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Carburants : la possibilité de vente à perte sera effective à partir de « début décembre », déclare Bruno Le Maire - Le Monde

La possibilité pour les distributeurs de vendre à perte du carburant de manière temporaire, promise par Elisabeth Borne, sera « effecti[ve] à partir de début décembre » et « durera six mois », en tout cas selon la proposition qui sera faite par le gouvernement aux parlementaires, a annoncé Bruno Le Maire, lundi 18 septembre. « J’espère le 1er décembre, puisque le texte de loi sera examiné à l’Assemblée début octobre », a-t-il affirmé sur France 2.

Sa précision arrive après l’annonce d’une telle possibilité samedi par la première ministre, dans un entretien au Parisien. Alors que la vente à perte est interdite par la loi depuis 1963, le gouvernement souhaite l’autoriser temporairement afin d’aider les Français à faire face à l’inflation qui perdure et se traduit par des prix du carburant qui remontent dans les stations-service.

Une présentation du dispositif à la fin de septembre

« Avec cette mesure inédite, nous aurons des résultats tangibles pour les Français, sans subventionner le carburant », a promis samedi Mme Borne, assurant qu’ainsi « chacun prend sa part ». « Il est normal de mettre à contribution les gros industriels », a-t-elle affirmé, tout en rappelant que « la responsabilité de l’Etat, c’est aussi de baisser son déficit et sa dette ».

« Notre méthode, c’est d’engager tout le monde, l’ensemble des acteurs économiques, dans cette lutte contre l’inflation », a précisé Bruno Le Maire lundi, car « l’Etat ne peut pas porter à lui seul le coût de l’inflation, sinon ça va creuser les déficits ».

Le dispositif sera présenté en conseil des ministres, mercredi 27 septembre, a précisé le cabinet du porte-parole du gouvernement, Olivier Véran. Il s’inscrira dans le cadre du projet de loi sur les renégociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs industriels. Le délai d’entrée en vigueur du dispositif fixé lundi par Bruno Le Maire s’explique par « le temps [que le texte] soit adopté » par l’Assemblée nationale et le Sénat.

Pour les particuliers, une telle opération commerciale pourrait représenter une économie d’« un demi-euro » par litre, a ainsi estimé M. Véran, interrogé sur RTL dimanche.

Une hausse des prix de 8 % sur deux mois

Le gouvernement ne cesse de rappeler les causes extérieures de cette hausse qui fait mal au porte-monnaie des Français. Au relevé du vendredi 8 septembre, le litre de sans-plomb 95 s’affichait à 1,96 euro en moyenne, en hausse de 8 % sur deux mois ; et celui de diesel, à 1,88 euro (+ 13 %).

Pour éviter un retour du litre de carburant à 2 euros, de nombreux distributeurs ont procédé ces derniers mois à des opérations de vente de carburant à prix coûtant. La plupart s’étaient engagés la semaine dernière à les poursuivre jusqu’à la fin de l’année alors qu’ils étaient convoqués par la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher.

S’il a exclu une ristourne générale à la pompe, comme il l’avait fait en 2022, le gouvernement ne cesse depuis des semaines de multiplier les annonces et les appels à la « solidarité » des distributeurs et des fournisseurs, afin de leur faire prolonger ce type d’opération.

La semaine dernière, TotalEnergies, qui gère le tiers des près de 11 000 stations-service en France, a ainsi répondu présent en annonçant prolonger le plafonnement du prix de l’essence à 1,99 euro par litre dans ses stations, au-delà de la fin de l’année 2023.

Critiques des indépendants et des oppositions

La mesure annoncée par le gouvernement ne fait pas l’unanimité du côté des indépendants et des oppositions politiques. Francis Pousse, président de la branche des stations-service et des énergies nouvelles du syndicat professionnel Mobilians, qui représentant 5 800 stations-service, hors grandes surfaces, a fait part de son indignation auprès de l’Agence France-Presse : « Mes adhérents vivent à 40, 50 %, voire plus, de la vente du carburant, donc s’ils vendent à perte je leur donne trois mois [pour mettre la clé sous la porte]. »

Il s’est aussi dit « sceptique » sur l’effet bénéfique de cette mesure sur le pouvoir d’achat des Français, face à la hausse des prix de l’alimentaire qui pèse selon lui davantage sur leur porte-monnaie.

Le Rassemblement national est défavorable à la mesure, selon le vice-président du groupe à l’Assemblée, Sébastien Chenu, interrogé lundi matin sur Public Sénat. « Cette mesure va emmener deux choses : les grands groupes vont s’en mettre plein les poches et les stations essence indépendantes vont fermer », « c’est du baratin », a-t-il déclaré, ajoutant que « le problème, ce sont les marges que font les grands groupes et ce sont les taxes [sur le carburant] ». « Nous, on souhaite une baisse des taxes », a-t-il rappelé.

Pour La France insoumise également, cette mesure est une « plaisanterie », a grincé M. Bompard dimanche sur France 3. Elle bénéficie, selon lui, davantage aux distributeurs qu’aux ménages. Il a défendu plutôt un blocage des prix, à « à peu près 1,50 euro » le litre. Pour le député « insoumis » et président de la commission des finances, Eric Coquerel, la mesure causera « un dérèglement qui avantage la grande distribution ».

La vente à perte « peut répondre à un enjeu de très court terme. (…) L’un des inconvénients, c’est qu’il n’y a pas de ciblage » des ménages, a réagi lundi Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, sur Franceinfo.

Si la mesure est votée par le Parlement, la question sera de connaître le nombre de stations-service qui l’utiliseront, et dans quel mesure l’écart se creusera entre les stations indépendantes et les grandes surfaces. Ces dernières ont davantage les moyens d’abaisser les coûts. Surtout, elles utilisent l’essence comme un produit d’appels, afin d’attirer les clients.

Le Monde avec AFP

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