
L'homme d'affaires, qui a fait fortune dans l'énergie, négocie pour racheter une part des actions dans le groupe de presse de Matthieu Pigasse, l'un des deux principaux actionnaires avec Xavier Niel.
L’incursion éclair de Daniel Kretinsky dans les médias français prend une tout autre dimension. Après avoir racheté l’hebdomadaire Marianne et plusieurs magazines du groupe Lagardère, dont Elle, le milliardaire tchèque de 42 ans, encore inconnu en France au début de l’année, est en passe d’entrer au capital du groupe le Monde, dans une position minoritaire. Il est entré en négociations exclusives avec Matthieu Pigasse, l’un des deux principaux propriétaires du grand quotidien, pour lui racheter une partie de ses actions. Pigasse, patron de la banque d’affaires Lazard, serait prêt à «céder entre 40 et 49%» de sa participation, selon… le Monde, qui a sorti l’information.
D’après ce schéma complexe, Matthieu Pigasse garderait une position de contrôle dans le groupe le Monde, qui possède, outre le quotidien éponyme, Télérama, Courrier international et le Monde diplomatique, et est bénéficiaire. Le banquier, écrivent les journalistes ayant dévoilé l’info, «a l’intention de garder le contrôle [de la société] le Nouveau Monde (où porterait l’investissement de Kretinsky). […] Et aussi de rester le cogérant du Monde, à travers la société le Monde libre». Cette entreprise, véhicule premier de détention du groupe, est une société en commandite simple dont les deux cogérants sont Matthieu Pigasse et le fondateur de Free, Xavier Niel. Les deux hommes sont les deux principaux actionnaires du groupe le Monde.
«Brutalité»
«A ce stade des informations dont nous disposons, cette opération ne modifierait pas le contrôle du groupe», indiquent Louis Dreyfus et Jérôme Fenoglio, les deux patrons opérationnels du Monde, dans un message aux salariés. Daniel Kretinsky se contentera-t-il d’une position d’observateur, de partenaire industriel sans pouvoir, dans le journal de référence de la presse française ? Pas sûr. Dans son article, le Monde ajoute qu’une «source officielle tchèque» lui a assuré que le but de l’oligarque, qui a fait fortune en Europe de l’Est dans l’énergie et possède plusieurs médias dans son pays, était de «racheter» le quotidien. Une bataille entre industriels fortunés se profile-t-elle ?
En interne, la nouvelle inquiète déjà : «Face à la brutalité de cette annonce, le Pôle d’indépendance [qui regroupe les sociétés de rédacteurs et des personnels du groupe et est actionnaire de la société le Monde libre, ndlr] souhaite s’entretenir rapidement avec les actionnaires majoritaires du groupe. Il demande également à rencontrer M. Kretinsky ou son représentant en France pour éclaircir ses intentions et obtenir de sa part les garanties indispensables du respect des valeurs et règles d’indépendance qui régissent l’ensemble des titres du groupe le Monde.» Les deux patrons, Jérôme Fenoglio et Louis Dreyfus, tentent de rassurer : «Nous vous tiendrons informés des prochains développements et restons extrêmement attentifs à ce que ces mouvements à venir n’obèrent en rien nos capacités de développement et notre indépendance», écrivent-ils aux salariés.
Dégager du cash
Daniel Kretinsky a mené cette année une offensive rapide dans les médias français. Il a d’abord repris Marianne, où il a installé la journaliste Natacha Polony à la direction de la rédaction. Début octobre, il a finalisé l’acquisition de sept magazines du groupe Lagardère : Elle, Version Femina, Art & Décoration, Télé 7 Jours, France Dimanche, Ici Paris et Public. Un ensemble de 700 salariés et d’environ 265 millions d’euros de chiffre d’affaires, selon BFMTV.
Cet investissement de Daniel Kretinsky devrait se doubler d’un partenariat «stratégique» avec le groupe personnel de Matthieu Pigasse dans les médias, nommé les Nouvelles Editions indépendantes (LNEI). C’est par cette société qu’il détient l’hebdomadaire culturel les Inrocks, la radio musicale Nova et le festival Rock en Seine. Les contours de ce nouveau deal ne sont pas clairement définis, mais semblent exclure un accord capitalistique.
Economiquement, les actifs de LNEI, notamment les Inrocks et Nova, sont en difficulté. Cette situation a-t-elle poussé le banquier d’affaires à rechercher un investisseur extérieur pour sa participation dans le Monde afin de dégager du cash en faveur de LNEI ? «Le banquier d’affaires de Lazard cherchait ces derniers mois à trouver un partenaire pour l’épauler financièrement», assurent les journalistes du Monde dans leur article. Contactés, Matthieu Pigasse et Xavier Niel n’ont pas répondu. Louis Dreyfus n’a pas souhaité commenter.
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