Plafond d'indemnités aux prud'hommes, CDI à durée limitée, plans sociaux facilités... La réforme du code du travail dévoilée ce 31 août va loin.
Et la lumière fut. Édouard Phlippe et Muriel Pénicaud viennent de présenter officiellement les ordonnances visant à réformer le code du travail. Après des semaines de brouillard, à se perdre en conjectures sur les arbitrages du gouvernement, voilà dévoilées 160 pages de considérations techniques que syndicats, organisations patronales, journalistes et experts juridiques, vont désormais devoir décortiquer, pour soupeser l'étendue du changement. En voici déjà les grandes lignes.
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1. Des indemnités prud'hommes plafonnées à 20 mois d'ancienneté
Le fameux barème des indemnités prud'hommes à verser par l'employeur, que le juge devra obligatoirement suivre en cas de licenciement abusif, est désormais connu. Il s'articule autour d'un plancher, d'un plafond, avec une progressivité en fonction de l'ancienneté du salarié.
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Les dommages et intérêts perçus aux prud'hommes en cas de licenciement abusif seront plafonnés à 20 mois de salaire brut pour 30 ans d'ancienneté, avec un plancher de 3 mois de salaire à partir de 2 ans d'ancienneté.
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Les salariés des TPE (moins de 11) auront un traitement moins favorable: le plancher sera de 2,5 mois à compter de 9 ans d'ancienneté.
2. Moins de temps pour saisir les prud'hommes
Comme prévu, le délai de saisine des prud'hommes qu'aura un salarié, s'il estime son licenciement illégal, est fortement réduit. Aujourd'hui de deux ans dans la plupart des cas, il va passer à 12 mois.
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Côté employeur, le formalisme de la procédure de licenciement est allégé. Pour se séparer d'un salarié, il pourra désormais remplir un formulaire standardisé de type Cerfa.
3. Plus de poids pour l'accord d'entreprise, mais...
Les ordonnances devaient redonner un poids certain à la négociation d'entreprise. C'est le cas. Mais la branche ne sort pas pour autant dépouillée de l'exercice. Elle garde la suprématie sur certains sujets importants comme la classification, les minima salariaux...
Les entreprises devraient retrouver une capacité de négociation pour négocier leur propre agenda social. Elles devraient aussi pouvoir renégocier, potentiellement à la baisse, un grand nombre de primes: prime d'ancienneté, 13e mois... Muriel Pénicaud voit le verre à moitié plein. Pour la ministre, c'est l'occasion, par exemple, dans une entreprise où les salariés sont de jeunes parents, de négocier une prime de garde d'enfant au lieu d'une prime d'ancienneté. Contrairement à ce qui été récemment évoqué, les entreprises ne pourront pas négocier les dispositions encadrant le congé maternité.
4. Facilitation des plans sociaux
Le périmètre d'appréciation des difficultés économiques d'une entreprise devient national. Jusqu'à présent, l'ensemble des activités mondiales étaient envisagées. Pour éviter que de grands groupes internationaux en pleine santé "organisent" le déficit de leur filiale française, Muriel Pénicaud a indiqué qu'il y aurait des garde-fous.
De nouveaux accords de compétitivité sont par ailleurs créées pour permettre aux entreprises, selon Muriel Pénicaud, "de s'adapter rapidement à la hausse ou à la baisse de marchés, par accord majoritaire, en jouant sur l'organisation et le temps de travail". Une façon, d'après la ministre "d'allier compétitivité économique et justice sociale". Pour être autorisé à négocier un tel accord, il suffira que le fonctionnement de l'entreprise le nécessite ou que soit en jeu la préservation de l'emploi. Les salariés n'acceptant pas l'accord signé auront droit à l'assurance-chômage et à 100 heures de formation abondés par l'employeur sur leur compte personnel d'activité (CPA).
Comme il s'y était engagé, le gouvernement a aussi décidé de créer des sortes de "plans de départ autonomes", indépendants de tout plan de sauvegarde de l'emploi et de mesures de reclassement afférentes.
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Il a baptisé ces nouveaux plans "ruptures conventionnelles collectives", en référence aux ruptures conventionnelles individuelles qui ont tant la cote. Les parties négocieront ensemble les modalités du départ. Leur convention devra ensuite être homologuée par la Direccte. L'entourage de Muriel Pénicaud assure que l'administration sera en mesure de vérifier que ne se cachent pas, derrière ces plans de départ volontaire, des charrettes spéciales seniors...
5. Extension du CDI de chantier
Les ordonnances permettent aux branches de négocier la possibilité de signer des CDI de chantier dans leur secteur. Ce type de contrat est utilisé depuis longtemps dans le bâtiment. Le contrat s'arrête quand la mission, le projet, qui sous-tendait son existence, se termine.
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Cela peut donc être au bout de quelques semaines, quelques mois, quelques années... Le salarié a alors droit aux allocations chômage. Mais il ne touche pas la prime de précarité perçue en fin de CDD.
6. Accords signés sans syndicats
La réforme acte la fin du monopole syndical dans la négociation. Jusqu'ici, en l'absence de délégués syndicaux dans l'entreprise, il fallait absolument que l'élu ou le salarié entrant en discussion avec l'employeur soit mandaté par un syndicat.
En l'absence de délégué syndical, les entreprises de moins de 50 salariés pourront négocier un accord directement avec un élu non mandaté.
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Dans les TPE de moins de 11 salariés, la réforme va encore plus loin en donnant la possibilité à l'employeur de procéder par référendum à son initiative sur tous les sujets: temps de travail, organisation du travail, rémunération... Cette possibilité est même ouverte jusqu'à 20 salariés en l'absence de délégué du personnel.
7. Fusion des instances représentatives du personnel
La réforme acte la fusion des instances représentatives du personnel que sont les délégués du personnel, le comité d'entreprise, et le comité d'hygiène et sécurité (CHSCT), en un comité social et économique (CES) réunissant leurs prérogatives. Objectif: simplifier le dialogue social et éviter la redondance de réunions.
Les entreprises de moins de 50 salariés ne sont de fait pas concernés par cette refonte, même si les délégués du personnel vont changer de nom. Seules les entreprises de 300 salariés et plus devront conserver obligatoirement une commission hygiène et sécurité. Ainsi que les entreprises de 50 salariés et plus aux activités sensibles (nucléaires, Seveso).
Des décrets doivent venir fixer le budget et les heures de délégation du CES. La fusion des IRP de toutes les entreprises interviendra au fur et à mesure des élections (post-décrets). Elle devrait être actée partout au 1er janvier 2020.
Par accord d'entreprise, il sera possible d'aller plus loin que le CES en ajoutant des compétences de négociation à l'instance unique, qui portera alors le nom de conseil d'entreprise. La "codécision à l'allemande" est l'objectif ultime affiché par le gouvernement.
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