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Projet de fusion Renault - Fiat Chrysler : comment tout a capoté - Le Parisien

La décision de faire avorter le mariage annoncé entre Fiat Chrysler et Renault est-elle définitive ? « Je ne suis pas très optimiste, explique ce jeudi matin une source interne chez Renault. À l’issue de la folle soirée de mercredi à jeudi, en tout cas, la fusion des deux constructeurs semble bel et bien compromise.

Retour sur ce coup de Trafalgar nocturne au siège de Renault, à Boulogne-Billancourt (92). Alors que le Conseil d’administration (CA) du groupe s’était réuni pour la deuxième fois en deux jours autour du président Jean-Dominique Senard, le constructeur italo-américain Fiat Chrysler Automobiles (FCA) a fait savoir qu’il retirait son offre de fusion à 50/50 avec Renault. En cause, explique la direction française de FCA : « Le climat politique français, qui n’est pas propice à la naissance d’un compromis gagnant pour les deux groupes ».

Mais que s’est-il donc passé entre 18 heures et minuit ? « Tout avait bien démarré, explique une source. Sans surprise, l’administrateur CGT avait voté contre. Les deux administrateurs de Nissan souhaitaient s’abstenir et laisser les négociations continuer. Les 14 autres avaient voté pour. À 21 heures, Martin Vial, le représentant de l’Etat demande une interruption pour consulter le ministre (NDLR : Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie). »

À son retour à 22h15, Martin Vial demande un délai de plusieurs jours, « le temps que Bruno Le Maire rencontre son homologue japonais lors d’un voyage à Tokyo et s’assure que tout se passera bien avec l’Alliance ». Jean-Dominique Senard lui fait part de son inquiétude. « En demandant un délai supplémentaire, nous prenons un risque énorme », l’alerte-t-il. La suite lui donne raison. Quelques minutes plus tard, il reçoit un message de John Elkann, le président de FCA. Furieux, il l’informe du retrait de son offre de fusion, du fait du « contexte politique français ».

« La position de l’Etat est cohérente depuis le début »

« Il ne faut pas s’étonner, s’insurge une source interne de Renault. Les négociations allaient bon train. On avait obtenu des garanties sur tout, la gouvernance, l’emploi, les sites de production. Restait Nissan, mais c’était en cours. Et tout à coup, l’Etat change d’avis et demande un délai supplémentaire. Mais il fallait y penser avant. Et ne pas prendre la direction de FCA de court comme ça ! »

De son côté Bercy justifie sa prudence : « La position de l’Etat est cohérente depuis le début, explique-t-on au ministère de l’Économie. Nous étions tout à fait ouverts à une consolidation potentiellement créatrice de valeur, mais avec des conditions fermes. Qu’elle se réalise dans le cadre de l’Alliance [NDLR : avec le constructeur japonais Nissan], que les emplois et les sites soient préservés, et avec une gouvernance respectueuse des intérêts des deux groupes. On ne se lance pas dans une opération d’une telle ampleur, à 30 milliards d’euros de capitalisation et des centaines de milliers d’emplois, sans prendre un peu de temps. FCA n’a malheureusement pas souhaité attendre. »

« Pas anormal que l’Etat français des garanties »

« Il n’était pas anormal que l’Etat français exige fermement des garanties, tempère néanmoins un proche du dossier. Sur la future gouvernance, sur la partie opérationnelle, les emplois et le maintien des sites industriels. » Un avis que partage José Baghdad, associé responsable du secteur automobile au sein du cabinet de conseil PwC : « On a pu maintes fois constater par le passé combien une fusion entre deux géants constitue une utopie, explique cet expert. Souvenons-nous d’Axa et UAP en 1997, de Lafarge et Holcim en 2015, ou encore d’Essilor et Luxottica en 2017. L’un des deux groupes a toujours fini par prendre l’ascendant sur l’autre. Ou alors la fusion a volé en éclats. »

L’exécutif aurait donc eu raison de jouer la prudence ? Si Bercy n’a pas répondu directement à nos sollicitations, le dossier General Electric, et la promesse non-tenue du maintien des emplois en France, et du recrutement de nouveaux postes, pèsent lourd sur le ministère de l’Économie. « Il n’était pas question de se laisser berner une deuxième fois », prévient un proche de Bruno Le Maire.

En attendant, FCA joue très gros dans les années à venir. « La donne a vraiment changé avec la décision prise par l’Union européenne fin 2018 de durcir drastiquement la réglementation concernant les émissions polluantes et de CO2, alerte Flavien Neuvy, économiste et directeur de l’Observatoire Cetelem. Avec notamment pour nouveaux objectifs -37,5 % de CO2 en moins par rapport aux plafonds fixés pour 2021 d’ici à 2 030. Autant dire demain. »

Compte tenu des sous-investissements qu’il a réalisés sur les nouvelles technologies ces dernières années, FCA n’est absolument pas en mesure de rentrer dans les clous de la réglementation européenne en moins de trois ans.

« Un constructeur chinois pourrait être intéressé »

Conséquences : FCA court le risque de devoir dans les années à venir payer des amendes colossales, potentiellement de plusieurs milliards d’euros. Impensable pour un groupe dont la santé financière ne tient essentiellement que par les profits qu’il réalise sur le marché américain grâce à ses deux marques « vaches-à-lait » que sont Chrysler et Jeep.

Autre contrainte : les dizaines de milliards d’euros d’investissement qui seront nécessaires, pour FCA, mais également pour Renault, pour relever les défis qui pèse, à l’échelle mondiale, sur le secteur de l’automobile : la voiture électrique, connectée et autonome. « En Europe, FCA a peut-être abattu ses dernières cartes. PSA et Renault mis de côté, reste un acteur asiatique, analyse un expert du secteur. Beaucoup de constructeurs chinois maîtrisent désormais parfaitement la technologie électrique. Ils pourraient être intéressés par un partenariat, si ce n’est une fusion, avec FCA. »

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