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Prime à la casse : pourquoi 1.000 euros ne suffisent pas

Parmi les mesures annoncées ce 18 septembre par le Ministre de la Transition écologique pour rendre "irréversible" l'accord international de lutte contre le réchauffement climatique signé à Paris, en décembre 2015, on trouve un élargissement des conditions d'attribution de la prime à la casse. A partir de 2018 (il reste à préciser la date d'entrée en vigueur), tous les Français propriétaires de véhicules à moteur Diesel d'avant 2001, et à moteur essence d'avant 1997 pourront toucher une prime de 500 euros à 1.000 euros pour l'achat d'un véhicule neuf.

Grande nouveauté, cette prime sera également versée pour l'achat d'un véhicule d'occasion. A condition qu'il soit porteur de l'une de ces trois vignettes : la vignette verte Crit'Air 0 (réservée aux voitures électriques), la vignette rose Crit'Air 1 (pour les hybrides rechargeables ou les véhicules au gaz naturel et GPL ; ainsi que les essence Euro 5 et 6) ou bien la vignette Crit'Air 2 (pour les Diesel Euro 5 et 6 et les essence Euro 4).

Une prime à la casse basée sur les vignettes Crit'Air

Concrètement, l'achat d'une voiture Diesel d'occasion ne pourra être soutenu par la nouvelle prime que si la date de sa première immatriculation est postérieure au 1er janvier 2011. Peu importe qu'un Diesel immatriculé avant cette date dispose d'un filtre à particules. Pourtant, ils sont nombreux dans ce cas ! Hélas, Nicolas Hulot n'entend pas corriger cette injustice, commise par sa devancière Ségolène Royal lorsqu'elle fixait la grille de ses vignettes Crit'Air.

L'élargissement de la prime à la conversion aux véhicules de seconde main récents est la transcription d'une promesse de campagne d'Emmanuel Macron. Surtout, il est le signe d'un pragmatisme nouveau et bienvenu chez nos édiles qui pourrait assurer au programme d'incitations le succès qu'il n'a pas connu jusque-là.

Mille euros ne suffisent pas aux ménages modestes

Le Ministère de la Transition écologique s'est rendu compte en effet que la prime actuelle de 1.000 euros n'a rien changé à cette dure vérité : les véhicules les plus récents restent désespérément hors de portée financière des ménages les plus modestes. Il faudrait leur offrir davantage que 1.000 euros pour les convaincre de se séparer de leur vieux Diesel.

Songez que 242 Français seulement ont bénéficié en 2016 de la prime de 1.000 euros versée en échange de la mise à la casse d'un vieux Diesel d'avant 2006. Un coup de pouce réservé aux ménages non imposables qui n'est pas suffisant, ainsi que le déplore la Cour des Comptes dans son rapport de juin 2017. Le montant est ramené à 500 euros pour l'achat d'une occasion récente Euro 5.  

Le gouvernement d'alors avait espéré convaincre quelque 46.000 Français de changer de voiture. De son côté, Nicolas Hulot déclare viser "plus de 100.000 véhicules concernés en 2018". L'objectif est d'échapper aux critiques de ceux qui accusent le gouvernement d'user de demi-mesure dans la lutte contre la pollution atmosphérique. Même rengaine outre-Manche, où l'opposition déplore que le montant trop faible des primes à la casse successives.

Pour des raisons financières, les Français conservent plus longtemps leur voiture

Effet de la crise, l'âge moyen du parc automobile français ne cesse d'augmenter : de 6 ans en 1990, il est grimpé à 8,7 ans en 2015. Qu'elles soient de fabrication française ou allemande, les voitures âgées de dix ans et plus ne sont certes pas des parangons de fiabilité. Mais celles qui roulent encore ont été patiemment fiabilisées, à un coût non négligeable pour leur propriétaire : quel qu'il soit, le montant de la prime ne couvrira pas les dépenses engagées.

Pire, casser sa tirelire pour s'offrir une occasion récente (post-2011) ne met pas forcément à l'abri de pannes et de grosses dépenses. Car les constructeurs — français aussi bien qu'allemands —ont connu au début des années 2000 une suite peu glorieuse d'épidémies de pannes d'injecteurs, de volants moteur, de joints de culasse et de vannes EGR. Sans parler des défaillances d'ordre électroniques, suite au passage aux faisceaux multiplexés et à l'irruption de nouveaux équipements (accès et démarrage mains-libres). Plus récemment, les filtres à particules colmatés et les turbos rincés sont venus grossir cette litanie de pannes qui font mal, très mal au portefeuille.

Cette peur de la grosse douloureuse va de pair avec la crainte d'un coût d'entretien qui va à la hausse à mesure que se perfectionnent nos voitures. Ajoutez à cela un renchérissement du prix du gazole et la menace de l'interdiction pure et simple du Diesel dans certaines villes, et vous comprendrez pourquoi les Français se détournent du Diesel.

Le Diesel en perte de vitesse sur le marché du neuf ; bientôt en occasion aussi

Au mois d'août 2017, le Diesel est devenu minoritaire dans les ventes de véhicules neufs. Sur le marché de l'occasion, la demande reste stable. Mais l'hebdomadaire Auto Plus rapportait dans son édition du 8 septembre qu'elle baisse en Allemagne (avec un effet direct sur les prix), là où les gouvernements régionaux professent des menaces plus directes. Un effet de contagion à la France est déjà anticipé par les professionnels du secteur.

Un véhicule essence ne pèsera pas moins sur le budget des familles. En avril 2017, Auto Plus passait au crible le coût d'utilisation de 250 modèles et démontrait que la révision d'un Diesel moderne coûte à peine plus cher que celui d'un modèle équivalent à essence. En partie parce que les moteurs à essence sont de plus en plus sophistiqués, du fait de la généralisation de l'injection directe et de la suralimentation, quinze ans après le Diesel.

Élargir le nombre de bénéficiaire

En étendant la prime à la casse à tous les automobilistes français, sans condition de revenus, le Ministre Nicolas Hulot devrait garantir son succès populaire. L'objectif n'est pas d'aider plus particulièrement les ménages modestes mais d'accélérer le rythme de renouvellement du parc automobile et de diminuer sa part dans les émissions de polluants atmosphériques.

Dans cette optique, le gouvernement choisit une fois de plus de favoriser la voiture électrique. "Pour tous ceux qui souhaitent passer à l’électrique, la prime à la conversion sera de 2.500 euros", annonce le Ministre de la Transition écologique ce 18 septembre. Problème, le marché n'est peut-être pas tout à fait prêt.

C'est une question de principe. Échaudé par les développements du scandale Volkswagen, le gouvernement français cherche à précipiter l'avènement de l'ère de la voiture électrique. Quitte à bafouer le principe de neutralité technologique auquel s'astreint la réglementation communautaire lorsqu'elle fixe les seuils de polluants. A charge pour les constructeurs de trouver le moyen le mieux adapté pour ne pas les dépasser.

Le Gouvernement favorise l'électrique

Les constructeurs et les équipementiers sont très attachés à ce principe de neutralité technologique. Ils s'en sont ouverts devant les membres de la Mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'offre automobile française que pilotaient les Députées Sophie Rohfritsch et Delphine Batho durant la précédente législature. A son tour la semaine dernière, au salon de Francfort, le grand patron du Groupe PSA mettait en garde les gouvernements européens contre les mirages de l'électrique : "Nous sommes en train d'évoluer d'un monde où la réglementation était neutre vis-à-vis des technologies, vers un monde où on nous instruit d'aller dans la direction du véhicule électrique", a déclaré Carlos Tavares. "Si on nous donne instruction de faire des véhicules électriques, il faut aussi que les administrations et les autorités assument la responsabilité scientifique. Parce que je ne voudrais pas que dans 30 ans, on ait découvert les uns ou les autres quelque chose qui n'est pas aussi beau que ça en a l'air."

Carlos Tavares citait comme risques la question de l'origine plus ou moins renouvelable de la production d'électricité, celle du recyclage des batteries, la gestion des matières premières rares ou encore l'éventualité des émissions électromagnétiques des batteries lorsqu'on les charge.

Des primes à l'initiative des constructeurs eux-mêmes

Au début du mois d'août, les constructeurs allemands étaient conviés par le gouvernement fédéral à plaider leur cause et celle du Diesel. Comme signe de bonne volonté et dans un souci d'accélérer le renouvellement du parc automobile, Daimler, le Groupe Volkswagen et Ford ont annoncé offrir des rabais pour l'achat de véhicules neufs.

Deux d'entre eux ont choisi de les étendre au marché français.

Chez Mercedes-Benz : 2.000 euros pour l'achat d'un Diesel Euro 6 neuf ou d'une hybride rechargeable neuve. Et aussi : 1.000 euros pour l'achat d'une Smart Fortwo électrique.

Chez BMW, prime de 2.000 euros pour pour la reprise d'un véhicule Diesel répondant à la norme Euro 4 (ou plus ancienne). Seule condition, commander une BMW ou une Mini neuve conforme à la norme Euro 6 et n'émettant pas plus de 130 g/km de CO2 (NEDC), ou bien une BMW i3 tout-électrique.

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