
339 euros brut de plus par an par salarié : tel est le supplément de hausse des salaires obtenu par les syndicats d'Air France, à l'issue de 15 jours de grève et six mois de crise de gouvernance, qui auront coûté à la compagnie 335 millions d'euros, ainsi qu'un PDG, un DG et un DRH. Entre la proposition rejetée en mai par 55 % des salariés (2 % en 2018 et 1,65 % en 2019) et l'accord signé ce vendredi par la majorité des organisations syndicales (2 % en 2018 et 2 % en 2019), l'écart de hausse n'est que de 0,35 %, soit une quinzaine de millions d'euros supplémentaires sur une masse salariale d'environ 4,16 milliards, inégalement répartie entre les 44.262 équivalents temps plein d'Air France.
Un surcoût de 166 millions d'euros
Pas de quoi crier victoire pour autant, du côté de la direction d'Air France, même si cet accord constitue un premier succès personnel pour le nouveau patron d'Air France-KLM, Benjamin Smith . Même limitée à 4 %, la hausse générale des salaires alourdira les charges d'Air France d'environ 166 millions d'euros par an. Soit presque l'équivalent de l'objectif de réduction des coûts de 1 % par an d'ici à 2020. Il devait permettre à Air France d'amener progressivement sa rentabilité à un niveau comparable à celui de ses grands concurrents. Et ce dans un contexte de hausse de la facture de carburant qui risque déjà d'amputer sérieusement le résultat d'exploitation, de 588 millions d'euros en 2017.
Désunion syndicale
Pas de quoi non plus crier victoire du côté des syndicats, qui sortent une fois de plus en ordre dispersé du conflit. Les deux principales organisations « réformistes », la CFE-CCG et la CFDT, qui avaient signé un premier accord salarial en février, se retrouvent en porte-à-faux vis-à-vis des salariés et à couteaux tirés avec les autres syndicats à quelques mois des élections professionnelles.
Quant à l'intersyndicale à l'origine des grèves, sur les dix organisations qui la composaient, quatre seulement ont signé l'accord. Le fer de lance du mouvement de grève, le syndicat de pilotes SNPL AF, a préféré réserver sa signature pour un accord global incluant ses revendications catégorielles, dont le montant total devrait dépasser celui de la hausse générale sur les feuilles de paie des pilotes.
Des problèmes structurels intacts
De quoi laisser planer le doute sur un retour durable à la paix sociale et à la croissance chez Air France. Si cet accord a le mérite de permettre de tourner la page d'une des pires crises de l'histoire de la compagnie, il ne règle aucun ses problèmes structurels, que sont un niveau de charges nettement supérieur à ceux de ses concurrents, ainsi que l'absence de stratégie à long terme susceptible d'emporter l'adhésion des salariés.
Il ne contribuera pas non plus à améliorer une rentabilité toujours insuffisante pour pouvoir faire face sans péril à une nouvelle crise économique ou financière. Car si jusqu'à présent, la formidable demande de transport aérien a permis à Air France de remplir ses avions cet été à des niveaux de prix inespérés, lui permettant ainsi de digérer la facture des grèves , une baisse d'un seul point de la recette unitaire coûterait à Air France entre 200 et 300 millions d'euros. Or lors de la crise de 2008, la recette unitaire avait chuté de 15 %.
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