Le logo de l'Opep au siège de l'organisation à Vienne, le 29 novembre 2016 ( AFP / JOE KLAMAR )
L'Opep et ses alliés, réunis à Vienne, ont fait bloc lundi derrière la proposition russo-saoudienne de prolonger de neuf mois les baisses de production en vigueur pour soutenir les cours, même si l'influence du duo Moscou-Ryad irrite l'Iran.
Les quatorze pays de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et leurs dix alliés emmenés par la Russie "soutiennent tous la proposition" de garder le cap des limitations de production jusqu'à mars 2020, a annoncé le ministre russe de l'Energie Alexandre Novak, après une première réunion lundi à Vienne.
Ces 24 pays regroupés sous l'appellation Opep+, qui pompent la moitié du pétrole du globe, avaient décidé en décembre d'abaisser leur offre cumulée de 1,2 million de barils/jour pour soutenir les cours.
Un accord qu'ils s'apprêtent à reconduire mardi après deux jours de réunions dans la capitale autrichienne, à l'heure où le prix du baril reste sous pression entre demande morose et offre abondante, et malgré les tensions géopolitiques au Moyen-Orient.
Le suspense était d'emblée limité: le président russe Vladimir Poutine avait annoncé dès vendredi, en marge du G20 d'Osaka, un compromis avec l'Arabie saoudite pour prolonger les baisses de production.
L'extension devrait être décidée pour neuf mois, selon un consensus confirmé lundi par plusieurs membres du cartel, dont les Emirats arabes unis, le Nigeria et l'Arabie saoudite.
"Cela garantira une certitude accrue au marché", et la visibilité "réduira la volatilité des cours", a expliqué la représentante du Nigeria, Folasade Yemi-Esan.
"Neuf mois nous donne suffisamment de temps pour rééquilibrer le marché", a insisté le ministre saoudien de l'Energie, Khaled al-Falih, louant l'effet d'entraînement du compromis d'Osaka qui a permis de "susciter un consensus" à Vienne.
Le ministre saoudien de l'Energie Khaled al-Faleh (D) ainsi que le Prince Abdelaziz ben Salman ben Abdelaziz, ministre adjoint à leur arrivée au siège de l'Opep à Vienne, le 1er juillet 2019 ( AFP / JOE KLAMAR )
Mais tous n'approuvent pas l'ascendance de la Russie, deuxième producteur mondial, et de l'Arabie saoudite, chef de file du cartel, alliées depuis trois ans pour enrayer l'effondrement des cours.
- Contre le solo de Ryad -
A Vienne, le ministre iranien du Pétrole Bijan Namdar Zanganeh a ainsi dénoncé le caractère selon lui "unilatéral" de l'entente Moscou-Ryad.
Le ministre iranien du Pétrole Bijan Namdar Zangeneh lors d'un forum pétrolier à Teheran le 1er mai 2019 ( AFP / ATTA KENARE )
"L'Opep va mourir avec un tel processus" de décision piloté en solo par l'Arabie saoudite, grand rival régional de Téhéran, a tancé le ministre.
Une analyse vigoureusement contestée par Mme Yemi-Esan, selon qui l'Opep reste "une coopération d'Etats souverains".
"L'Opep est plus vibrante que jamais! Les annonces de sa mort se sont toujours révélées très exagérées", renchérissait le ministre saoudien al-Falih, jugeant que "personne ne dicte la ligne", soumise à "la concertation de tous".
Il a également défendu l'alliance élargie: "Regardons la réalité: l'Opep seule, c'est moins de 30% de la production mondiale. L'influence de la Russie, grand exportateur de brut, est bienvenue", a-t-il plaidé. Le ministre irakien Thamer al-Ghadban a d'ailleurs confirmé qu'une "charte" formalisant les relations de l'Opep+ était "en discussion".
Le président russe Vladimir Poutine à Osaka, le 29 juin 2019 au Japon ( POOL / Yuri KADOBNOV )
L'Iran, lui, s'est dit farouchement opposé à ce stade à tout accord de coopération visant à pérenniser le partenariat entre l'Opep et ses alliés.
Pour autant, Téhéran lui-même soutient le renouvellement des plafonds de production, d'autant que le pays en est jusqu'ici exempté, compte tenu du retour des sanctions américaines qui étranglent ses exportations.
- Demande morose -
Pour les pays producteurs de pétrole, l'équation est complexe: côté offre, l'intensification des tensions dans le Golfe (attaques de tankers, drone américain abattu par l'Iran...) ravive les craintes sur la sécurité des approvisionnements de brut, mais sans provoquer de flambée des prix.
De fait, les risques géopolitiques semblent éclipsés par le vif essoufflement de la consommation pétrolière, sur fond de guerre commerciale sino-américaine et de ralentissement de l'économie mondiale.
Face à cette demande affaiblie, l'offre de brut reste abondante: la production américaine de pétrole de schiste ne cesse de grimper, concurrençant l'Opep et gonflant des stocks mondiaux déjà élevés.
Inquiète, l'Arabie saoudite a réduit son offre bien au-delà des baisses de production imposées dans l'accord, pompant en mai 9,70 mbj, très en dessous des 10,31 mbj convenus. C'est le cas de la plupart des pays liés par l'accord.
La stratégie de l'"Opep+" s'est jusqu'ici révélée payante, puisque le prix du baril de Brent a pris quelque 20% depuis janvier. Et l'annonce de l'accord russo-saoudien a permis au cours du baril de pétrole WTI de dépasser lundi 60 dollars pour la première fois depuis mai.
Un niveau très en-deçà, cependant, des 85 dollars que nécessiterait le budget saoudien.
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