
PARIS (Reuters) - Edouard Philippe et Elisabeth Borne ont entamé lundi une série de rencontres avec les dirigeants et les organisations syndicales de la SNCF pour débattre des conclusions du rapport Spinetta avant une réforme en forme de "big bang".
Les présidents du directoire et du conseil de surveillance de l'entreprise ferroviaire, Guillaume Pepy et Frédéric Saint-Geours, n'ont voulu faire aucun commentaire après avoir vu le Premier ministre et la ministre des Transports, tout comme le PDG de SNCF Réseau, Patrick Jeantet.
Elisabeth Borne devait recevoir successivement lundi les représentants de l'Unsa ferroviaire, de la CFDT ferroviaire, de Sud Rail et de la CGT cheminots.
"On ne va pas au ministère très rassurés et on ne s’attend pas à l’être en sortant", a dit à Reuters le secrétaire général de l'Unsa ferroviaire, Roger Dillenseger. "Tous les éléments sont un peu dérangeants dans le rapport."
L'Unsa décidera jeudi d'un éventuel mouvement social contre la réforme. La CGT, syndicat majoritaire, a appelé les salariés à se mobiliser le 22 mars, jour de mobilisation dans la fonction publique.
"La bataille n'est pas gagnée d'avance pour le gouvernement", a déclaré lundi le secrétaire général de la CGT cheminots, Laurent Brun, sur franceinfo, appelant à l'unité des syndicats de cheminots.
Elisabeth Borne "propose de pousser plus loin les solutions qui sont mises en oeuvre depuis 15 ans et qui sont une catastrophe : suppression de l'emploi puisqu'on nous annonce un nouveau plan social avec des départs volontaires, suppressions des lignes, etc.", a-t-il ajouté.
"LE STATU QUO N'EST PAS POSSIBLE"
Après d'autres consultations - régions et usagers notamment - la méthode et le calendrier de la réforme seront annoncés le 26 février à Matignon.
"La situation étant préoccupante et alarmante, il y a urgence à agir", a déclaré la ministre des Transports, Elisabeth Borne, au Journal du dimanche.
"Nous allons aborder des sujets très sensibles. Il y a des inquiétudes et forcément beaucoup de questions, c'est légitime. Nous allons dialoguer, y répondre. Mais le statu quo n'est pas possible. C'est ma ligne rouge et celle du gouvernement", ajoute-t-elle.
Dans son rapport remis jeudi au Premier ministre, l'ancien PDG d'Air France Jean-Cyril Spinetta fait 43 recommandations pour l'avenir du transport ferroviaire, fragilisé financièrement et confronté à d'importants défis avant l'ouverture à la concurrence.
Il recommande d'examiner la pertinence de maintenir des lignes peu utilisées, d'envisager de ne plus embaucher sous le statut de cheminot et d'enrayer l'expansion des lignes TGV.
Il suggère d'autoriser la SNCF à recourir à des plans de départs volontaires, qui pourraient concerner 5.000 personnes.
MISE EN CONCURRENCE
Il recommande de redresser les finances par des mesures de compétitivité et des ajustements des péages, redevances et dividendes. Une transformation qui passerait par la transformation de SNCF Réseau en société nationale à capitaux publics, associée à une garantie qu'elle reste 100% publique.
Concernant la mise en concurrence, qui doit commencer en 2019 et s'achever au plus tard en 2023 pour les lignes subventionnées, selon un accord conclu au niveau européen, le rapport se penche sur la délicate question du transfert des personnels vers les nouveaux opérateurs.
Il propose de garantir le maintien de leur rémunération nette, de leur ancienneté et de droits spécifiques concernant la retraite, la garantie d'emploi et les facilités de circulation.
Pour donner de l'air à SNCF Réseau, il propose de transférer à l'Etat une partie de sa dette, qui s'élève à 46 milliards d'euros, soit plus de deux points de produit intérieur brut.
Les arbitrages du gouvernement seront intégrés au projet de loi mobilités, prévu pour avril, qui comportera d'autres chapitres importants comme les grands projets d'infrastructure.
L'association Régions de France s'est déclarée "très préoccupée par l'avenir du réseau de proximité", Jean-Cyril Spinetta soulignant de son côté que seule la France disposait de milliers de kilomètres de lignes très peu fréquentées.
Emmanuel Macron avait suscité l'émoi des syndicats de la SNCF l'été dernier en appelant l'entreprise à "se réinventer" en échange d'une reprise de sa dette et en confirmant vouloir mettre fin à son régime spécial de retraite.
(Jean-Baptiste Vey, Simon Carraud et Caroline Pailliez, édité par Yves Clarisse)
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