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La BCE passe à l'offensive après les critiques de la justice allemande - Le Monde

Les critiques de la justice allemande sur les vastes programmes d’aide à la zone euro de la Banque centrale européenne (BCE), assorties d’un ultimatum de trois mois pour que la BCE s’explique, avaient fait grand bruit. La BCE s’est employée à y répondre, jeudi 25 juin, ce qui pourrait permettre d’éloigner le risque d’un blocage en pleine pandémie de Covid-19.

Début mai, le retentissant arrêt de la Cour constitutionnelle allemande a à la fois critiqué la politique d’aide de la BCE à la zone euro et contesté un jugement de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) validant l’action de l’institut monétaire. Ce faisant, les juges de Karlsruhe se sont attaqués à l’indépendance de la BCE et à la primauté du droit européen sur les droits nationaux.

« Des mesures proportionnées »

Les rachats de dette réalisés sur les marchés par l’institut monétaire en 2015, comme le tout nouveau plan d’urgence de 2020 face aux effets de la pandémie de Covid-19, sont « des mesures proportionnées » pour aider l’économie, a estimé la BCE au terme de sa dernière réunion, dont le compte rendu a été publié jeudi sur son site. Elles permettent de « poursuivre l’objectif de stabilité des prix », avec des garanties « suffisantes », a-t-elle ajouté. Ce faisant, la BCE répond à une exigence que lui avait posée la Cour constitutionnelle allemande et qui avait fait craindre une remise en cause des plans d’aide à l’économie en crise de la zone euro.

Les juges suprêmes allemands avaient en effet critiqué le manque précisément de « proportionnalité » des soutiens de la BCE dans ses rachats de dette sur le marché et lui avaient fixé un ultimatum de trois mois pour s’expliquer sur ce point.

Pour l’économie européenne, une date marque le tournant de la pandémie actuelle : le 18 mars au soir. Aux alentours de minuit, la Banque centrale européenne est intervenue, annonçant un plan d’intervention de 750 milliards d’euros. Jamais elle n’avait injecté autant d’argent aussi rapidement. Dans la foulée, les taux de la dette italienne, qui frôlaient alors 3 % et qui menaçaient de recréer une crise de la zone euro, se sont détendus. Les entreprises ont progressivement pu avoir de nouveau accès aux liquidités dont elles avaient besoin d’urgence.

Réponse indirecte

La réponse de l’institut monétaire reste indirecte, car la BCE refuse de traiter avec une quelconque justice nationale. Elle estime ne relever que de la « juridiction de la Cour européenne de justice ». Et cette dernière a adoubé son programme. Mais la BCE, par ces mots, cherche clairement à rassurer la Cour allemande. Faute de réponse, les juges menaçaient en effet d’interdire à la Bundesbank de participer aux programmes de soutien de la BCE, lourds de plus de 2 600 milliards d’euros depuis 2015. Or, sans la participation de la première économie européenne aux programmes de soutien de la zone euro, ces derniers perdraient grandement de leur efficacité.

De « nombreuses preuves » existent que l’économie de la zone euro « aurait été en bien pire état sans la stimulation politique des achats d’actifs » menés par la BCE, écrit jeudi l’institut monétaire. L’impact a été « très positif » pour soutenir la croissance et les prix, mais les effets plus contrastés pour les banques et les ménages, reconnaît la BCE. Les ménages, en tant qu’épargnants, ont souffert des taux bas de la BCE, mais en ont profité s’ils étaient emprunteurs. Le sort des premiers a été au cœur des critiques des juges allemands, le pays étant le champion européen des épargnants.

Le compte rendu de jeudi « est clairement une tentative de répondre aux préoccupations de la Cour constitutionnelle allemande sans le dire explicitement », commente Carsten Brzeski, économiste chez ING Bank.

Un autre élément important de réponse a été arrêté mercredi soir par le conseil des gouverneurs de la BCE, a appris l’AFP auprès de sources proches des banques centrales. Lors de cette réunion, il a été décidé que la BCE allait remettre à la Bundesbank des documents internes, et jusqu’alors confidentiels, servant à prouver le caractère adéquat des rachats d’actifs. Il appartiendra à la Bundesbank de les mettre à disposition du gouvernement et de la chambre basse du Parlement allemands, ceci afin de compléter la réponse exigée par les juges suprêmes allemands.

Le Monde avec AFP

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