UFC Que Choisir a allumé la mèche d'une nouvelle guerre avec EDF. Dans une étude publiée ce jeudi, l'association de consommateurs accuse l'électricien de moduler l'utilisation de son parc nucléaire en fonction des prix de l'électricité sur le marché de gros, à son propre avantage. « On constate qu'EDF sous-utilise son parc quand les prix sont faibles », indique Nicolas Mouchnino, auteur de l'étude. « EDF, très clairement, fait des arbitrages au détriment du consommateur. Parce que cela lui permet d'avoir un gain ».
Car si produire moins entraîne une perte de recettes à court terme, « elle est largement compensée par les gains différés », explique Nicolas Mouchnino. Selon les calculs de l'association, cette pratique aurait entraîné un surcoût de 2,4 milliards d'euros pour la facture d'électricité des ménages sur la période 2012-2017, soit entre 71 et 109 euros par foyer selon qu'ils sont abonnés au tarif réglementé d'EDF ou à l'un de ses concurrents.
« EDF conteste formellement les accusations portées à son encontre par l'UFC-Que Choisir », a réagi dans la foulée l'électricien public, jugeant que l'association « ne fonde ses allégations sur aucun élément tangible, s'appuyant seulement sur un raisonnement économique erroné qui ne tient pas compte de la réalité du marché de gros ».
Position dominante
EDF dispose d'une position dominante sur le marché de la production d'électricité, avec plus de 85 % de l'offre disponible (nucléaire, hydraulique, thermique et renouvelable). Une situation qui justifie une surveillance du marché par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). « S'agissant de la formation du prix spot, la CRE conduit une surveillance spécifique des écarts existants entre les prix sur le marché spot et les coûts marginaux du parc EDF issus des calculs de ses modèles d'optimisation journaliers », expliquait ainsi en octobre le régulateur dans son dernier rapport annuel.
L'écart moyen entre les prix et les coûts évolue chaque année, mais « depuis que la CRE mesure cet indicateur, c'est-à-dire 2008, il n'a jamais dépassé les 6,5 % ». « Sans préjuger de contrôles complémentaires, la CRE considère que ce niveau moyen ne traduit pas l'exercice d'un pouvoir de marché », concluait le régulateur. La CRE mène aussi des « analyses approfondies à la suite de la détection d'événements de marché inhabituels ou suspects ». Six enquêtes ont été ouvertes par la CRE, dont trois en électricité et trois en gaz.
Tandis qu'EDF indique en réaction à l'étude d'UFC-Que Choisir se réserver « le droit d'intenter toute action devant les tribunaux », « on ne parle pas de malhonnêteté mais de gestion défavorable au consommateur et dans l'intérêt exclusif d'EDF parce que le cadre n'est pas suffisamment réglementé », appuie Alain Bazot. Le président de l'UFC-Que choisir entend en faire « un sujet politique », alors que se discute la prochaine Programmation pluriannuelle de l'énergie , qui doit fixer la feuille de route du gouvernement pour la période 2019-2028.
Questionnements récurrents
Les questionnements autour d'une manipulation des marchés sont récurrents dans le secteur. Il y a quelques années, certains concurrents d'EDF s'interrogeaient sur les raisons de « l'arenhisation » du marché de gros - les prix de marché se maintenaient autour du prix de l'Arenh, ce tarif régulé (42 euros par mégawattheure) de la production nucléaire auquel les fournisseurs alternatifs ont accès pour pouvoir concurrencer le tarif réglementé d'EDF.
Ces deux derniers automnes, certains s'interrogeaient aussi tout haut sur le calendrier des arrêts de réacteurs nucléaires demandés par l'Autorité de sûreté : engagés juste avant l'hiver, ils ont fait remonter les prix de marché, incitant les concurrents d'EDF à acheter de la production au tarif de l'Arenh pour se couvrir contre une hausse plus importante. EDF, de son côté, pointe au contraire le coût élevé de ces arrêts sur ses comptes .
Des interrogations qui traduisent les tensions qui persistent sur l'ouverture du marché de l'électricité à la concurrence, dix ans après son entrée en vigueur. Dans un référé récent, la Cour des comptes a appelé à une refonte du mécanisme de l'Arenh, qui devait initialement servir à laisser le temps aux concurrents d'EDF d'investir dans la production d'électricité. Un mécanisme critiqué par EDF , qui y voit des marges de liberté trop importantes données à ses concurrents.
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