Tous les indicateurs sont passés au vert, sauf celui-là. Rien n’y fait : le déficit commercial français se creuse, inexorablement. A ce niveau de pertes, on ne peut même plus dire</a> que la tendance a viré au rouge : elle est cramoisie. D’après les chiffres publiés par les douanes mercredi 7 février, l’Hexagone a importé 62,3 milliards d’euros de plus qu’il n’a exporté de biens en 2017. Le plongeon fait mal, le déficit s’enfonçant de 28,9 %. C’est la plus forte dégradation observée depuis 2011. Elle est toutefois à peu près conforme aux prévisions du gouvernement.
Peut-on espérer</a> mieux en 2018 ? Pas vraiment. En octobre, l’exécutif tablait sur un déficit de 62,8 milliards pour cette année, à condition que les prix du pétrole</a> restent stables. Un pari dont les résultats sont incertains. Le cours du Brent a progressé de plus de 50 % ces six derniers mois. Et cette envolée des prix a lourdement pesé sur le déficit commercial l’an passé. Par rapport à 2016, la facture énergétique s’est renchérie de quelque 7,5 milliards d’euros, profitant aux pays fournisseurs d’hydrocarbures en Afrique</a> et au Moyen-Orient.
Désindustrialisation
L’autre élément expliquant la dégradation du solde commercial, c’est la reprise. Cela peut sembler</a> paradoxal : le produit intérieur brut (PIB) a progressé de 1,9 % en 2017 et le climat</a> des affaires est au beau fixe. Seulement, la croissance a surtout été tirée par la consommation</a> des ménages et l’investissement des entreprises</a>. Ces dépenses, nécessaires entraînent dans leur sillage une hausse des importations plus rapide (+6,8 %) que celle des exportations (+ 4,5 %). Résultat : le déficit manufacturier atteint un nouveau record de 40,6 milliards en 2017, après 35,3 milliards en 2016. « C’est particulièrement notable pour les biens d’équipement et les matériels de transports</a> », souligne Denis Ferrand, économiste chez COE-Rexecode, un think tank proche du patronat.
Le phénomène n’a rien de nouveau en France : les entreprises incitées à investir</a> continuent d’acheter des robots japonais et des machines-outils allemandes. Les ménages n’agissent pas différemment quand ils se fournissent en jouets, smartphones ou postes de télé. Faute de produits « made in France</a> » à la hauteur des attentes, ils se tournent vers des biens chinois, coréens, est-européens… Les importations en provenance de l’Union européenne</a> ont ainsi bondi de 8,1 %. Elles progressent de 6,8 % depuis l’Asie. « Quand la demande augmente d’1 euro, les importations croissent de 70 centimes et la production domestique de seulement 30 centimes », résume Patrick Artus, responsable des études économiques chez Natixis.
En 2017, selon les douanes, les importations totales ont ainsi bondi de 6,8 % sur un an. La désindustrialisation des dernières années a trop considérablement affaibli l’appareil productif domestique pour que les entreprises puissent faire</a> face à une hausse de la demande intérieure. Dans le textile, l’habillement, le cuir et la chaussure, dans l’industrie</a> du meuble et du papier, la production tricolore a fondu. Et malgré le dynamisme retrouvé des échanges internationaux, les entreprises peinent toujours aussi à vendre</a> hors des frontières.
« Mis à part le luxe</a>, l’aviation, l’espace et la pharmacie, c’est la débandade à l’export, un désastre absolu », s’alarme Patrick Artus. « Seule une poignée d’entreprises comme LVMH, Kering, Sanofi, Boiron, Airbus, Ariane Espace et leurs grands sous-traitants dégagent des excédents. C’est l’arbre qui cache la forêt ! » Le tableau, vu des douanes, est un peu moins noir : les biens intermédiaires, les véhicules et les produits agroalimentaires ont vu leurs ventes repartir</a> à la hausse en 2017, notamment vers l’Union européenne et l’Asie. Les parfums et cosmétiques ont également renoué en 2017 avec un taux de croissance à deux chiffres.
Nos voisins font mieux, beaucoup mieux
Le problème, c’est que les parts de marchés de la France n’ont cessé de se réduire</a> avec les années. L’Hexagone ne réalise plus que 3 % des exportations mondiales, contre 4, 7 % en 2000. Sur la même période, elle a également lâché du lest dans la zone euro : ses exportations de biens et services sont passées de 17 à 12,9 %, selon le dernier rapport sur la compétitivité publié par COE-Rexecode fin janvier. C’est d’autant plus alarmant que nos voisins font mieux, beaucoup mieux. L’Allemagne</a>, bien sûr, et « même l’Italie</a>, longtemps considérée comme malade de sa compétitivité, qui a arrêté de perdre</a> des parts de marché », insiste Denis Ferrand.
Est-ce encore un problème de compétitivité-coût ? Même COE-Rexecode relève que la progression des coûts du travail</a> a ralenti dans l’Hexagone depuis 2012, comparativement à l’Allemagne. Les mesures d’allégement de charges comme le crédit d’impôt compétitivité emploi</a> (CICE) et le Pacte de responsabilité ont permis aux entreprises de redresser</a> leur taux de marge.
Ce qui pèche donc, outre les capacités de production, c’est le niveau de gamme et de rapport qualité-prix. Pour reprendre</a> une formule consacrée : la France vend des biens espagnols à des prix allemands. Leur contenu en innovation, notamment, est jugé insuffisant. La bonne nouvelle, c’est que la reprise de l’investissement des entreprises devrait se poursuivre</a> en 2018. Elle est synonyme de gain de productivité et d’un renforcement des capacités productives. Mais il faudra du temps pour inverser</a> la vapeur. Le dernier excédent commercial de la France remonte à 2003.
Face à ces enjeux, un plan de soutien à l’export sera présenté le 23 février par le premier ministre, a précisé mercredi 7 février, Jean-Baptiste Lemoyne secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Europe</a> et des affaires étrangères</a>.
http://www.lemonde.fr/economie-francaise/article/2018/02/07/le-deficit-commercial-francais-s-est-creuse-et-atteint-62-3-milliards-d-euros-en-2017_5252914_1656968.htmlBagikan Berita Ini
0 Response to "Pourquoi la France creuse encore un peu plus son déficit commercial"
Post a Comment