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PSA-Fiat Chrysler : une danse du ventre qui a duré des mois - Les Échos

Noms de code : « Stella » pour PSA, « Paris » pour Fiat Chrysler. Les  fiançailles annoncées jeudi au petit matin se tramaient sérieusement en coulisses depuis début octobre. C'est à ce moment-là que les deux groupes, qui se tournaient autour depuis des mois - sinon des années, ont entrevu que la possibilité d'un « deal » commençait à prendre corps concrètement. « Soudain, les planètes se sont alignées », souffle une source au fait des discussions.

Il faudra ensuite encore trois petites semaines pour arriver à cette longue réunion, un dimanche soir en région parisienne, au cours de laquelle Carlos Tavares et John Elkann ont toppé là. Le président du directoire de PSA, et le chef de file de la famille Agnelli, qui détient 29 % du constructeur italo-américain via son holding Exor, ont longuement échangé non seulement sur les derniers détails de la transaction, mais surtout sur leur vision de l'avenir du nouveau géant qu'ils s'apprêtent à créer. Le numéro quatre du secteur avec 8,7 millions de voitures vendues, 170 milliards d'euros de chiffre d'affaires, et 410.000 salariés dans le monde.

Fiancés quasi-parfaits

Il en aura fallu des péripéties et des rebondissements pour en arriver là ! Et des heures de travail pour les banquiers conseil, de Messier Maris & Associés (Mediobanca), Citi et Morgan Stanley côté PSA, D'Angelin & Co et Goldman Sachs côté FCA, avec Lazard et Alain Minc pour épauler John Elkann et les Agnelli, tandis que Zaoui & Co assistait la famille Peugeot.

Car en réalité, l'idée d'un rapprochement entre les deux groupes familiaux ne date pas d'hier. PSA, trop petit et trop européen, a besoin d'un partenaire à la fois pour se diversifier géographiquement et pour accroître ses volumes, afin d'amortir les coûteux investissements nécessaires dans les technologies du futur. FCA de son côté n'a pas réellement investi dans son avenir : ni dans le renouvellement de sa gamme, ni dans son verdissement. Il doit absolument s'allier.  Sur le papier, les fiancés s'accordent parfaitement. Ils se connaissent déjà bien, fort de leur partenariat de longue date dans les utilitaires.

Dès le début de 2019, les deux constructeurs commencent à évoquer un rapprochement plus sérieux, sous le regard bienveillant de l'Etat français qui détient 12 % du groupe au Lion. Carlos Tavares et Mike Manley, le patron opérationnel de FCA,  profitent du salon de Genève en mars pour évoquer le sujet . L'approche se fait plus insistante, les choses deviennent sérieuses. Les équipes s'appuient sur les groupes de travail constitués au cours des mois précédents pour évaluer les synergies potentielles. « Le travail a alors été fait très sérieusement », observe un ancien patron du secteur.

Rebondissements successifs

Pourtant, un beau soir de mai, le scénario d'un grand mariage s'écroule. John Elkann invite à dîner Robert Peugeot, le représentant de la famille, et lui apprend que finalement, c'est  avec Renault qu'il veut convoler . Fort de son alliance avec Nissan et Mitsubishi - et leurs 10 millions de véhicules à eux trois, le Losange constitue à ses yeux un fiancé de meilleure facture.  Carlos Tavares voit rouge . La note qu'il rédige alors, pour expliquer à quel point cette union serait néfaste à Renault, fait le tour de Paris.

Dix jours plus tard, nouveau rebondissement : le projet de  mariage Renault-FCA tourne court , faute d'un accord immédiat et explicite de l'allié Nissan. Chez PSA l'espoir revient. Carlos Tavares tente à nouveau sa chance, notamment au cours de l'été. Mais les discussions n'aboutissent pas. Puis l'éviction brutale de Thierry Bolloré, début octobre, referme la possibilité d'un « deal » de Fiat avec Renault pour plusieurs mois. « Dans l'automobile il y a des fenêtres de tir à ne pas rater lorsque l'on doit renouveler sa gamme. Fiat ne pouvait pas se permettre d'attendre », avance un bon connaisseur du dossier.

Le principe d'une fusion à 50/50 est acté. Les Peugeot se laissent convaincre de voir les Agnelli détenir plus de deux fois plus qu'eux dans le nouvel ensemble : 14,5 % contre un peu plus de 6 %. La gouvernance adoptée (6 des 11 sièges au conseil nommés par PSA - dont Carlos Tavares) les satisfait. « La famille est avant tout attachée à la pérennité du groupe, elle s'est toujours déclarée prête à soutenir une offensive de PSA  », souligne une autre source. « Carlos Tavares sera libre de choisir son comité exécutif. Les Peugeot auront de leur côté un rôle actif au conseil de surveillance, et la possibilité de racheter 2,5 % du capital aux autres actionnaires stables, bpifrance et Dongfeng ». La famille en a les moyens : PSA ne représente « que » 2 des 5 milliards d'euros du holding familial FFP, qui dispose en outre de capacités d'endettement.

Prime de contrôle et chute du cours

Reste la question des valorisations. Le cours de PSA a gagné 45 % depuis le début de l'année : le constructeur tricolore vaut bien plus en Bourse que son futur conjoint (22 milliards d'euros contre 19, juste avant l'annonce). Difficile, dans ces conditions de procéder à une fusion 50/50. D'autant que les actionnaires de FCA ne sont pas contre le versement d'un super dividende, préalable à l'opération… C'est à ce point dur que les négociations se sont heurtées au cours des derniers mois. PSA cède finalement : ses actionnaires paieront une prime de contrôle pour acquérir Fiat Chrysler.

Les deux groupes  procéderont à des distributions à leurs actionnaires avant la fusion , mais celle de FCA (5,5 milliards sous forme de dividende en cash) sera supérieure à celle de PSA (3 milliards environ sous forme de titres Faurecia). « On a même accentué la différence de valorisation et accru la prime à payer, qui atteint environ 30%  ! » relève un analyste financier. Les actionnaires de PSA n'ont d'ailleurs pas très bien réagi : le cours de Bourse du constructeur tricolore a plongé de plus de 12 % le jour de l'annonce, tandis que FCA grimpait de son côté de 9 %. « Le marché a rééquilibré les valorisations, autour de 50/50, c'est normal. L'ensemble a d'ailleurs gagné un peu de valeur », avance un banquier. Le cours de PSA est en outre remonté de près de 3 % vendredi.

Parallèlement aux derniers travaux qui donneront lieu à la rédaction d'un « Memorandum of understanding » dans les prochaines semaines, un autre chantier a été lancé : celui du nom du nouvel ensemble. « Il n'a pas encore été choisi, il devra être neutre », dit un acteur du dossier. De quoi donner encore quelques migraines aux protagonistes du grand mariage annoncé.

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