
C'est une promesse de l'exécutif. En 2020, la Sécurité sociale reviendra à l'équilibre. Il y aura du sang et des larmes pour 2018, avec plus de 4 milliards d'économies par rapport à la croissance tendancielle des dépenses d'assurance-maladie, et d'autres réductions de coûts actuellement en discussion.
A la Cour des comptes, on s'impatiente. Le rapport annuel sur le financement de la Sécurité sociale , publié ce mercredi matin, regrette le décalage d'un an de l'objectif de retour à l'équilibre, qui était auparavant fixé à 2019.
Tours de passe-passe comptables
Pour la vénérable institution, il est urgent de s'attaquer aux maux de la branche maladie, dont le déficit pourrait encore déraper en 2017 . «Après plus d'un quart de siècle de déficits continus - une génération entière -, le retour à l'équilibre de l'assurance maladie constitue une priorité majeure », écrit-elle.
Or ces dernières années, la construction de l'objectif national de dépenses (Ondam) a manqué de sincérité : en neutralisant les tours de passe-passe comptables, il aurait dû être présenté à 2,2% en 2016 au lieu du 1,8% annoncé, et devrait être affiché à 2,4% au lieu de 2,1% en 2017. Le nouveau gouvernement, qui a promis un budget «sincère », va devoir solder ces dérapages.
Il devra également ruser pour redresser la Sécurité sociale, s'il se tient à la promesse de campagne d'un Ondam moyen de 2,3% durant le quinquennat. « Si le taux de progression était relevé à 2,3% en 2018, le solde de l'assurance-maladie se dégraderait de 1,7 milliard d'euros en 2020 toutes choses égales par ailleurs », souligne la Cour.
Quand la vieillesse finance la maladie
Dans son rapport, elle rappelle que le déficit de la Sécurité sociale perdure depuis 2002, et que cela est dû à la progression des dépenses, qui n'ont cessé d'être supérieures à la croissance du PIB que depuis 2015. Pour limiter la casse, les prélèvements ont augmenté (37 milliards de plus en 2000-2016); l'Etat a plus que compensé les allégements de charges - ce qui devrait cesser lorsque la « Sécu » reviendra à l'équilibre, avance la Cour ; et des transferts malsains se sont mis en place entre les branches de la Sécurité sociale.
L'assurance-maladie en a été la principale bénéficiaire, au détriment de la branche vieillesse. Clou du spectacle : la création en 2017 du fonds de financement de l'innovation pharmaceutique avec 876 millions d'euros prélevés sur les réserves du Fonds de solidarité vieillesse - la Cour demande sa suppression pure et simple.
Ces transferts «expliquent la quasi-totalité de l'amélioration du solde de l'assurance-maladie de 2014 à 2017 », explique la Cour. Encore plus étonnant : «Elle a reçu en pratique l'équivalent de 65% des hausses de cotisations vieillesse intervenues dans le cadre de la réforme des retraites de 2014. » Ce sont les négociateurs de l'assurance-vieillesse qui vont être contents de l'apprendre... En somme, le chantier de l'assurance-maladie reste à ouvrir, afin que ses dépenses deviennent soutenables.
Des pensions de retraite en accélération
Par ailleurs, en dépit de son récent retour à l'équilibre, la branche vieillesse n'est pas encore tirée d'affaire, comme l'a montré le Conseil d'orientation des retraites dans son rapport de juin. La Cour souligne que, selon le COR, «l'augmentation des pensions de retraite va s'accélérer à partir de 2018 (+2,1% en volume, contre 1,7% en 2017) », ce qui n'a pas été anticipé par le législateur.
Enfin, même si la Sécurité sociale revient à l'équilibre, il restera une lourde dette à apurer : 151,1 milliards fin 2016. Certes, elle a commencé à décroître, mais la Cour s'inquiète du fait que 25 milliards d'euros de dettes à court terme sont encore stockés à l'Acoss (la «banque » de la Sécurité sociale) au lieu d'être placés par la Cades (Caisse d'amortissement de la dette sociale), qui bénéficie de bonnes conditions financières et peut mieux se protéger contre une subite remontée des taux.
Récupérer 12 milliards d'euros pour la maladie
Faute de pouvoir accumuler des excédents pour éteindre cette dette, il faudrait transférer les déficits à court terme à la Cades. « L'amortissement à fin 2024 des seules dettes maladie portées par l'Acoss fin 2017 nécessiterait de relever de 0,5% à 0,65% le taux de la CRDS dès 2018 », prévient la Cour. Quant aux dettes de l'assurance-vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse, la Cour propose de les amortir sur les réserves libres d'affectation du FRR, le Fonds de réserve des retraites, qui dispose toujours d'un trésor de guerre avoisinant les 30 milliards d'euros.
Alors que la croissance repart, la Cour préconise une «approche structurelle » pour éviter tout relâchement des efforts d'économie. Cela passe par l'interdiction du portage par l'Acoss de tout déficit d'origine structurelle. Outre la révision des missions du FRR, qui servirait de béquille à la branche vieillesse, elle propose également de profiter de l'extinction programmée de la Cades, en 2024, pour récupérer les 12 milliards de recettes annuelles qui lui sont attribuées et les affecter au lissage des variations conjoncturelles des recettes d'assurance-maladie.
https://www.lesechos.fr/economie-france/social/030583187625-deficit-de-la-securite-sociale-la-cour-des-comptes-simpatiente-2115715.phpBagikan Berita Ini
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