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Avec 0,3 % au troisième trimestre, la croissance de la France fait de la résistance - Le Monde

S’il ne fait toujours pas d’étincelles, le moteur de la croissance tricolore continue de ronronner. Poussivement, certes. Mais à un rythme d’une constance étonnante, à peine sensible aux turbulences de l’environnement extérieur. Au troisième trimestre, le produit intérieur brut (PIB) a progressé de 0,3 %, selon les données publiées mercredi 30 octobre par l’Insee. Un chiffre conforme aux prévisions de la Banque de France et de l’Insee, et égal à celui enregistré, déjà, sur les deux trimestres précédents. « Ce n’est pas époustouflant, mais au regard de la morosité de la conjoncture internationale et des difficultés traversées par certains de nos voisins, la performance française est plutôt réconfortante », analyse Philippe Waechter, chef économiste chez Ostrum AM.

C’est peu dire. Après une légère contraction du PIB entre avril et juin (– 0,1 %), l’Allemagne pourrait tomber en récession technique au troisième trimestre, tirant la croissance moyenne de la zone euro vers le bas, tandis que la stagnation italienne devrait se prolonger. « La résilience de la France tient pour beaucoup à la structure de son économie, moins exposée au commerce international », résume Nadia Gharbi, économiste chez Pictet WM. De fait, les exportations de biens et services pèsent près de 50 % du PIB outre-Rhin, contre 31 % en France, où le principal moteur de la croissance reste, de loin, la demande domestique. Et notamment, la consommation des ménages.

Au troisième trimestre, celle-ci a progressé de 0,3 %, en hausse de 0,1 point par rapport au trimestre précédent. « Elle reste malgré tout en deçà des gains de pouvoir d’achat observés ces derniers mois », observe Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas. Un décalage d’autant plus surprenant qu’il est plus fort que celui observé lors des cycles précédents. En fourmis précautionneuses, les Français gonflent un peu leurs bas de laine, inquiets face aux doutes planant sur l’économie mondiale. « Mais aussi, probablement, face aux incertitudes liées aux réformes des retraites et de l’assurance-chômage », notent les économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), dans leur dernière note de prévision. Le taux d’épargne est ainsi remonté à 14,8 % du revenu disponible brut des ménages au deuxième trimestre 2019 : c’est un peu moins qu’au précédent (15,2 %), mais plus que les 14,2 % enregistrés en 2018.

Décrue du chômage

Le pouvoir d’achat, lui, a certes un peu marqué le pas au deuxième trimestre (– 0,2 %), après la hausse de 0,8 % enregistrée entre janvier et mars. Mais il devrait rebondir d’ici à décembre (notamment grâce à la deuxième vague de réduction de la taxe d’habitation), pour progresser de 2,3 % sur l’ensemble de l’année (contre 1,2 % en 2018), selon l’Insee. Il s’agirait de sa plus forte augmentation depuis 2007, équivalant à 800 euros de hausse par ménage, selon l’OFCE. « Une embellie notable, en partie le fruit de la bonne tenue du marché du travail », note M. Waechter. Sur la première moitié de l’année, 166 000 emplois ont été créés, selon l’Insee, en particulier dans les services (hors intérim) et la construction. Si le rythme devrait ralentir un peu sur la deuxième partie (+ 98 000), le taux de chômage poursuit malgré tout sa décrue : à 8,5 % au printemps, il devrait s’établir à 8,3 % fin 2019, toujours selon l’Insee, tirant les revenus vers le haut.

Ces derniers mois, le pouvoir d’achat a également été soutenu par les mesures prises par le gouvernement, en partie en réponse au mouvement des « gilets jaunes ». Baisse de cotisations salariales, réduction de la taxe d’habitation, hausse de la prime d’activité, défiscalisation des heures supplémentaires… L’OFCE chiffre l’ensemble de ces mesures socio-fiscales à 12 milliards d’euros sur 2019. Revers de la médaille : la France peinera à rentrer dans les clous budgétaires de Bruxelles. Le gouvernement table en effet sur un déficit public de 3,1 % du PIB en 2019 (contre 2,5 % en 2018), supérieur à la barre symbolique des 3 %.

La bonne surprise du troisième trimestre est venue de l’investissement des entreprises, qui continue de progresser à un rythme soutenu : + 1,2 %, après une hausse déjà notable de 0,6 % au premier trimestre et de 1,1 % au second. Les PME profitent des taux bas pour emprunter, notamment pour acheter des services informatiques : en septembre, les crédits à l’investissement ont progressé de 7,3 %, comme en août, selon la Banque de France.

Les exportations, elles, se sont ressaisies (+ 0,3 %), après le trou d’air du deuxième trimestre (– 0,1 %). « Elles restent néanmoins fragilisées par le ralentissement de l’Allemagne, notre premier partenaire commercial », souligne Hélène Baudchon. Comme, de leur coté, les importations ont rebondi de 1,4 %, la contribution du commerce extérieur à la croissance a malgré tout été négative (– 0,4 point), contre 0,5 point pour celle de la demande intérieure (hors stock).

Hausse du pouvoir d’achat

Dans ces conditions, la croissance devrait s’établir à 1,3 % sur l’ensemble de l’année, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et de 1,2 % en 2020. « La France devrait donc afficher une croissance supérieure à la moyenne de la zone euro pour la première fois depuis six ans », souligne l’OFCE. Le PIB de l’union monétaire ne devrait en effet guère progresser de plus de 1,1 % cette année.

L’an prochain, les dépenses d’investissement devraient se tasser, en particulier du côté des entreprises. Surtout si les incertitudes liées au Brexit, dont la date théorique vient d’être reportée au 31 janvier, se prolongent encore – sans parler de celles liées à la guerre commerciale sino-américaine. Les administrations publiques devraient également resserrer les cordons de leurs bourses, comme elles le font toujours après les élections municipales. Selon l’institut Rexecode, leurs dépenses d’investissement devraient en effet ralentir à 1 % en 2020, contre 3,6 % cette année et 2,4 % en 2018.

Si la hausse du pouvoir d’achat devrait également marquer le pas l’année prochaine, elle pourrait en revanche profiter plus largement à la consommation des ménages. Après 1,3 % cette année, celle-ci devrait bondir à 1,7 % en 2020, selon la Banque de France. Plus optimiste encore, Rexecode estime même qu’elle progressera de 1,9 %. Grâce à quoi la croissance française devrait de nouveau dépasser celle de la zone euro de quelques dixièmes de point…

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