
"C'est un tournant, une nouvelle frontière", "on change de braquet", "c'est une accélération décisive, une grande conquête industrielle". Ce matin, le PDG d'EDFJean-Bernard Lévy n'a pas craint les superlatifs. Avec raison, car l'électricien a annoncé un plan solaire pour développer pas moins de 30 gigawatts (GW) photovoltaïques entre 2020 et 2035. Un objectif très ambitieux quand on sait que notre pays ne compte que 7 GW installés, contre 50 pour l'Allemagne. Ces 30 GW devraient permettre, selon EDF, la création de plusieurs dizaines de milliers d'emplois pendant la période de construction. Ils représentent un investissement de 25 milliards d'euros.
Réalisés avec des partenaires et des investisseurs tiers, les 30 GW de solaire n’affecteront pas les autres dépenses d’EDF, que ce soient celles portant sur les autres renouvelables (éolien terrestre et offshore, géothermie, biomasse) que celles attenant au nucléaire. Jean-Bernard Lévy l’a dit de manière claire: «On ne touchera pas un cheveu au grand carénage», ce gigantesque programme de 50 milliards d’euros qui vise à prolonger la durée de vie des centrales.
Défi logistique
Pour EDF, le défi, outre l’aspect financier, sera logistique. Réaliser 30 GW de parcs photovoltaïques en 15 ans nécessite la disponibilité d’une surface de près de 30.000 hectares. Le groupe va d’abord regarder les hectares qu’il détient aux abords de ses centrales nucléaires et de ses barrages (pour des raisons de concurrence, EDF se refuse de dévoiler l’étendue de son patrimoine foncier). Il étudiera ensuite les terrains libres à proximité des centrales, les friches industrielles en reconversion, les sites en démantèlement et même l’éventualité de développer du photovoltaïque flottant sur sites hydrauliques.
Le Plan solaire d’EDF est en droite ligne avec l’objectif de rééquilibrage du mix électrique annoncé par le gouvernement à l’issue du conseil des ministres du 7 novembre. Il était temps. Les prix du solaire ne cessent de baisser. En France, ils sont passés de 300 euros le mégawattheure il y a 5 ans à 70 euros aujourd'hui. Dans des pays comme l’Arabie Saoudite et le Mexique, certains appels d’offre sont allés sous les 20 euros le Mwh. «La France dispose du cinquième potentiel d’ensoleillement en Europe, mais le photovoltaïque ne représente que 1,6% de notre production électrique, contre 3,5% pour la Grande-Bretagne et 6% pour l’Allemagne», déplore Jean-Bernard Lévy.
Dans son plan CAP 2030, EDF affiche l’ambition de doubler son parc de renouvelables à 50 GW. Reste que jusqu’à présent les développements solaires ont surtout eu lieu à l’étranger –Etats-Unis, Dubaï, Chili, Brésil, Inde- et pas en France. La raison tient à la grande densité de notre pays où il est difficile de trouver de grandes surfaces pour implanter les panneaux photovoltaïques. Et comme le dit le PDG d’EDF aux freins», aux «lenteurs» et aux «obstacles» de l’administration. Il est ainsi interdit de construire une centrale solaire de plus de 17 MW. Il y a quelques années, l’électricien Neoen a bien lancé près de Bordeaux une ferme de 300 MW. Mais il l’a fait en acquérant les terrains les uns après les autres et en juxtaposant des bouts de centrales.
Économie d'échelle
«C’est vrai qu’en France, l’image d’Epinal d’une centrale solaire c’est qu’elle doit être petite, dit Xavier Barbaro, PDG de Neoen. Je le regrette.» Aujourd’hui dans l’Hexagone, la taille moyenne d’une centrale solaire est de seulement de 12 MW. «Dans les années à venir, il nous faudra de grandes fermes de 100 MW et plus», indique Antoine Cahuzac, PDG de la filiale d'EDF, Energies Nouvelles. Pour les industriels, l’intérêt est évident. Sur de grandes surfaces, ils peuvent négocier de meilleurs tarifs sur l’achat de panneaux et d’onduleurs. Et bénéficier d’économies d’échelle sur des instruments plus sophistiqués qu’il n’est pas rentable d’implanter sur de petites surfaces.
Il reste maintenant à attendre les appels d’offres qui seront lancés pour le gouvernement. Pour EDF, le défi solaire est considérable, sachant que la France a enregistré l’an dernier un record à la baisse. «On a enregistré seulement 500 MW raccordés», déplore Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables. EDF vise maintenant 1,5 GW par an sur la période 2020-2025, puis 2 GW pour 2026-2030, et enfin 2,5 GW entre 2031 et 2035.
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