
En se rapprochant du géant américain, Monoprix espère bien distancer Carrefour et Leclerc, eux aussi engagés dans la course pour livrer en une heure à Paris les commandes réalisées sur Internet.
Le loup Amazon vient-il de faire son entrée dans la bergerie de la distribution alimentaire française ? Depuis des mois, le géant américain du e-commerce cherchait, sans succès jusqu’ici, à s’allier avec un grand acteur hexagonal du secteur. Avec l’accord qu’il vient de signer avec Monoprix, l’enseigne premium de centre-ville du groupe Casino, c’est désormais chose faite. Dévoilé lundi soir, ce partenariat va permettre à Amazon de proposer à ses clients membres du programme de fidélisation Prime d’accéder en ligne à une gamme de plusieurs milliers de références issues de grandes marques et des gammes Monoprix (Gourmet, Bio, la beauté…). De quoi étoffer très sérieusement l’offre alimentaire d’Amazon Prime Now, accessible uniquement via une application mobile et qui permet de se faire livrer en une heure à Paris et en proche banlieue une sélection encore limitée de produits comestibles.
«A travers ce partenariat unique entre Amazon et Monoprix, le groupe Casino renforce sa stratégie de distribution omnicanale et se rapproche encore davantage de ses clients et de leurs besoins», s’est félicité le président du groupe Casino, Jean-Charles Naouri. Le service, qui sera limité à Paris, doit débuter dans les prochains mois, sans que la date soit encore connue. Concrètement, deux magasins Monoprix parisiens seront chargés de préparer les commandes – le «picking» – qui seront ensuite livrées par Amazon, le meilleur logisticien du marché.
«On a beaucoup de clients Prime qui sont amoureux de la marque Monoprix», a déclaré pour sa part Frédéric Duval, le directeur général d’Amazon en France selon lequel l’arrivée de produits de l’enseigne constitue un vrai «plus». Un «plus» de données qui permettra au géant américain d’affiner sa connaissance du ticket de caisse de ses consommateurs les plus aisés et urbains et surtout de bénéficier de prix et de tarifs compétitifs que seule une enseigne de premier plan comme Monoprix est en mesure d’obtenir. Une stratégie similaire à celle déjà déployée en Espagne avec Dia depuis 2016 et en Royaume-Uni avec Morrissons mais à laquelle manquait un cheval de Troie pour le marché français. Approché tout comme Système U, Michel-Edouard Leclerc a de son propre aveu décliné, notamment dissuadé par la commission de 8% sur les ventes qu’Amazon escomptait empocher au passage.
Volte-face
Du côté de Monoprix en revanche, engagé dans une diversification en ligne tous azimuts – il vient tout juste de racheter Sarenza, le premier chausseur du net français –, cette alliance a tout d’une volte-face. Très à l’offensive dans la bataille pour la livraison express de ses clients à domicile, son PDG, Régis Schultz, n’avait pas hésité à s’en prendre à Amazon à l’été 2016 pour dénoncer son arrivée dans le commerce alimentaire à Paris, un fief de l’enseigne. «La livraison en une heure que propose Amazon à Paris sur une offre restreinte, restera marginale. Mais ce qui me choque, ajoutait-il dans un entretien aux Echos,c’est qu’on laisse une société perturber le marché en lançant un service probablement à perte. Si c’est le cas, c’est du dumping.»
Dix-huit mois plus tard, le même affirme que les prix seront les mêmes que sur le site monoprix.fr , qu’il gardera l’entière maîtrise de son offre sur sa boutique Amazon, et que cette dernière sera «rentable».
Il va devoir pourtant affronter la concurrence de Leclerc qui a lancé depuis lundi son propre service de livraison alimentaire dans la capitale. Limité pour le moment à une moitié des arrondissements et baptisé «E.Leclerc Chez Moi» au slogan choc («Paris libéré, Paris livré»), il propose une offre conséquente de produits à des prix environ 20% moins cher que ses concurrents urbains malgré un coût de livraison facturé 12,90 euros. Et Carrefour n’est pas en reste, qui promet que 15 villes proposeront la livraison express en une heure, dans les prochains mois. Après Lyon début avril, Carrefour, qui dispose de 250 magasins dans la capitale, va y déployer des «drive piétons» afin de permettre aux clients de récupérer leurs courses commandées sur Internet dans un magasin de centre-ville.
Spécificité du marché parisien
«L’arrivée du numérique et des standards de consommation imposés par Amazon ont changé les attentes des consommateurs», souligne Yves Marin, expert consommation au sein du cabinet Wavestone qui rappelle la spécificité du marché parisien : un pouvoir d’achat supérieur à la moyenne, une distribution alimentaire de proximité verrouillée par deux géants (Carrefour avec City et Express et le groupe Casino avec Casino, Franprix et Monoprix) et des clients pressés pour lesquels la livraison en une heure est devenue un argument de différenciation.
Si le rapprochement entre Amazon et Monoprix ne concerne pour le moment que la capitale, il pourrait préfigurer un déploiement généralisé du leader du e-commerce en s’appuyant sur le réseau de son nouvel allié qui y dispose de 800 magasins dans 250 villes. «On ne rêve que de ça», a lancé Frédéric Duval, directeur d’Amazon France, qui devra d’abord prouver à Monoprix qu’en s’alliant avec lui, l’enseigne a choisi le bon cheval pour gagner la bataille de Paris.
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