
La dernière loi de finances a entraîné de profonds changements dans la fiscalité du capital , avec notamment l'instauration d'une « flat tax » de 30 % sur les revenus mobiliers et la suppression de l'ISF . Mais il faudrait une réforme bien plus ambitieuse pour réorienter durablement l'épargne des Français , estime le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) dans un rapport publié ce jeudi matin.
Cette instance dépendant de la Cour des comptes, et composée d'une quinzaine d'experts en finances publiques, a passé au crible les prélèvements pesant sur le capital des ménages. Un ensemble de 80 milliards d'euros qui comprend aussi bien l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, que la taxe foncière, les droits de mutation lors d'un achat immobilier ou les droits de succession et de donation.
Taxe foncière, prélèvements sociaux
Premier constat : leur poids est bien plus lourd qu'en moyenne dans l'Union européenne (UE). Ces prélèvements s'élèvent à 4,3 % du PIB sur le stock de capital (2,8 % en moyenne dans l'UE) et à 1,8 % du PIB sur les revenus du patrimoine (1,1 % pour l'UE). Sur les dix dernières années, leur croissance a été plus rapide que le reste des prélèvements obligatoires.
Cela tient à la forte hausse de la taxe foncière, en hausse de 82 % de 2006 à 2016, mais aussi à la hausse des prélèvements sociaux (+48 %). Dans une moindre mesure, le dynamisme des donations et des successions ont pu stimuler les recettes.
Imposition « complexe et peu lisible »
Outre le poids de ces impôts, le Conseil des prélèvements obligatoires dénonce « des modalités d'imposition complexes et peu lisibles » pour une fiscalité qui vise plusieurs objectifs sans toujours les atteindre. « Aux objectifs traditionnels d'équité et de rendement se sont ajoutés d'autres objectifs tels que l'incitation au financement des entreprises, la protection de l'épargne populaire, l'aide à l'accession à la propriété, le soutien à l'investissement locatif, l'attraction des capitaux étrangers ou encore la transmission familiale des entreprises », souligne ce rapport.
Au final, cette fiscalité aboutit surtout à diriger l'épargne des ménages sur les placements les moins risqués. Près de 1.600 milliards d'encours sont concentrés sur l'assurance-vie, 420 milliards sur les livrets réglementés .
Ancienneté des versements
D'où la proposition du CPO de supprimer les régimes dérogatoires pour « favoriser une plus grande neutralité fiscale ». Cette neutralité a progressé dans la dernière loi de finances, avec la mise en place du prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les revenus du capital qui rapproche la fiscalité sur les actions de celle des autres placements. En outre, cette « flat tax » s'appliquera à des placements qui jusqu'ici étaient peu imposés : PEL et assurance-vie, du moins pour les encours supérieurs à 150.000 euros .
Le Conseil des prélèvements obligatoires considère qu'il faudrait aller plus loin, en renonçant à ce seuil de 150.000 euros concédé à l'assurance-vie. Le rapport propose par ailleurs que les avantages fiscaux dépendent de l'ancienneté des versements et non de la date d'ouverture du contrat. Un moyen d'éviter qu'un épargnant ouvre un produit d'épargne sans l'utiliser activement, uniquement dans l'optique de le faire « vieillir ». La mesure a été régulièrement évoquée mais jamais retenue par les précédents gouvernements.
Epargne financière
Parmi les autres blocages figure le plafond des livrets réglementés, relevés en 2012. Le CPO critique cette décision, dans la mesure où ces plafonds dépassent désormais la capacité d'épargne financière des classes modestes, voire moyennes. « Les livrets d'épargne réglementée sont utilisés en partie pour de l'épargne relativement longue, pour laquelle ils sont peu adaptés », disent-ils.
Ces biais sur la fiscalité de l'épargne ont déjà été identifiés par le passé. Toute réforme prendrait du temps à produire des effets, sachant que les changements de fiscalité ne peuvent s'appliquer que sur les nouveaux produits ou versements. Encore faudrait-il qu'elle surmonte les réticences des Français, très attachés à l'assurance-vie et au Livret A , et plus encore celle de puissants lobbys. La question du régime fiscale de l'assurance-vie, et du fléchage accru de l'épargne vers le financement des entreprises, fait partie des sujets clefs de la prochaine loi sur les entreprises que doit présenter le ministre des Finances, Bruno Le Maire, au printemps.
https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/0301201847377-fiscalite-du-capital-la-reforme-macron-na-pas-resolu-toutes-les-incoherences-2148052.phpBagikan Berita Ini
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