
Les tractations auront duré jusqu'au dernier moment mais elle est bien là : mardi, à Bruxelles, les 28 ministres européens des Finances ont adopté, à l'unanimité (indispensable pour les questions fiscales), la première liste européenne de « juridictions non coopératives ». Depuis vendredi et la fin des travaux du « Code de conduite » qui réunit des experts des Etats membres, 29 Etats étaient ouvertement menacés de finir sur cette « liste noire » dont Bruxelles veut faire son arme contre les paradis fiscaux.
Le Maroc rescapé
Dix-sept y figurent finalement : Bahrein, La Barbade, Grenade, Guam, la Corée du Sud, les Emirats arabes unis (EAU), Macao, les îles Marshall, la Mongolie, la Namibie, Palau, Panama, Sainte-Lucie, les îles Samoa, les Samoa américaines, Trinidad-et-Tobago et la Tunisie. Le Maroc et le Cap vert y échappent de peu.
Les ministres ont hésité jusqu'au bout sur leur cas mais les engagements de réformes formulés par ces juridictions dans les dernières soixante-douze heures leur ont permis, comme dix autres, de finalement basculer sur la liste « grise ». La Tunisie, les EAU et le Panama ont aussi tenté, mais sans succès : leurs promesses ne sont parvenues que lundi soir, « trop tard pour les expertiser », confie une source.
Liste grise
Ce total de dix-sept noms constitue une sortie très honorable pour l'Europe , que d'aucuns ne voyaient jamais aboutir sur ce dossier très sensible et sur la table depuis plus de deux ans. En comparaison, la liste noire publiée en juin par l'OCDE ne comptait qu'un nom, Trinidad et Tobago.
L'intérêt de la démarche européenne réside en outre au moins tout autant dans la liste « grise » également dévoilée mardi : elle regroupe pas moins de 47 juridictions que la menace a poussé à s'engager auprès de l'Union à corriger leurs pratiques fiscales, d'ici fin 2018 pour les pays développés, fin 2019 pour les autres. On y retrouve des centres offshore qui ont été au coeur des récents scandales (paradise papers, panama papers, etc.), comme les Bermudes, les îles Caïman et Hong Kong. Mais aussi les territoires rattachés à la couronne britannique, dont le sort a été très discuté, comme l'île de Man, Jersey et Guernesey.
La Suisse et le Quatar surveillés
Des Etats au poids plus conséquent y sont aussi épinglés, comme le Quatar et la Suisse, ainsi que trois candidats à l'adhésion à l'UE : la Turquie, la Serbie, la Macédoine. On note aussi la présence de la Nouvelle-Calédonie. Huit territoires touchés en septembre par l'ouragan Irma ont par ailleurs obtenu un délai : ils ont jusqu'à février pour présenter leurs éventuels engagements. On y retrouve en particulier les Bahamas et les Iles vierges britanniques, très souvent pointées du doigt.
Ces listes ont été établies selon trois critères : le respect ou non de la transparence fiscale, via l'échange automatique d'informations ; l'absence de « mesures fiscales préférentielles dommageables » ; la mise en oeuvre des mesures de l'OCDE contre l'optimisation fiscale agressive. Un taux zéro d'impôt sur les bénéfices, noeud gordien des discussions entre Etats, n'avait été retenu que comme « indicateur ».
Sanctions : les Européens divisés
C'est une étape importante mais pas la fin du feuilleton. La question des sanctions, jugée clé par la France, l'Allemagne et la Commission, qui les veulent « dissuasives », reste en suspens. Elle sera abordée ces prochains mois mais divise largement. Le Royaume-Uni, Les Pays-Bas et le Luxembourg y sont très réticents. « L'Europe a franchi une étape mais le combat contre les paradis fiscaux doit continuer, sans relâche. J'appelle les ministres des Finances à éviter toute naïveté sur les engagements », a réagi Pierre Moscovici, le commissaire européen à la Fiscalité.
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