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Nucléaire : l'EPR de Flamanville coûtera 1,5 milliard d'euros de plus que prévu - Le Monde

Un employé d’EDF sur le site de l’EPR de Flamanville, le 16 novembre 2016.
Un employé d’EDF sur le site de l’EPR de Flamanville, le 16 novembre 2016. Benoit Tessier / REUTERS

Le groupe EDF va-t-il un jour se sortir de la malédiction de Flamanville ? Mercredi 9 octobre, le groupe a annoncé que les travaux sur les soudures défectueuses allaient occasionner de nouveaux surcoûts : 1,5 milliard d’euros supplémentaires, ce qui porte à plus de 12,4 milliards le budget total du projet. Amorcé en 2007, le réacteur EPR de Flamanville devait initialement être connecté au réseau électrique en 2012, et coûter environ 3,5 milliards d’euros. En pratique, il ne démarrera donc pas avant 2023 - au mieux.

L’origine de ce nouveau retard est identifiée depuis plus d’un an : en avril 2018, EDF a annoncé que plusieurs défauts avaient été repérés sur une soixantaine de soudures. Plusieurs mois plus tard, il est apparu que, parmi les soudures concernées, huit d’entre elles étaient situées à un endroit crucial : elles traversent la double enceinte en béton du bâtiment réacteur.

Pendant plusieurs mois, au début de l’année 2019, EDF tente de convaincre l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qu’elle peut se passer de refaire ces soudures non conformes et conserver peu ou prou son calendrier de démarrage du réacteur. Mais l’ASN juge, au printemps, qu’elles ne correspondent pas au cahier des charges présenté par EDF à l’origine et demande à l’électricien de les reprendre entièrement.

Robots contrôlés à distance

Le président de l’ASN, Bernard Doroszczuk, entendu par les parlementaires sur ce dossier au mois de juillet, avait déploré l’attitude d’EDF, estimant que le groupe avait cherché à « se justifier techniquement (…) plutôt que de réaliser la réparation de ces équipements ». A l’inverse, au sein du groupe EDF, si on affirme respecter les décisions du gendarme du nucléaire, on ne cache pas son agacement. « Elle ne gère plus la sûreté, elle gère des procédures », pestait, il y a peu, un cadre dirigeant excédé.

Pour réparer les soudures concernées, EDF a retenu un scénario qui s’appuie sur l’utilisation de robots opérés à distance. Une technologie déjà utilisée sur le parc nucléaire existant, mais que l’ASN doit valider pour cette procédure nouvelle. Une décision qui ne devrait pas intervenir avant l’automne 2020. C’est uniquement à cette date qu’EDF pourra engager les travaux. L’utilisation de cette technologie permettrait de ne pas détruire le béton qui entoure les conduites concernées.

Si le gendarme du nucléaire ne validait pas l’utilisation des robots, EDF prévoit un plan B, mais qui conduirait à un surcoût de 400 millions d’euros et à un retard supplémentaire d’un an. Une stratégie validée mardi par le Conseil d’administration d’EDF, qui a approuvé la poursuite du chantier.

Ce dossier des soudures est loin d’être la première difficulté technique à laquelle est confronté ce chantier. Des anomalies ont ainsi été découvertes en 2014 sur la composition de l’acier du couvercle et du fond de la cuve. A la demande de l’ASN, le couvercle de la cuve devra être remplacé avant la fin 2024 – soit peu de temps après la mise en service du réacteur.

Plus récemment, début septembre, EDF a annoncé des défauts de fabrication « sur certaines soudures de générateurs de vapeur », des composants cruciaux des centrales, lors de leur fabrication. Les quatre générateurs du réacteur EPR sont concernés – l’ASN n’a pas encore rendu son verdict sur d’éventuels travaux supplémentaires.

L’avenir de la filière nucléaire compromis

Ce nouveau retard n’a pas pour seule conséquence de repousser le démarrage de l’EPR de Flamanville : il complique l’avenir de la filière nucléaire française dans son ensemble. EDF doit présenter au président de la République à la mi-2021 un dossier complet pour la construction de nouveaux réacteurs EPR en France.

Mais cette échéance de 2021 semble de moins en moins réaliste. Elle avait justement été fixée pour que ce chantier soit lancé après le démarrage de l’EPR. Or le gouvernement ne souhaite pas commencer de nouveaux chantiers tant que le réacteur de Flamanville n’a pas démarré. Ce retard repousse toute décision sur un éventuel chantier à l’après-présidentielle de 2022. Et risque de compliquer la tâche de la filière : quel candidat souhaitera porter dans son programme la construction de nouveaux réacteurs, si Flamanville est encore loin de démarrer ?

Le groupe EDF doit par ailleurs répondre à une autre demande du gouvernement : le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a demandé en juillet un rapport à l’ancien président de PSA Jean-Martin Folz pour faire la lumière sur Flamanville, qui doit être rendu fin octobre. M. Le Maire, pourtant soutien actif de la filière nucléaire au sein du gouvernement, n’a pas mâché ses mots, fin septembre, estimant que « toutes ces dérives sont inacceptables » et que EDF ne doit pas se comporter en « Etat dans l’Etat ». « Il a le sentiment qu’on ne lui dit pas la vérité sur ce dossier, il est exaspéré », décrypte-t-on dans son entourage.

Ces difficultés interviennent alors qu’EDF a également annoncé un surcoût de 3,3 milliards d’euros pour les deux réacteurs EPR qu’il construit sur le site de Hinkley Point C au Royaume-Uni. A ce jour, seuls deux EPR, à Taïshan, en Chine, ont été mis en service.

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