
Choc, dégoût, honte, fatalisme. Comme après un séisme, la Suisse a commencé, lundi 20 mars, à mesurer l’étendue des dégâts, au lendemain de la catastrophe qui s’est abattue sur la Paradeplatz de Zurich, centre du pouvoir financier helvétique, dont la légendaire stabilité est désormais à ranger au rayon des accessoires. Au petit matin, un plaisantin a déposé une couronne et une bougie devant le siège de la banque terrassée Credit Suisse. Un hommage rapidement escamoté par un vigile.
La disparition de l’établissement – racheté par son rival UBS pour 3 milliards de francs suisses, soit autant d’euros – ne laisse plus qu’une seule grande banque dans le paysage ravagé de la place financière suisse. Il y en avait encore trois en 1997. D’aucuns ressortent les vieilles icônes qui ont longtemps servi de ciment identitaire dans la psyché collective nationale. Tel le mythique bonnet de ski bleu ciel et rouge, siglé « Credit Suisse », arboré sur les pistes par une génération d’Helvètes dans les années 1970, quand la banque, dans la dernière ligne droite des « trente glorieuses », alimentait le miracle national à coups de crédits aux PME.
Lundi, les vieux bonnets effilochés en vente sur les sites d’enchères valaient bien davantage qu’une action Credit Suisse, dont le cours a encore chuté de près de 56 %, à 82 centimes. Fini la banque légendaire fondée par l’homme politique et entrepreneur zurichois Alfred Escher au mitan du XIXe siècle (sa statue trône devant la gare de Zurich), qui eut l’idée de creuser des trous sous les Alpes pour sortir la Suisse de son isolement.
Bonus maintenus
Epopée ferroviaire, entrée dans le monde : à l’époque, la banque servait à financer l’économie, à tramer le tissu industriel. Elle a participé à l’édification de la Suisse moderne, transformé une terre de paysans et de montagnards en une nation industrielle, et bientôt un paradis bancaire, parmi les plus riches du monde, sans une goutte de pétrole ni aucune matière première sur son territoire.
Pourtant, selon l’historien zurichois de la finance Tobias Straumann, le revers retentissant essuyé par la maison Credit Suisse n’est pas à proprement parler un traumatisme. « Le choc initial a eu lieu en 2008, avec le sauvetage d’UBS par l’Etat, puis avec l’abandon, à partir de 2009, du secret bancaire, sous la pression américaine. C’est sur ce pilier, et sur les malheurs des autres – les deux guerres mondiales, suivies de la guerre froide –, que la Suisse avait bâti une place financière aux allures de forteresse, totalement surdimensionnée par rapport à la taille du pays. Or, ce système est en voie de normalisation accélérée depuis quinze ans. L’élite zurichoise ne le voit pas, ou plutôt refuse de l’admettre, mais elle joue déjà en deuxième division comparée à des places comme Londres. »
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