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Sous le feu des critiques, l'Insee se défend - Les Échos

Publié le 20 févr. 2020 à 7h00

C'est une maison sous pression, presque une citadelle assiégée. Les critiques du travail de l'Insee se font plus nombreuses et plus agressives ces derniers temps. Cela a commencé il y a des années avec la hausse des prix ressentie par les Français lors du passage à l'euro, inférieure à l'inflation calculée par l'Institut. Cela a continué avec la mise en cause de l'indépendance de l'Insee puis les attaques récurrentes sur le taux de chômage et  les différences entre les données de Pôle emploi et les chiffres de l'Insee . Dernière estocade, celle du démographe Emmanuel Todd. Pour cet essayiste à succès, « l'Insee produit des statistiques de prix qui masquent la baisse du niveau de vie », notamment en sous-estimant la hausse des prix de l'immobilier. Et voilà l'Insee, ce repère d'X-Ensae, la fine fleur des statisticiens français, rattrapé par la critique des élites.

Mercredi, signe que l'heure est grave, l'Autorité de la statistique publique a publié un communiqué jugeant que ces « polémiques » visaient à « instiller à partir de jugements à l'emporte-pièce une suspicion générale sans fondement quant à l'objectivité, la qualité et l'indépendance des statistiques publiques ». « Ma crainte, c'est que la coupure entre les experts et la population, entretenue sur les réseaux sociaux, s'étende à la statistique publique », estime Jean-Luc Tavernier, le directeur général de l'Insee.

Un blog explicatif

Parallèlement, pour répondre aux critiques sans que cela tourne à la foire d'empoigne sur les réseaux sociaux, l'Insee a ouvert  un blog où ses économistes expliquent la fabrique des statistiques. Ainsi, les chiffres de l'Insee montrent que  le niveau de vie des Français est sous pression depuis 2007 . « Dix ans de stagnation du pouvoir d'achat, de 2007 à 2017, créent nécessairement des frustrations », explique le numéro un de l'Insee. Ensuite, « les ménages ont tendance à ressentir plus fortement les hausses de prix que les baisses et se basent plus sur les achats récurrents », explique Marie Leclair, chef de la division des prix à la consommation de l'Insee. On achète une voiture tous les cinq ans mais du carburant toutes les semaines.

Quant à l'immobilier, il est vrai qu'il ne pèse que 6 % dans l'indice des prix à la consommation alors qu'en 2015, les Français dépensaient près de 20 % de leurs revenus pour se loger. Mais il y a une raison : contrairement à un litre de lait ou d'essence, destiné à être consommés, une maison ou un appartement existera pendant des décennies. « L'achat d'un bien immobilier ne donne pas lieu au processus de destruction qu'entraîne la consommation. Il s'agit d'un patrimoine et non pas d'une consommation », explique Marie Leclair. Une telle dépense ne rentre donc pas dans le calcul de l'indice des prix à la consommation. Seuls les intérêts payés sur l'emprunt immobilier en font partie. De même, les propriétaires de leur logement ne paient par définition ni loyer ni mensualité à leur banque si leur emprunt est déjà remboursé. Ce qui, là encore, amoindrit le poids de l'immobilier dans le calcul de l'inflation.

La moyenne cache des disparités

Le problème, c'est que l'indice des prix à la consommation n'est pas vraiment un indice du coût de la vie mais du prix des biens et des services que les Français consomment en moyenne. « C'est un indice qui sert uniquement à mesurer rapidement l'inflation. Il ne sert pas à décrire la situation économique et sociale de chaque Français quotidiennement », souligne Xavier Timbeau, économiste à l'OFCE. Et la moyenne cache des disparités, en fonction des niveaux de vie, de l'utilisation de la voiture, du contrat de travail, du statut de locataire ou propriétaire… Difficile voire impossible de résumer en un seul chiffre ce que vivent 67 millions de Français.

C'est le même problème avec le taux de chômage, critiqué par Marine Le Pen par exemple. Il ne dit pas tout de l'état du marché du travail. Le taux d'activité des personnes en âge de travailler, le nombre de temps partiels contraints, de CDD et d'intérimaires permettent de mieux appréhender la réalité. Mais ces chiffres existent. Comme le dit Jean-Luc Tavernier,« les gens nous accusent de ne pas rendre compte de la complexité du monde. Mais nous mettons à disposition en accès libre une masse d'information importante en nous intéressant aux évolutions des conditions de vie des ménages selon leur revenu ou leur situation professionnelle et familiale ». Certaines questions peuvent être légitimes et rien n'interdit à la statistique d'évoluer. Le préalable, c'est toutefois d'aller plus loin qu'un simple chiffre.

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