
DIFFÉRENCES - Un rapport publié le 30 janvier par la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques sur les niveaux d'indemnité dans le cadre de la rupture conventionnelle individuelle (RCI) laisse voir de fortes inégalités en fonction de la catégorie socio-professionnelle du salarié concerné.
Antoine Rondel
La place prise dans l'actualité sociale par les ruptures conventionnelles collectives ne doit pas faire oublier la bonne santé que connaissent leurs grandes soeurs, les ruptures conventionnelles individuelles. Un dispositif qui permet à un salarié et son employeur de rompre le contrat de travail qui les lie sans avoir recours au licenciement économique, tout en permettant à l'employé de toucher une indemnité de départ et d'avoir droit aux allocations chômage. Un rapport de la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques), publié le 30 janvier 2018, montre de quoi dépendent les niveaux d'ancienneté.
Une prime au statut et à la qualification
Les cadres, champions de l'indemnité de rupture ? "Quel que soit le niveau de salaire, l'indemnité reçue est, pour eux, très supérieure à l'indemnité légale", souligne la Dares, dont l'étude souligne que le niveau de salaire, et plus encore la catégorie socio-professionnelle, sont déterminants au moment de négocier le montant avec lequel partent ces salariés.
Pour les cadres qui sont payés moins de 2950 euros bruts, l'indemnité de départ correspond ainsi à 0,29 mois de salaire par année d'ancienneté, là où le minimum légal se situe à 0,2. Cet écart s'accroît en même temps que le salaire augmente, puisque l'indemnité de rupture passe à 0,33 mois de salaire par année d'ancienneté pour un salarié rémunéré entre 3650 et 4850 euros. L'évolution frise l'exponentiel pour les très hauts salaires, avec une indemnité de 0,6 mois pour la moitié des salariés rémunérés plus de 8600 euros brut.
Les cadres bénéficient là de conventions collectives mieux négociées à leur échelle, mais aussi d'un "plus grand pouvoir de négociation". Plus proches, de par leurs fonctions et leurs missions, des instances de décision de l'entreprise, les cadres ont une meilleure connaissance de ce type de procédures, mais aussi du code du travail. Un atout pour mieux négocier ses indemnités, note encore l'étude, pour expliquer cet avantage.
Les non-cadres, plus nombreux mais moins indemnisés
Pour les salariés moins qualifiés et moins payés, le tableau est nettement moins emballant. S'ils sont plus nombreux à recourir à la rupture conventionnelle individuelle, avec 75% des cas pour des salaires inférieurs à 2520 euros bruts, ils n'en tirent pas le même bénéfice que les cadres. Pour cette catégorie-là, le niveau d'indemnité médiane (50% au-dessus, 50% en-dessous, ndlr) ne dépassera pas supérieure de plus de 5% à l'indemnité légale. Et encore cela vaut-il seulement pour les plus anciens d'entre eux, puisqu'à moins de 10 ans d'ancienneté, l'indemnité médiane d'un employé ou ouvrier payé moins de 2950 euros brut ne dépassera pas l'indemnité légale.
Par quoi cela s'explique-t-il ? La Dares avance trois explications. D'abord celle d'un double déficit : d'information et de tentative de négociation. Un tiers des ouvriers s'étaient par exemple renseignés sur l'indemnité de départ auquel ils auraient droit. Et seuls 15,9% des employés avaient tenté de négocier leur indemnité. Ensuite, parce que ces catégories sont davantage à l'initiative de la rupture conventionnelle que les cadres (ce qui la rapproche de la démission) et sont donc moins à même de négocier leur indemnité. Enfin, parce que ces même salariés, craignant d'avoir des difficultés à retrouver du travail dans un contexte de recherche tendu, préfèrent éviter de toucher une indemnité supérieure au minimum légal, qui induit une carence pour toucher les indemnités chômage.
Les RCI ont toujours le vent en poupe
C'est peu dire que le dispositif connait un certain succès. Entre août 2008 et 2012, plus d'un million de ruptures conventionnelles individuelles ont été homologuées par le ministère du Travail. Quelques années plus tard, selon les statistiques de la Dares, il s'en est signé 421.000 en 2017, un chiffre en hausse par rapport à 2016 (7,8%), elle-même supérieure à 2015 (8,4%). Des chiffres qui faisaient de la rupture conventionnelle individuelle la cause de 14% des fins de CDI en 2015. De quoi faire dire à Emmanuel Macron que le dispositif, qui évite au salarié de démissionner, avait largement escamoté les chiffres des démissions en France. A tort : en effet, selon les derniers chiffres disponibles sur les démissions, les salariés qui franchissent le pas étaient en effet un million (dont 210.000 inscriptions à Pôle emploi) en 2016, selon l'Unedic.
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