C’est une première : un vol transatlantique s’opère en étant intégralement propulsé aux carburants dits durables, ce mardi 28 novembre 2023. Mais des organisations écologistes qualifient l’opération de « greenwashing » (« verdissement de façade »). Trois questions sur le sujet.
1. En quoi est-ce une première mondiale ?
L’avion, qui a décollé de l’aéroport londonien d’Heathrow peu avant 13 h (heure de Paris), est le premier vol « fonctionnant 100 % aux carburants dits durables sur les deux moteurs, par une compagnie aérienne commerciale, sur un trajet long courrier », a indiqué la compagnie aérienne britannique Virgin Atlantic, dans un communiqué, rapporte l’AFP. L’avion doit arriver à l’aéroport de JFK à New York à 20 h 30 (heure de Paris). Il ne transporte toutefois pas de passagers ayant payé un billet, mais le fondateur de la compagnie, le milliardaire britannique Richard Branson, et des membres de son équipe.
Le ministre des Transports Mark Harper, a qualifié ce vol d’« historique », car, selon lui, il « montre comment nous pouvons à la fois décarboner les transports et permettre aux passagers de continuer à voler quand et où ils le souhaitent ». Le gouvernement britannique avait annoncé en décembre dernier soutenir « jusqu’à 1 million de livres » ce projet mené en collaboration avec l’université de Sheffield, l’avionneur américain Boeing, le motoriste britannique Rolls-Royce ou encore le géant des hydrocarbures BP.
2. De quels carburants « durables » s’agit-il ?
Produits à partir d’huiles usagées, résidus de bois ou algues, les carburants durables d’aviation (CDA) sont utilisables en complément du kérosène (jusqu’à 50 %) dans les avions actuels. Ils sont considérés comme le principal levier de décarbonation du secteur pour les décennies à venir, mais leur production reste balbutiante et très chère, rappelle l’AFP.
Le vol a lieu sur un Boeing 787 équipé de moteurs Rolls-Royce fonctionnant uniquement avec ce carburant.
3. Pourquoi les écologistes dénoncent-ils du « greenwashing » ?
Bien que les carburants durables d’aviation ne soient pas issus de l’extraction des hydrocarbures, comme le kérosène, ils sont tout de même utilisés dans des moteurs à combustion qui continuent de générer du CO2. Ainsi, la décarbonation intervient en amont, dans le fait de réutiliser des matières végétales, souligne l’AFP.
L’association écologiste Stay Grounded (« restez au sol ») a qualifié l’opération de « verdissement de façade », dans un communiqué lundi, estimant que « les substituts ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan des hydrocarbures ». Finlay Asher, un ingénieur aérospatial qui a travaillé pour Rolls Royce, cité par Stay Grounded, explique que la technologie des CDA, appelés en anglais les SAF, est une « impasse technologique » car elle ne peut être développée à une échelle suffisante pour faire une différence, relaye l’AFP.
« Les déchets utilisés comme matière première pour le bio-kérosène de ce vol ne sont pas disponibles en quantités suffisamment importantes pour avoir un impact significatif sur les émissions de l’aviation », a abondé l’AFP le Dr Doug Parr, scientifique chez Greenpeace UK. « De plus, le CO2 provenant de la capture directe de l’air et l’hydrogène vert produit par électrolyse – tous deux utilisés pour fabriquer de l’e-kérosène – sont très coûteux à produire. […] La seule manière efficace de traiter les émissions de l’aviation à court terme est de s’attaquer à la demande, et toute suggestion contraire relève simplement de l’utopie », a-t-il ajouté.
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