Une femme se faisait passer pour une journaliste lors d’un procès autour du Roundup en mars à San Francisco, alors qu’elle était employée par un cabinet de conseil travaillant pour Monsanto et Bayer.
Style décontracté, la trentaine souriante et amicale, elle se présentait comme journaliste aux reporters, couvrant en mars un procès autour du Roundup de Monsanto au tribunal fédéral de San Francisco. La jeune femme était en fait employée par FTI Consulting, un important cabinet de conseil et de relations publiques comptant parmi ses clients Monsanto et l’allemand Bayer.
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Le procès auquel assistait l’employée de FTI s’est soldé fin mars par la condamnation de Monsanto à verser plus de 80 millions de dollars pour avoir caché la dangerosité du Roundup, le deuxième revers judiciaire en quelques mois. Lundi, un troisième tribunal américain l’a condamné à verser plus de deux milliards de dollars à un couple d’Américains atteints d’un cancer. Bayer fait appel dans les trois dossiers. Ce jugement est intervenu alors que le géant agrochimique est aux prises avec une polémique et une enquête en France. En 2016, l’agence de communication Fleishman Hillard aurait fiché, pour le compte de Monsanto, des centaines de personnalités dont des journalistes, concernant leur position sur les OGM ou le glyphosate, ou leur propension à être influencés. Bayer a présenté ses excuses et affirmé ne «tolérer aucun agissement qui soit contraire à l’éthique».
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Un porte-parole de Bayer a affirmé à l’AFP que FTI ne faisait pas partie de l’«équipe multi-fonctions chargée de la gestion des procédures juridiques autour du Roundup, notamment le procès» de San Francisco. Le groupe n’a pas dit s’il était au courant de la présence d’une personne de FTI à ce procès. Selon FTI, «la mission donnée à l’employée en question était d’assister au procès et son but était expressément et uniquement de prendre des notes sur les débats» à l’audience. «Lorsque (FTI) a appris que ladite employée s’était présentée de façon erronée lors de sa mission, la firme a entamé un examen interne et prendra les mesures nécessaires et appropriées», a assuré un porte-parole, Matthew Bashalany. La société est «résolue à opérer conformément aux principes éthiques les plus élevés» et elle prend «le sujet très au sérieux», a-t-il ajouté.
Pendant ce procès, cette employée a régulièrement affirmé être journaliste pigiste, citant la BBC et le site spécialisé britannique The Inquirer. Les deux médias ont démenti à l’AFP qu’elle ait couvert le procès pour eux. Sur le réseau professionnel LinkedIn, elle se présente actuellement comme «consultante et journaliste freelance», une mention ajoutée récemment. Auparavant, elle indiquait seulement travailler depuis mai 2014 pour FTI Consulting, au sein de sa division «Communications stratégiques». Cette entité est spécialisée «dans l’usage de la communication pour aider les entreprises à réaliser des objectifs ’business’ discrets», selon le site internet de FTI. Elle n’a jamais dit avoir un lien avec l’une des parties lors de plusieurs discussions informelles avec des reporters qui évoquaient leurs impressions des débats. Elle est restée pendant les délibérations du jury, qui ont duré plusieurs jours, jusqu’au jugement. Sur son site, FTI Consulting la présente comme «ancienne reporter ’tech’», «excellente rédactrice et tacticienne (qui) donne vie à beaucoup de nos campagnes». Sollicitée par l’AFP, l’intéressée n’a pas donné suite.
FTI Consulting indique avoir conseillé Monsanto lors du rachat par Bayer annoncé en 2016 (finalisé en 2018) et que «Monsanto est toujours un client». Le registre «Transparence», qui recense les groupes d’intérêts auprès de l’Union européenne, confirme que Bayer est un client de FTI. Elle conseille aussi EuropaBio, lobby industriel de la biotechnologie, auquel appartient Bayer, et l’Association européenne de l’industrie phytosanitaire (ECPA). FTI, qui a également comme cliente la compagnie pétrolière ExxonMobil, a déjà été mis en cause pour ses méthodes controversées.
L’ONG de défense de l’environnement EarthRights a affirmé en janvier que «des consultants payés par Exxon», employés de FTI Consulting, avaient contacté son conseiller juridique en «se faisant passer pour des journalistes». Cet avocat défend des munipalités contre ExxonMobil devant la justice américaine. FTI a indiqué à l’AFP que ces accusations étaient «fausses et trompeuses». La firme a également démenti avoir conçu une campagne «anti-syndicats» pour la compagnie aérienne Delta Airlines.
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