L'anniversaire du géant la confiserie est terni par les réductions de coûts imposés par un marché difficile.
Correspondant à Berlin
Pour fêter son centième anniversaire dimanche, Haribo aurait préféré mettre en avant la seule figure de son ourson magique : sa mascotte en gélatine lui assure l'essentiel de ses recettes. Mais au lieu de présider une cérémonie aux couleurs fluo, Hans Guido Riegel, le très secret patron du leader mondial de la confiserie, a dû consacrer son énergie à justifier la fermeture de l'usine historique de Zwickau, en ex-Allemagne de l'Est.
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Racheté après la chute du mur, le site symbolisait la réunification industrielle, mais il n'est plus rentable. Sa fermeture a entraîné la suppression de cent cinquante emplois, une admonestation du ministre de l'Emploi et une image écornée pour l'entreprise familiale, fleuron du capitalisme rhénan. En un siècle, le succès de Haribo s'est justement construit sur son image plus que sur ses données financières, quasi inexistantes. Le chiffre d'affaires et les effectifs sont respectivement «estimés» à environ 3 milliards et 7000 salariés, répartis dans seize sites à travers le monde.
La popularité des spectacles d'ours dansants après-guerre avait conduit en 1920 Hans Riegel à couler de la pâte gélatineuse sucrée dans un moule en modèle réduit du mammifère. L'atelier était situé dans la maison familiale de Kessenich, dans la banlieue de Bonn. La carrière de l'ours d'or (Golden Bär) était lancée. Depuis les années 30, elle est entretenue par un slogan resté indémodable, «Haribo macht Kinder froh !» (Haribo rend les enfants heureux). Sa déclinaison dans les pays francophones est aussi célèbre : «Haribo, c'est beau la vie».
L'introduction des bonbons au réglisse, auquel on prêta naguère des vertus médicinales, contribuera durant la seconde guerre mondiale à faire d'Haribo une «entreprise modèle» du troisième Reich. Cette relation ambiguë avec le régime nazi s'acheva après-guerre avec la mort du patriarche. Revenus de captivité, ses deux fils, Hans et Paul, prirent sa succession, le premier assumant la direction. L'homme était présenté comme un génie du marketing fourmillant d'idées, ne laissant aucun répit à ses collaborateurs. Chamallow, fraises Tagada et Dragibus… les innovations pleuvaient.
Troisième génération
En 1991, Hans Junior s'acheta les services de Thomas Kottchak Durant 14 ans, cette super star de la télé allemande fera office de tête de gondole, à côté du célèbre ourson. Aujourd'hui, Haribo réalise 30% de son chiffre d'affaires en Allemagne, et 8 % en France, l'autre marché phare où la société arriva en 1967 avec son rachat de la Réglisserie de Lorette, près de Marseille. Haribo est leader dans l'Hexagone face aux Carambar, Krema et autres la Pie qui chante.
Hans Junior est mort en 2013, à 90 ans, après avoir implanté son entreprise sur les marchés émergents. Face à ce patron ombrageux, «la contradiction n'était pas toujours la bienvenue», a confié son neveu Hans Guido au journal Handelsblatt. Ce dernier se brouillera avec son oncle… avant de lui succéder.
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La troisième génération, incarnée par le neveu, est loin d'avoir fait ses preuves. En interne, on reproche à l'héritier son manque de charisme, le déménagement raté du siège social de Bonn et ses tâtonnements pour aborder un marché devenu volatil. L'implantation aux États-Unis prend du retard; en Chine, la gamme réduite aux oursons dorés et aux Happy-Cola n'a pas réussi à s'imposer. Selon Der Spiegel, la part de marché mondial du groupe est passée de 65 % en 2015 à 58 % au premier semestre 2020.
Haribo peine à appliquer à ses confiseries les canons de l'alimentation bio et light. «Même si la demande est clairement dans l'air du temps, dans la réalité les consommateurs n'adhèrent pas toujours», confirme Jean-Philippe André, le patron de la filiale française. Il y a deux ans, le lancement mondial de Fruitilicious, une gamme allégée en sucre de 30%, «a fait un flop», reconnaît le dirigeant. Le groupe s'apprête néanmoins à retenter la recette chez le crocodile, quatrième marque du portefeuille.
Pour ne rien arranger, Haribo entretient des relations tendues avec la grande distribution, Lidl et Hedeka en tête. Celle-ci développe ses propres marques et conteste les récentes hausses de prix exigées par son fournisseur. Lidl a écarté Haribo de ses rayons. En France la situation dure depuis dix-huit mis. Chez Hedeka, ses bonbons viennent tout juste de réapparaître.
«La marque a perdu de son pouvoir et Haribo est confronté à une tâche impossible : tout changer pour devoir rester le même», constate Hans Roeb, professeur d'études commerciales à la Haute école de Bonn Rhein-Sieg. Cette fois, une simple campagne de communication ne suffira plus à s'aliéner le bonheur des enfants
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