
Finalement, le Medef sera sorti du bois. Ce mardi midi, près de 40 heures après l'annonce par Emmanuel Macron de la dissolution de l'Assemblée nationale , l'organisation patronale a fini par envoyer un communiqué de presse fixant ses lignes rouges pour les prochaines législatives. La veille au soir, en réaction à une des plus fortes déflagrations politiques de la Ve République, elle s'était contentée d'une simple phrase envoyée à quelques journalistes.
Gêné, le patronat ? « Il y a une certaine prudence, les chefs d'entreprise sont sidérés comme l'ensemble de la société », reconnaît une figure du monde des affaires. C'est ce patron du CAC 40, qui raconte avoir convoqué un comité exécutif lundi matin pour faire le point sur la situation politique inédite. C'est cette phrase qui revenait ces dernières heures dans les conversations de dirigeants furieux : « Macron nous fout dans la merde ! » Une forme de désamour pour un chef de l'Etat longtemps adoré .
Le repoussoir RN
Pourtant, dès lundi, les organisations patronales ont cherché à réagir. Le Medef, la CPME et l'U2P ( artisans, petits commerçants et professions libérales ) ont tenté d'aboutir à un communiqué commun. Au sein de toutes ces organisations, le programme économique du RN - le grand favori des prochaines législatives - fait figure de repoussoir. « C'est une hérésie, il est complètement inapplicable », juge un dirigeant de PME qui avait trouvé Jordan Bardella « complètement nul » lors de son audition en avril par la CPME.
Mais cette concertation n'a finalement pas abouti, chacun préférant finalement faire chambre à part. Une décision qui dit bien la réticence des organisations patronales à avancer sur le terrain politique. « Beaucoup d'adhérents considèrent que ce n'est pas notre rôle de nous positionner dans le débat électoral », explique un dirigeant de fédération. En 2022, le Medef avait pris clairement position contre Marine Le Pen avant le second tour de la présidentielle et cela avait déjà occasionné de longs débats au sein de ses instances.
« Cela n'allait pas de soi, d'autant qu'il y a des électeurs RN parmi les adhérents comme dans toute la société », se rappelle un témoin de l'époque. « C'est encore plus compliqué aujourd'hui, avec un RN à 30 %. Jordan Bardella a fait la course en tête chez les salariés, c'est difficile pour un patron de prendre la parole après ça », juge la figure du milieu des affaires.
« Communiqué anti populistes »
Tout ceci a abouti à un communiqué pour le moins sibyllin lundi soir de la CPME (où là aussi on trouve des électeurs de Jordan Bardella dans les rangs), mettant en garde contre des « réformes coûteuses » sans vraiment cibler explicitement le RN. Le Medef est plus offensif dans ce communiqué de mardi, tapant plus clairement sur des mesures mises en avant par LFI et le RN, comme « le retour à la retraite à 60 ans ou 62 ans, […], la nationalisation des autoroutes […], la sortie du nucléaire ou de l'énergie » et réclamant une « inscription forte dans le jeu européen ». « C'est un communiqué antipopulistes », explique-t-on au Medef.
Pas sûr que cela suffise à Bruno Le Maire. Mardi matin sur BFMTV, le ministre a appelé le « monde économique » à se mouiller, contre le RN. Il faut que les chefs d'entreprise disent « que […] si ce programme-là passe, on ferme nos usines et on supprime des emplois », a-t-il argué. « Je pense au contraire qu'une prise de position trop forte du patronat serait du carburant pour le vote RN anti-�élites », répond le patron du CAC 40.
LFI fait plus peur que le RN
L'attentisme est d'autant plus fort que le monde économique juge que la situation n'est pas stabilisée. Est-ce que des pans entiers de LR basculeront vers le RN ? Est-ce que LFI gardera le leadership à gauche ? « Au sein du patronat, LFI suscite des angoisses beaucoup plus fortes que le RN. Au fond, on se dit que si LR les rejoint, cela deviendra un RPR new-look », estime un dirigeant de fédération. Le monde des affaires n'a pas oublié ce qui s'est passé en Italie. « On peut très bien estimer que Marine Le Pen fera comme Giorgia Meloni et amendera son programme », analyse le patron du CAC 40.
Pour Alain Minc, cette prudence ne durera qu'un temps. « L'ancienne Première ministre britannique Liz Truss n'a duré que trois jours face aux marchés. D'ici au 7 juillet, le spread [l'écart de taux avec l'Allemagne, NDLR], qui a déjà nettement augmenté , va encore grimper et rendre la situation économique terrifiante. Cela va faire peur aux patrons et aux classes moyennes et mobiliser un électorat en faveur des partis de gouvernement », assure l'essayiste.
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