
Atos pourrait mettre la main sur un géant de la carte à puce. La SSII française a en effet lancé une offre publique d'achat (OPA) à 4,3 milliards d'euros sur Gemalto . Une opération rendue publique lundi soir.
Mais qui est Gemalto, ce géant aujourd'hui présent dans 48 pays et qui emploie près de 15.000 salariés à travers le monde ? Retour sur une des grandes « succes stories » françaises dans le secteur des nouvelles technologies.
Le groupe voit le jour en 2005 de la fusion entre le français Gemplus (une société qui a ses quartiers près de Marseille fondée par des anciens salariés de Thomson) et le néerlandais Axalto (une filiale du groupe parapétrolier Schlumberger) dans un contexte de consolidation sur le marché mondial de la carte à puce.
De ce rapprochement naît le « leader mondial de la sécurité numérique », d'après les mots d'Alex Mandl, alors PDG de Gemplus. De droit néerlandais mais coté à la Bourse de Paris, Gemalto pèse alors près de 1,7 milliard d'euros de chiffre d'affaires annuel et compte 11.000 salariés à travers le monde. Un géant comparé à ses concurrents telles que les sociétés tricolores Safran et Oberthur ou l'allemand Gieseke & Devriendt.
Atos lance une OPA à 4,3 milliards sur Gemalto
Dépendant de son activité de carte pour téléphonie mobile
Mais les premiers pas du nouvel ensemble ne sont pas des plus simples. Les prix des cartes à puce sont sur une tendance baissière, sous l'effet de la concurrence des acteurs du marché, et le groupe voit son chiffre d'affaires et sa rentabilité s'effriter très rapidement.
Mi-2007, Gemalto annonce qu'il se sépare 12 % de ses effectifs et ferme son usine située à Orléans. Très dépendant de son activité de carte pour téléphonie mobile, Gemalto tire profit, dès l'année qui suit, de meilleures conditions de marché et rebondit.
Les cartes à puce, encore et toujours
Pour se diversifier, il lance, fin 2008, une OPA surprise sur son compatriote Wavecom, spécialisé dans les technologies embarquées. Mais Gemalto sera contraint de renoncer, après une surenchère du canadien Sierra Wireless auquel Wavecom a fait appel pour lui échapper.
Malgré ce revers, le plan de Gemalto à l'orée des années 2010 est clair : le groupe compte sur le déploiement des réseaux de troisième et quatrième générations qui devraient tirer la croissance des cartes SIM pour terminaux mobiles. En 2010, le groupe équipe ainsi le Kindle d'Amazon et l'iPad d'Apple.
Il se renforce aussi sur le créneau du « machine to machine » (ou « M2M ») avec le rachat, pour 163 millions d'euros de l'allemand Cinterion, - qui fournit des terminaux permettant aux machines (ascenseurs, compteurs électriques...) de communiquer entre elles -, au milieu de l'année 2010.
Pic boursier durant l'été 2013
A la fin de son exercice 2011, Gemalto franchit, pour la première fois, la barre des 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires. En cinq ans, son résultat opérationnel a grimpé de 400 %, à 256 millions d'euros.
En avril 2012, un autre cap symbolique est atteint : le groupe pèse 5 milliards d'euros de capitalisation en Bourse, devant STMicroelectronics (4,1 milliards) et Alcatel-Lucent (2,8 milliards).
« Nous étions quelque peu sous-estimés jusqu'à présent. Cela commence à changer » se félicite alors Olivier Piou, le directeur général. Son activité historique explique sa grande forme.
D'une part, Gemalto bénéficie de la migration de plusieurs pays (Brésil, Inde et les Etats-Unis qui s'ouvrent alors à cette technologie...) au standard de la carte de paiement à puce, alors qu'ils étaient jusqu'alors des adeptes de la carte magnétique. d'autre part, l'explosion du marché des smartphones lui permet de vendre des cartes SIM à plus forte valeur ajoutée et sur lesquelles il génère plus de marge.
Le 24 décembre 2012, Gemalto fait son entrée dans le CAC 40. Un joli cadeau de Noël et une consécration pour le groupe qui est dans ses belles années. A la fin de l'été 2013, il tutoie ses sommets en Bourse, à 7,66 milliards d'euros de capitalisation.
Le bad buzz de 2015
Un an plus tard, le groupe réalise le plus gros rachat de son histoire avec l'acquisition du français SafeNet (axé sur la protection des données et des logiciels), moyennant 890 millions de dollars.
« Ils sont comme nous : ils ne se mettent pas sur le devant de la scène, préfèrent agir dans l'ombre, et ils progressent très vite. C'est notre plus gros coup depuis la fusion », souligne alors Olivier Piou.
Mais les vents deviennent contraires. Début 2015, Gemalto subit un gros « bad buzz ». S'appuyant sur des documents dévoilés par Edward Snowden, le site The Intercept avance que la NSA et l'agence de surveillance britannique auraient piraté, en 2010 et en 2011 , des quantités industrielles de cartes SIM « made in Gemalto », qui équipent les smartphones.
Gemalto réagit en donnant sa version des faits, tente de rassurer les marchés et fait le dos rond. Mais son image ne sort pas complètement intacte de cette affaire. La mauvaise dynamique est enclenchée.
En mars 2015, la société est éjectée du CAC 40, remplacée par le revenant Peugeot. L'idylle avec les marchés est terminée. Quelques mois plus tard, son action s'effondre en Bourse après l'annonce de résultats semestriels qui déçoivent. En cause : la marge brute a reculé dans ses activités mobiles historiques qui ne représentent plus que 44 % de ses revenus.
« C'est le résultat de la transformation structurelle de l'entreprise et de sa diversification opérées depuis plusieurs années. Cela fait cinq ans qu'on dit que le marché de la carte SIM va ralentir », justifie alors Olivier Piou qui va quitter le groupe en avril 2016, alors que celui-ci vient de franchir les 3 milliards d'euros de revenus sur l'exercice 2015.
« La boîte va bien et moi aussi [...] Mais Gemalto n'est pas Olivier Piou, et vice-versa », glisse-t-il en guise d'adieu. Quelques mois plus tard, la société subit une nouvelle dégringolade boursière en revoyant en très forte baisse ses objectifs. Tout particulièrement sa rentabilité. En cause : le marché des cartes SIM qui ralentit plus vite qu'attendu, tandis que le paiement mobile peine à décoller.
Des « profit warnings » qui se succèdent
Lors des mois qui suivent, le groupe met l'accent sur les passeports sécurisés et les puces pour objets connectés. Des relais de croissance qui fonctionnent à plein régime. Mais cela ne suffit pas à compenser le déclin de la SIM qui s'accélère dangereusement, tandis que Gemalto traverse aussi un trou d'air sur le secteur de la carte bancaire.
Résultat, les « profit warnings » se succèdent : le groupe a publié quatre avertissements sur résultats en moins d'un an...
Fin novembre, Gemalto a aussi annoncé qu'il allait se séparer de 10 % de ses effectifs en France (288 postes). En Bourse, le groupe n'a pas échappé à la sanction ces derniers mois. Depuis son pic historique atteint il y a quatre ans, sa capitalisation s'est affaissée de plus de 60 %, à moins de 3 milliards d'euros avant que l'OPA ne soit annoncée ce lundi soir et fasse bondir le titre de plus de 30 % ce mardi en fin de matinée.
https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/0301012631422-gemalto-lancien-roi-de-la-carte-a-puce-convoite-par-atos-2137729.phpBagikan Berita Ini
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