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Démantèlement d'Atos : l'Etat va récupérer le contrôle des activités stratégiques dont le nucléaire, affirme Bruno Le Maire - La Tribune.fr

C'était une annonce attendue alors que le sort d'Atos, en graves difficultés financières et à la recherche d'une solution de sauvetage, doit bientôt être tranché. Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a annoncé ce mardi son intention de placer sous le contrôle de l'Etat les activités de contrôle-commande des centrales nucléaires françaises actuellement détenues par le géant informatique français et jugées « stratégiques ».

« Je vous confirme que toutes les activités stratégiques resteront sous le contrôle de la puissance publique, y compris les commandes de contrôle de nos centrales nucléaires », a déclaré Bruno Le Maire sur CNews-Europe 1, évoquant une éventuelle reprise par « EDF, ou une entreprise proche d'EDF ».

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Activités souveraines

L'État s'était manifesté fin avril en envoyant une lettre d'intention au groupe, afin de lui signifier son intérêt d'acquérir ses activités souveraines, pour éviter qu'elles ne « passent dans les mains d'acteurs étrangers », avait alerté Bruno Le Maire. Une initiative qu'Atos avait dit accueillir avec « satisfaction ». Les activités visées par l'exécutif recouvrent, entre autres, des supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire et des produits de cybersécurité. Bercy avait également fait savoir que le gouvernement souhaitait rallier à sa démarche d'autres acteurs français.

Son appel avait alors été entendu par l'entreprise française Chapsvision, spécialiste de l'analyse de données, qui était entrée dans le dossier en se disant intéressée par certaines des activités visées par l'État, notamment la branche MCS qui comprend par exemple le système de sécurisation des réseaux de communication à bord des avions Rafale « F4 » de Dassault. Thales avait aussi laissé entendre que les mêmes activités pouvaient l'intéresser.

Bercy s'était aussi déjà engagé à prêter 50 millions d'euros à l'entreprise pour l'aider à stabiliser sa situation financière et a acquis une « action de préférence », lui permettant de mettre son veto à certaines opérations au niveau de Bull, la filiale d'Atos qui construit ses supercalculateurs.

Cependant, Worldgrid, la filiale hautement critique d'Atos qui conçoit les systèmes de pilotage des centrales nucléaires notamment pour EDF, ne fait pas partie du périmètre « sécurisé » par l'Etat, alors que le sauvetage du géant fait craindre une éventuelle cession de cette filiale. Mais le ministre de l'Economie ne compte pas la laisser filer :

« Je ferais en sorte que le contrôle-commande des centrales nucléaires, qui aujourd'hui est dans Atos et pas encore dans le périmètre que nous avons sécurisé, soit dans le périmètre (...) qui restera sous le contrôle de la puissance publique », a martelé Bruno Le Maire. « Il n'est pas question que ce contrôle de commandes des centrales nucléaires puisse désormais partir je ne sais trop où, elle doit rester sous le contrôle de la puissance publique », a-t-il répété.

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Quatre offres pour reprendre le géant

Le géant informatique français, en grande difficulté et lourdement endetté, s'est donné jusqu'au 31 mai pour pouvoir présenter une solution de sauvetage financier à ses créanciers, après avoir reçu quatre offres avant la date butoir qu'il avait fixée. L'ex-fleuron de la « French Tech » avait annoncé début mai avoir besoin de 1,1 milliard d'euros de liquidités pour son activité en 2024-2025 et vouloir réduire de 3,2 milliards d'euros sa dette brute, qui avoisine les 5 milliards. La crainte est de voir les activités d'Atos se faire démanteler.

Parmi les offres en lice figurent notamment celle d'EPEI du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky (un temps en discussions pour racheter la branche infogérance d'Atos, Tech Foundations, avant de voir les négociations rompues en février), allié au fonds Attestor ; et celle de Onepoint, premier actionnaire d'Atos avec environ 11% du capital, dans un consortium au sein duquel figurent également la société d'investissement de l'homme d'affaires Walter Butler et l'entreprise Econocom.

Kretinsky et Attestor ont indiqué avoir soumis une offre « entièrement financée » pour reprendre « l'ensemble du périmètre d'Atos », qui prévoit également l'annulation de 4 milliards d'euros de dette. Ils se disent prêts à apporter 1,9 milliard d'euros au groupe, dont 600 millions d'euros de fonds propres et 1,3 milliard de « financements opérationnels ».

De son côté, l'offre de David Layani, patron de Onepoint, prévoit également une restructuration de la dette d'Atos à hauteur de 3,2 milliards d'euros, conformément au souhait du groupe. Le consortium qu'il mène défend la « préservation de l'unité d'Atos » et propose un apport de 1,8 milliard d'euros, dont 350 millions d'euros d'argent frais.

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Offre de créanciers

La troisième offre est celle du fonds d'investissement Bain Capital. Mais il a été décidé de ne pas poursuivre les discussions avec le fonds, « car la proposition soumise ne répondait pas aux objectifs déclarés de la société de prendre en compte l'ensemble de son périmètre », a déjà fait savoir Atos dans son communiqué.

Enfin, une dernière offre émane d'un groupe de créanciers et de banques du géant informatique, selon une information révélée par La Tribune début mai. Jusqu'ici divisés, les créanciers se sont accordés pour soutenir le groupe via de nouveaux financements et en convertissant une partie de la dette en capital.

« Nous allons maintenant travailler avec nos créanciers financiers pour trouver une solution d'ici le 31 mai qui leur soit acceptable et conforme aux paramètres que nous avons partagés. Je suis convaincu qu'un accord final pourra être conclu d'ici la date cible de juillet », a souligné début mai Paul Saleh, directeur général de la société.

Le groupe prévient toutefois que la solution trouvée devrait entraîner « des changements radicaux » dans sa structure de capital avec l'émission de nouvelles actions, ce qui entraînerait une « dilution massive » de ses actionnaires. Autrement dit, ils verraient la part qu'ils détiennent de la société fondre drastiquement.

Bras de fer intense

Mais les différentes fuites sur l'état de santé de l'entreprise et les prises de position dans la presse révèlent un intense bras de fer en coulisses entre toutes les parties. « La vitesse du déclin d'Atos est tout simplement énorme », a notamment indiqué un porte-parole d'EPEI, cité mercredi par Le Figaro. « Si cette restructuration n'est pas conduite en tenant compte de la réalité de la situation financière de la société, il n'y aura plus rien dans un an », a-t-il ajouté.

Le syndicat CFE-CGC d'Atos, majoritaire, avait déjà réclamé la semaine dernière de la « transparence » et alerté « sur le fait que les salariés sont aujourd'hui les grands oubliés du processus de restructuration en cours ».

Alors que le compte à rebours est enclenché, l'enjeu des prochains jours est clair, pour un des acteurs du dossier : « Un deal rapide est nécessaire pour redonner une nécessaire stabilité (à la situation), avec un actionnaire de référence clair, car c'est ce qui va donner de la confiance vis-à-vis des clients et des employés ».

D'autant que le dossier préoccupe politiquement : dans une tribune transpartisane publiée dans La Tribune Dimanche, des parlementaires ont récemment appelé « tous les acteurs publics et économiques à maintenir Atos sous pavillon français pour protéger notre autonomie stratégique ». « Atos doit rester française, entière, indépendante », ont insisté notamment les présidents des groupes LR à l'Assemblée nationale et au Sénat Olivier Marleix et Bruno Retailleau, leurs homologues socialistes Boris Vallaud et Patrick Kanner ainsi que Fabien Roussel, secrétaire national du PCF.

« Non seulement elle ne doit pas être vendue à la découpe, mais elle doit saisir cette opportunité unique de créer en France un champion mondial de la tech. Emmanuel Macron n'avait-il pas lui-même souhaité que la France devienne un champion de l'IA ? », ont-ils plaidé.

Atos pilier de l'organisation des JO

Dans les prochains mois, Atos doit aussi être un des piliers de l'organisation des Jeux olympiques (du 26 juillet au 11 août) et paralympiques (du 28 août au 8 septembre), notamment en hébergeant les données personnelles des participants et en fournissant ses services en matière de cybersécurité.

Interrogé en mars par Le Figaro pour savoir si la situation actuelle du groupe pourrait avoir des répercussions sur ces événements sportifs planétaires, le directeur général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), gendarme français de la sécurité informatique, s'est voulu rassurant.

« Évidemment, nous avons une vigilance particulière compte tenu des difficultés que la société a pu rencontrer, mais je n'ai aujourd'hui aucun signe d'alerte lié à la situation du groupe qui se répercuterait sur la sécurité de ce qu'ils font pour les Jeux. Nous les suivons de près pour s'assurer qu'il n'y a pas de dérives. Mais il n'y en a pas aujourd'hui », a affirmé Vincent Strubel.

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