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Auchan après Carrefour : le modèle de l'hypermarché est-il condamné ? - Le Progrès

Les plus pessimistes prédisent un scénario façon sidérurgie lorraine des années 1980. Des centaines de m² couverts de supermarchés transformés en friches commerciales avec leurs galeries marchandes et leurs parkings, des dizaines de milliers de salariés au chômage et difficiles à recaser... Les plus raisonnables estiment que le modèle de l'hypermarché doit évoluer.

Bien entendu, le plan de cession de 21 magasins Auchan avec 723 emplois menacés à la clé et les pertes de la holding (985 millions d'euros) qui emploie en France 73 000 collaborateurs s'expliquent en partie par des erreurs de stratégie : retard sur le bio, investissement publicitaire insuffisant, diversification dans les petites surfaces pas assez rapide. Mais deux mois après le plan de 1500 suppressions d'emplois chez Carrefour (par ruptures conventionnelles, négociations lancées en mars), les déboires du groupe nordiste posent une série de questions.

L'hypermarché a-t-il vécu?

NON. Les crises des deux mastodontes du secteur, Auchan (80% d'hypers) et Carrefour (72% d'hypers), et la stratégie de Casino et Cora de réduire les surfaces montrent que les grandes surfaces de plus de 7500 m² (taille minimum de l'hypermarché) passent de mode. Aux Etats-Unis, les géants du secteur (Sears, Wal-Mart, Macy's) ont fermé des dizaines d'hypers. Mais seulement 250 des 2480 hypermarchés français sont au format américain (au moins 10000 m²); ceux-là sont les plus fragilisés. Les autres gardent une base de clientèle forte qui leur permettra de résister s'ils savent diminuer leurs coûts de fonctionnement et proposer des produits à toutes les clientèles.

Pourquoi le modèle fonctionne moins bien

La fréquentation des hypers est en baisse accélérée depuis 2015 selon le baromètre Nielsen-Dauvers : -0,4% en 2015, -0,8% en 2016, -1,7% en 2017 et -2,4% l'an dernier. L'explication est double : la concurrence du e-commerce d'une part, la préférence de surfaces plus petites, plus proches par la clientèle de moins de 50 ans qui n'aime pas pousser les chariots. Le mouvement est inéluctable selon tous les experts.

Troisième explication. Depuis toujours, le rendement est la base de ce modèle : le volume généré par mètre carré permet de baisser les prix, ce qui assure le volume. Et ainsi de suite. Quand le volume diminue, l'espace devient un surcoût en terme de chauffage-clim,électricité, aménagements, entretien, etc...

L'autre principe, c'est qu'on y vient pour acheter de l'alimentaire et/du ménager et qu'on ressort avec d'autres produits. Or, la baisse des ventes de ces autres produits s'accélère aussi : -3,8% l'an dernier. Le e-commerce et les enseignes spécialisés prennent des pans entiers du marché.

Les menaces sur l'emploi sont-elles importantes?

OUI. En même temps que le modèle est impacté, les caisses automatiques s'installent, la manutention se robotise et la progression des achats en drive diminue l'activité des vendeurs-conseil. Les salaires étant plutôt bas dans le secteur, les grandes enseignes ont bénéficié du CICE, dispositif d'Etat de baisse des charges qui les maintient sous perfusion. Mais structurellement, certains magasins, certains métiers sont condamnés.

Et les supermarchés ?

Ils résistent comme en témoignent les bons résultats de Système U, Les Mousquetaires (Intermarché) et Leclerc (15% du chiffre d'affaire en supermarché). L'amélioration de la situation chez Casino, tombé sous la barre des 50% de l'activité en hypermarché et qui réduit ses surfaces, montre que la réduction de la taille est la stratégie du moment.

Dans les villes petites et moyennes, les populations sont plus âgées, moins riches donc plus attentives au critère prix. Elles sont aussi plus motorisées, vivent en lotissements et l'habitude voiture-parking-chariot-plein d'essence dans la zone commerciale aux multiples ronds-points demeure ancrée. Les magasins compris entre 3 600 et 7 499 m² ont vu leur activité croître de + 1,4 point en 2018 après avoir néanmoins souffert en 2015 et 2016. Mais la taille plus petite permet plus de souplesse, par exemple pour spécialiser une surface en bio dans un endroit où il n'y en a pas.

Mais attention, le développement de la livraison à domicile peut accélérer le phénomène de baisse de la fréquentation dans 15 ans. Si les moins de trente ans gardent leurs habitudes d'achats massifs sur internet une fois arrivés à la quarantaine, les hypermarchés et supermarchés souffriront encore plus dans les années 2030.

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