
Deux mois et trois jours après le début de la guerre en Ukraine, les sanctions occidentales contre la Russie conduisent le français TotalEnergies (ex-Total) à amorcer « le début d’un repli », selon un porte-parole. Mercredi 27 avril au soir, la compagnie pétrogazière a annoncé une dépréciation d’actifs de l’ordre de 4,1 milliards de dollars (3,9 milliards d’euros), en particulier pour le mégaprojet gazier Arctic LNG 2. Censée entrer en production à partir de 2023, la gigantesque usine de gaz naturel liquéfié, située sur la péninsule de Gydan, dans le nord de la Sibérie, pourrait être stoppée net.
TotalEnergies prévoit ainsi un retrait prématuré du chantier, la contraignant à inscrire la provision sur ses comptes du premier trimestre 2022, présentés le 28 avril. Sans cette soustraction programmée de 4,1 milliards de dollars, l’entreprise a enregistré un résultat net ajusté de 9 milliards de dollars. Soit trois fois plus qu’à la même période de 2021.
Depuis le 24 février, l’attaque russe sur le sol ukrainien tire les prix du pétrole et du gaz à la hausse, amplifiant les effets de la forte reprise de l’activité économique de 2021. Une tension générale dans le secteur des hydrocarbures. « Les pays consommateurs et les marchés craignent de possibles risques sur les futurs approvisionnements en pétrole et en gaz, rappelle Francis Perrin, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques, à Paris. D’autant que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés, dont la Russie, gardent pour l’instant une feuille de route immuable, comme si la guerre n’existait pas. »
Place stratégique centrale
Pour justifier son amorce de repli d’Arctic LNG 2, TotalEnergies met en avant les sanctions occidentales contre la Russie. Celles-ci « font peser des risques supplémentaires sur la capacité d’exécution du projet », indique un communiqué de l’entreprise. Depuis le 8 avril, l’Union européenne interdit par exemple à ses Etats membres d’exporter des biens et des technologies nécessaires à la liquéfaction du gaz naturel en Russie.
Le 22 mars, l’entreprise avait déjà indiqué son choix de ne plus enregistrer de réserves prouvées au titre d’Arctic LNG 2, « compte tenu des incertitudes que font peser les sanctions technologiques et financières sur la capacité à réaliser le projet en cours de construction ». Elle détient pour l’instant 21,6 % du projet, notamment par sa présence au capital du groupe privé russe Novatek. En revanche, TotalEnergies reste jusque-là bien présent dans le champ voisin, celui de Yamal.
Le pays occupe une place centrale dans la stratégie industrielle du groupe : miser de plus en plus sur le gaz, présenté comme une énergie moins nocive que le charbon et donc comme une possible alternative pour le marché chinois. A elle seule, la Russie représentait ainsi 31,5 % de la production gazière de la firme en 2021.
A la différence d’autres poids lourds dans les hydrocarbures (BP, Shell, Equinor, Exxon), la multinationale refuse donc pour le moment d’annoncer un retrait de tous ses actifs russes, malgré une forte pression de la part d’ONG environnementales ou de responsables politiques. En pleine campagne présidentielle, en mars, le candidat écologiste, Yannick Jadot, était allé jusqu’à accuser l’entreprise de « complicité de crimes de guerre » pour son refus de quitter la Russie. « Abandonner ces participations sans contrepartie financière contribuerait (…) à enrichir des investisseurs russes », répliquait alors l’entreprise, tout en annonçant des poursuites en diffamation.
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