L'économie française va-t-elle plonger en 2024 ? Rien n'est moins sûr. Après un mois de tempête politique, marquée par l'annonce tonitruante de la dissolution de l'Assemblée nationale et des législatives tourmentées, les entreprises et les ménages sont préoccupés par le contexte politique électrique. Très loin d'apporter une clarification annoncée par Emmanuel Macron, les résultats des élections législatives n'ont pas débouché sur une majorité claire au sein de l'Assemblée nationale.
Le chef de l'Etat a suspendu la démission du gouvernement Attal et les forces de gauche sont actuellement en pleine tractation pour trouver le candidat idéal pour Matignon. Malgré cet épais brouillard, l'Insee ne prévoit pas d'effondrement de l'économie. Du moins pour l'instant.
La situation politique, un aléa important sur la croissance
Dans sa note de conjoncture dévoilée ce mardi, l'institut de statistiques table sur une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 1,1%, comme en 2023. Pour rappel, l'Insee avait initialement prévu de dévoiler sa première prévision pour l'ensemble de l'année 2024 le 18 juin dernier.
Compte tenu de la période de réserve, les statisticiens avaient toutefois décalé cette présentation. Ce qui signifie que les réponses aux enquêtes obtenues avant le 9 juin ne reflètent évidemment pas le moral des agents économiques après la dissolution. Considérant que cette période constitue « un aléa », les conjoncturistes ont estimé qu'elle pouvait modifier les comportements.
Après le neuf juin, « les indicateurs financiers ont connu une baisse et la hausse du spread (l'écart de taux OAT/Bund) entre la France et l'Allemagne témoignent d'une montée des incertitudes, mais si on compare à la crise des dettes souveraines, le spread a moins augmenté », a déclaré Dorian Roucher, chef du département de la conjoncture, lors d'un point presse. Chez les ménages, « il existe une bulle d'optimisme sur ces moments électoraux », souligne l'économiste s'appuyant sur la précédente cohabitation de 1997.
« La situation est cependant inhabituelle par rapport aux autres périodes de cohabitation », rappelle-t-il. Côté entreprise, « les évolutions des indices financiers reflètent une hausse de l'incertitude susceptible de générer une forme d'attentisme, en particulier sur les décisions d'investissement ».
Une légère hausse du pouvoir d'achat attendue
L'indice des prix à la consommation a reflué sur un an passant de 4,5% à 2,1%, soit un niveau très proche de la cible de la Banque centrale européenne (2%). Après avoir grimpé vers des sommets, l'inflation alimentaire et celle des produits agricoles se sont stabilisées. Dorénavant, ce sont plutôt les services qui poussent l'inflation. Les hausses de salaires restant « modérées », il n'y a pas de « boucle prix salaire », souligne l'Insee. « Les ménages réengrangent un peu de pouvoir d'achat après deux années de vaches maigres », note Dorian Roucher.
Malgré cette légère embellie, « la hausse ne compense pas les pertes cumulées sur les deux années », nuance Clément Bortoli, Chef de la division Synthèse conjoncturelle. À l'exception du salaire minimum indexé sur l'inflation, la plupart des revenus réels des travailleurs ont décroché depuis l'éclatement de la guerre en Ukraine. Dans le secteur privé par exemple, les salaires réels ont reculé de près de 1% (0,8%) en 2023. Résultat, la consommation des ménages, traditionnel moteur de la croissance, a flanché en 2022 et 2023. Les économistes s'attendent néanmoins à une consommation des ménages plus favorable cette année (+1,3% contre 0,9% en 2023), supérieure même au niveau de croissance (1,1%).
Des investissements en berne
L'investissement des entreprises, lui, reste à la peine. Après avoir fortement rebondi dans le sillage du Covid, la courbe d'opinion des chefs d'entreprise n'a cessé de chuter. Frappées par l'envolée des prix de l'énergie, les entreprises ont brutalement appuyé sur le frein de leurs dépenses d'investissement depuis le début de la guerre en Ukraine. A cela s'est ajouté, le resserrement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne depuis l'été 2022.
Pressées par les hausses de taux, les conditions financières dans la zone euro se sont largement durcies. La décision de la BCE de baisser les taux en juin dernier devrait redonner du souffle aux entreprises, mais les perspectives sont loin d'être dégagées. «L'investissement des entreprises resterait contraint par le coût du crédit », souligne Clément Bortoli. Concernant les marges, les entreprises ont pu limiter la casse malgré les différentes crises. « Cette bonne tenue des marges s'explique par une baisse des salaires réels. Lors des précédents chocs pétroliers, les salaires réels avaient augmenté », rappelle l'économiste. Reste à savoir comment la conjoncture va évoluer au courant de l'été particulièrement brûlant politiquement.
Jeux olympiques : seulement 0,1 point de croissance en 2024
Le début imminent des Jeux olympiques devrait booster l'activité de l'économie française de l'ordre de 0,3 point au troisième trimestre 2024. Sur les différents facteurs de contribution à la croissance du PIB, les constructions nécessaires aux Jeux ont dopé l'activité, « mais elles sont derrière nous », rappelle l'Insee. Les autres leviers sur la croissance concernent principalement les ventes de billets, les ventes des droits d'audiovisuel, le surcroît de tourisme et la consommation dans l'hôtellerie et la restauration. Sur l'ensemble de l'année, l'impact sur le produit intérieur brut serait de seulement 0,1 point.
Bagikan Berita Ini
0 Response to "Malgré la tempête politique, l'économie française devrait résister en 2024... pour l'instant - La Tribune.fr"
Post a Comment