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Airbus: chronique de départs annoncés

Une décennie de l'histoire d'Airbus, de la crise de l'A380 au record de livraisons de 2017, a brutalement pris fin jeudi soir, avec l'annonce par le conseil d'administration  du départ de Fabrice Brégier en février prochain , et de celui de Tom Enders, dans 16 mois. Dix ans, c'est en effet le temps durant lequel les deux hommes auront travaillé ensemble, pour faire d'un holding en crise une véritable entreprise intégrée, co-leader mondial de l'aéronautique civile et modèle à suivre pour toute l'industrie européenne.

Durant cette période, le tandem Enders-Brégier aura mené à bien la restructuration de l'avionneur Airbus, la remise en ordre du programme A380, le lancement de l'A350, de l'A320 Neo et de l'A330 Neo, l'installation de chaînes d'assemblage en Chine et aux Etats-Unis et le quasi-doublement de la production d'avions civils.

Une crise amorcée en 2016

Il aura pourtant suffi d'une obscure affaire d'intermédiaires non déclarés dans quelques ventes d'avions réalisées au début de la décennie par une branche un peu spéciale de la direction du marketing d'EADS pour tout remettre en cause. Selon les uns, la crise entre les deux hommes aurait débuté début 2016 avec la décision de Tom Enders, soutenu par le « board », de porter à la connaissance de la justice britannique et française les « irrégularités » découvertes sur des contrats lors d'un audit interne. 

« Tom Enders savait très bien quelles pouvaient être les conséquences de cette procédure pour son avenir dans le groupe, mais depuis le grave accident dont a été victime sa femme il y a deux ans, sa priorité est désormais d'utiliser son deuxième mandat pour faire le ménage au sein de l'entreprise, quelles que soient les conséquences pour lui-même », assure-t-on dans son entourage. A l'instar de ce qui s'est passé chez Rolls-Royce, où plus de 200 managers ont dû quitter l'entreprise durant la même procédure d'auto-dénonciation et de « remise en conformité », le grand patron d'Airbus sait qu'il devra ensuite probablement passer la main.

Fabrice Brégier fait de la résistance

Mais son directeur adjoint, Fabrice Brégier, n'est pas sur la même longueur d'onde. Tout en reconnaissant la nécessité de faire le ménage en interne, le président d'Airbus commercial aircraft ne s'estime pas concerné par des irrégularités commises loin de Toulouse, sous la responsabilité de la direction d'EADS.

Ce manque d'empressement à épouser la cause de son patron déplaît évidemment à ce dernier. De quoi attiser la méfiance et la rivalité entre les deux hommes, alors que le conseil d'administration d'Airbus, inquiet de la tournure des évènements, commence à étudier sérieusement la question de la succession de Tom Enders.

Le point de non-retour l'été dernier

Le point de non-retour est franchi l'été dernier, avec la décision - gardée secrète - du conseil d'administration de ne pas retenir la candidature de Fabrice Brégier pour succéder à Tom Enders. Une décision justifiée par la nécessité d'écarter tous les haut-responsables du groupe susceptibles d'être liés de près ou de loin aux affaires de corruption ou d'être rattrapées par elle. Mais une décision inacceptable pour Fabrice Brégier, qui estime n'avoir rien à se reprocher et y voit la main de Tom Enders.

Pendant plusieurs mois,  le président d'Airbus commercial aircraft va donc s'efforcer de convaincre le « board » de revenir sur cette décision, en mettant en avant son expérience et son bilan. « Pour la première fois dans son histoire, Airbus est en passe de livrer plus de 700 avions en 2017 », souligne-t-il  dans une interview aux Echos début décembre . En vain. En confirmant sa décision jeudi dernier, le conseil d'administration tranche dans le vif, ne laissant d'autre choix à Fabrice Brégier qu'une démission avec les honneurs.

Inquiétude à Toulouse

Reste désormais pour Tom Enders à tenir son pari de mener à bien son « programme d'éthique et de conformité » au cours des 16 prochains mois, tout en ramenant le calme et la sérénité dans une entreprise chamboulée par la perte de ses repères historiques. Et ce, alors que la préparation de sa succession continuera probablement à susciter rumeurs, convoitises et tensions et que les départs vont s'enchaîner chez Airbus.

Avant la fin de l'hiver, l'avionneur Airbus verra partir à la retraite le légendaire directeur commercial John Leahy, son directeur des programmes Didier Evrard, son directeur industriel Tom Williams, son directeur de l'innovation Charles Champion et quelques autres ayant contribué à la réussite d'Airbus. « On ressent un sentiment de révolte et de l'inquiétude, assure un responsable syndical d'Airbus. On voit partir des industriels compétents et appréciés et on ne voit pas très bien qui va pouvoir les remplacer, même si la compétence de Guillaume Faury est reconnue. Cela s'ajoute à d'autres motifs d'inquiétudes comme l'avenir de l'A380, de l'A400M et notre capacité à suivre la montée en cadence de la production d'A320. On n'avait pas besoin de ça ».

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