrés selon deux modes de fonctionnement : un mode low NOx » (émettant peu d'oxyde d'azote), qui «abaisse les NOx mais augmente la consommation et réduit le brio (la reprise) du véhicule» et un mode «low CO2», qui «réduit la consommation, favorise le brio mais augmente de manière significative les NOx».
Des anomalies sur la C4 Cactus révélées en janvier
Après Volkswagen, Renault et Fiat-Chrysler, déjà épinglés, cette mise en cause a indigné PSA. «De nombreux rendez-vous ont eu lieu avec des agents de la DGCCRF et il n'est pas toujours facile de faire de la pédagogie... Nous comprenons qu'il y ait des difficultés de compréhension sur un sujet aussi complexe et technique», confiait-on vendredi au siège. En fin de journée, le groupe a annoncé sa volonté de « porter plainte auprès du procureur de la République pour violation du secret de l'instruction».
Ces explications n'ont pas convaincu la députée européenne Karima Delli. «Il faut que les constructeurs arrêtent de prendre la vie des citoyens en otage», insiste-t-elle, réclamant le rappel immédiat des véhicules incriminés par la DGCCRF. Une requête aussitôt rejetée par le constructeur : «Nous ne comptons rappeler aucun véhicule puisque aucun n'est concerné par ces accusations», souligne-t-on au siège, tout en rappelant que PSA est l'inventeur du filtre à particules sur diesel.
«On a voulu nous faire croire que le Dieselgate s'était arrêté à nos frontières à l'image du nuage radioactif de Tchernobyl, s'insurge de son côté Yannick Jadot, député européen écologiste. Ces pratiques sont criminelles pour notre santé alors que la pollution tue en France plus de 48 000 personnes chaque année.»
En janvier, il avait déjà tiré la sonnette d'alarme sur l'une des filiales du groupe. Pour la première fois, des tests européens avaient révélé des anomalies dans le système de dépollution de la C4 Cactus diesel. Tout était alors parti d'essais en laboratoire menés par le Joint Research Center, le laboratoire scientifique rattaché à la Commission européenne. Très secoué à la Bourse de Paris, le titre Peugeot a clôturé vendredi en baisse de 3,14 % à 18,02 euros.
Ségolène royal : «Tout est parti de la commission que j'ai mise en place»
Il y a deux ans, après le déclenchement du scandale Volkswagen, Ségolène Royal, alors ministre de l'Environnement, avait mis sur pied une commission de contrôle technique pour faire la lumière sur les émissions réelles des diesels circulant en France. Elle avait passé au crible 86 véhicules parmi les plus vendus. Contactée vendredi par texto au Chili, où elle est en déplacement, Ségolène Royal, la nouvelle ambassadrice chargée de la négociation internationale pour les pôles arctique et antarctique, a vivement réagi aux révélations concernant PSA. «Tout est parti de la commission que j'ai mise en place contre vents et marées avec la création d'un nouveau système de tests à Montlhéry. Et les premiers tests ont révélé des anomalies.» En juillet 2016, la commission avait en effet relevé de «nombreux dépassements» et appelé à de nouveaux tests. «C'est comme cela que la DGCCRF a été obligée de se saisir. Au début, ils ont été très vexés de n'avoir rien vu», assure-t-elle.
Article issu de notre supplément Le Parisien Eco - à feuilleter en intégralité ici
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