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Dette SNCF : cinq questions autour du « donnant-donnant »

Pour la dette ferroviaire ce sera « donnant-donnant », avait annoncé Emmanuel Macron l'été dernier . En clair : pas d'avancée sur la reprise de la dette sans avancées sur la réforme de la SNCF.

Neuf mois plus tard, la détermination du président de la République est intacte : « Cette réforme est indispensable, a-t-il rappelé jeudi dans le JT de TF1. Pour cela, chacun doit faire un effort. L'Etat va reprendre progressivement la dette au fur et à mesure que la réforme sera mise en oeuvre ».

De quelle dette parle-t-on ? Quel montant sera repris ? Selon quel calendrier ? A quelles conditions ? Ces questions opposent syndicats et gouvernement. Les premiers veulent voir le sujet abordé en priorité. Mais, face à un endettement du système ferroviaire qualifié de « vertigineux », le second avance prudemment.

Cinq questions pour cerner les enjeux.

Quel calendrier ?

Venue défendre devant l'Assemblée nationale le « nouveau pacte ferroviaire », la ministre des Transports a réitéré lundi l'engagement du gouvernement sur la dette, tout en restant floue sur le calendrier. « L'Etat prendra toutes ses responsabilités, d'ici à la fin du quinquennat, pour soulager la SNCF du boulet de sa dette, dont les intérêts la privent chaque année de 1,5 milliard d'euros de ressources », a déclaré Elisabeth Borne.

« Pour instruire les données d'un problème à 50 milliards d'euros, alors que l'Etat doit oeuvrer à son propre désendettement, nous travaillons d'arrache-pied aujourd'hui avec la SNCF, a-t-elle ajouté, afin de nous assurer que cette dette ne pourra pas se reconstituer demain ».

Quant aux modalités : elles seront fixées « prochainement ».

De quelle dette parle-t-on ?

Pourquoi ce chiffre de 50 milliards alors que la dette ferroviaire culmine en réalité à 54 milliards d'euros ? C'est qu'il existe deux dettes. D'un côté la dette abyssale de SNCF Réseau (46 milliards d'euros fin 2017), qui gère les circulations et entretient le réseau ferroviaire. De l'autre, celle de SNCF Mobilités (7,9 milliards d'euros), le transporteur qui fait rouler les trains. Les deux dettes sont comptabilisées séparément dans les résultats de Groupe SNCF.

Et si l'une est saine, l'autre ne l'est pas. « Le chiffre de 8 milliards [de dette] est un chiffre tout à fait naturel dans notre métier », a fait observer Guillaume Pepy, le patron de la SNCF, en présentant les comptes fin février. Un niveau de dette qualifié de « soutenable » car il correspond à un ratio dette/résultat d'exploitation de 2,9 « reconnu comme robuste dans la plupart des entreprises de services publics », a-t-il ajouté.

Donc, la seule dette que le gouvernement est prêt à assumer est celle de SNCF Réseau.

Réformer le statut, un préalable ?

Si le calendrier de cette reprise doit être précisé, c'est pour une question de méthode : le gouvernement ne le dévoilera qu'une fois le nouveau statut juridique de la SNCF acté.

Pour le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, la première condition c'est de rétablir les bonnes conditions d'exploitation de l'entreprise afin de « garantir qu'au bout du compte, elle ne continue pas de perdre trois milliards d'euros par an ».

Et pour ce faire, il faut que les cheminots acceptent le passage du statut actuel d'Epic (établissement public à caractère industriel et commercial) vers celui de société anonyme (SA), un point central de la réforme.

Changement de statut : quel impact ?

Fin février, l'agence de notationFitch a placé la note de SNCF Mobilités sous surveillance négative en vue d'une éventuelle dégradation, considérant que le passage d'Epic en SA « est une indication d'un relâchement potentiel des liens de SNCF Mobilités avec l'Etat ». En effet, une société en Epic ne peut pas être liquidée ou se mettre en faillite, et la dette qu'elle émet est notée comme de la dette d'Etat.

Dans une note publiée ce jeudi, l'agence Moody's estime que ce changement sera négatif pour SNCF Réseau et SNCF Mobilités. Mais « à ce stade, les implications de la réforme sur les profils de crédit des deux sociétés restent incertaines ».

Loin d'être un handicap ou un danger, l'évolution statutaire apparaît, vu de Matignon, comme une opportunité à saisir. « Elle permettra [it] de sortir du piège d'une capacité d'endettement sans limite et responsabilisera [it] les dirigeants de l'entreprise, l'Etat et les collectivités », estime le Premier ministre, Edouard Philippe.

Pour les syndicats au contraire c'est un gage de régression du service public. Selon eux, avec la SA, seuls les investissements « rentables » trouveront demain des sources de financement.

Quel effort pour les finances publiques ?

A Bercy, on se dit prêt à assainir la situation de l'entreprise ferroviaire à condition qu'on mesure, au préalable, son impact sur les finances publiques. Motif : « 46 milliards d'euros, c'est davantage que le budget des armées. Ca ne se traite pas comme ça d'un claquement de doigt », a observé Bruno Le Maire.

Sur ces 46 milliards, 11 milliards sont aujourd'hui déjà comptabilisés dans la dette publique. Et demain, quel effort supplémentaire l'Etat peut-il faire sans compromettre les engagements de la France vis-à-vis de Bruxelles ?

L'unité de compte devrait être la dizaine de milliards d'euros. Elle grèvera d'autant le déficit et la dette publique, même si certaines modalités techniques peuvent permettre d'en limiter l'impact sur le seul déficit. C'est pourquoi rien ne paraît envisageable avant la fin du quinquennat, le déficit étant censé rester proche de 3 % pendant deux ans encore.

Ce qui n'empêche pas l'Etat, premier acteur du « nouveau pacte ferroviaire », de résumer son engagement pour la SNCF en un chiffre : 36 milliards d'euros d'investissement d'ici à 2028 (+50 % par rapport à la décennie écoulée), soit « 10 millions d'euros par jour » ; un chiffre choc qu'Emmanuel Marcon a encore mis en avant ce jeudi.

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