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Arrestation de Carlos Ghosn : conseil d'administration en cours chez Renault

VIDÉO - Le conseil devrait confier la direction du groupe à un tandem formé par l'administrateur Philippe Lagayette et Thierry Bolloré, numéro deux de l'entreprise. L'État souhaite de même la mise en place d'une «gouvernance intérimaire».

Alors que le parquet de Tokyo a confirmé la garde à vue du PDG de l'alliance automobile Renault-Nissan-Mitsubishi Motors, la tension est à son comble côté français. Le conseil d'administration du groupe Renault est en cours depuis 19 heures. Selon des sources citées par l'AFP, il devrait confier la direction de Renault à un tandem intérimaire formé par l'administrateur référent, Philippe Lagayette, et Thierry Bolloré, numéro deux du groupe. Le conseil d'administration de Nissan devrait se prononcer lui sur le limogeage de son président jeudi matin. Mitsubishi Motors (MMC) entend également le «démettre rapidement».

Carlos Ghosn a été arrêté dans la journée de lundi, après plusieurs mois d'enquête interne menée par le constructeur japonais Nissan. Le président de l'entreprise, Hiroto Saikawa, a alors également parlé de «nombreuses autres malversations, telle que l'utilisation de biens de l'entreprise à des fins personnelles». Il a dénoncé le «côté obscur de l'ère Ghosn», et a estimé qu'il s'agissait que les pouvoirs accrus du président de l'alliance automobile représentaient un «problème».

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En parallèle, l'agence de notation Standard and Poor's a placé la note de la dette à long terme de Nissan sous surveillance «avec implications négatives». Ce geste de mauvais augure pour le groupe signifie qu'elle considère la possibilité d'abaisser cette note à l'avenir. Également, le président de Mitsubishi, Osamu Masuko, a déclaré ce mardi que l'alliance des constructeurs sera difficile à gérer sans son président Carlos Ghosn. Selon Reuters, Nissan aurait élargi son enquête pour y inclure son alliance avec le constructeur Renault. L'agence cite trois sources proches du dossier, qui auraient expliqué que Nissan détiendrait des preuves de malversations faites au niveau de Renault-Nissan BV, la structure supervisant les opérations de l'alliance.

«Il sera très compliqué pour Carlos Ghosn de rester à la tête de Renault» - Regarder sur Figaro Live

Les autorités françaises dans l'expectative

Depuis lundi, plusieurs membres de l'exécutif ont réagi à cette affaire. Dans Les 4 vérités, le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a rappelé qu'il pensait «aux salariés du groupe Renault». Le gouvernement n'a, selon ses dires, «aucun élément» sur la procédure en cours au Japon contre Carlos Ghosn. «Je laisse la justice du Japon faire», a conclu le patron de la place Beauvau, ne s'exprimant pas plus avant sur la position de l'État.

Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a déclaré quant à lui sur France Info que «Carlos Ghosn n'est plus en état de diriger le groupe» Renault. Pour autant, l'État ne demandera pas son départ, par respect de la présomption d'innocence. Le locataire de Bercy estime que le départ du dirigeant «fragilise» le groupe: «raison de plus pour agir vite, clairement», a-t-il ajouté. Le gouvernement souhaite donc une «nouvelle gouvernance» intérimaire pour l'alliance automobile. Le ministre va également appeler ses homologues japonais pour discuter avec eux des suites à donner à l'affaire et pour mieux comprendre les raisons de la garde à vue du dirigeant franco-libanais. Bruno Le Maire a pour autant tenu à rassurer les salariés du constructeur, en expliquant que l'État «[traite] le sujet», et qu'il souhaitait «consolider» l'alliance: «Nous avons aujourd'hui un directeur général délégué, M. Thierry Bolloré, qui est de grande qualité», a-t-il expliqué. De plus, Bruno Le Maire a précisé que Bercy avait «vérifié la situation fiscale» de Carlos Ghosn en France, et qu'il n'y avait «rien de particulier à signaler» sur ce sujet. Pour autant, le ministre ne peut confirmer si le dirigeant paie effectivement ses impôts en France, la chose étant couverte par «le secret fiscal».

«Préserver la stabilité de l'alliance»

Hier soir, le président Emmanuel Macron avait déjà mis l'accent sur ce qu'il estimait être la priorité actuelle: maintenir la «stabilité de l'alliance» Renault-Nissan-Mitsubishi. Un porte-parole du gouvernement japonais, quant à lui, a jugé la situation «extrêmement regrettable». Pour autant, les autorités nippones refusent pour le moment de s'exprimer sur le volet judiciaire de l'affaire.

Plusieurs voix se sont élevées pour demander un départ au plus vite de Carlos Ghosn. Le député (PS) Boris Vallaud a par exemple déclaré ce mardi matin qu'il n'était «pas concevable» que le dirigeant reste en place. «Je souhaite qu'il n'y ait pas de précipitation et que l'on sache exactement de quoi l'on parle», a-t-il ajouté, précisant qu'il souhaitait que l'État français «assure» la «stabilité des projets industriels» de l'alliance automobile. L'ancien candidat à la présidentielle et désormais tête de liste (EELV) aux européennes Yannick Jadot a déclaré sur Public Sénat qu'en cas de malversations avérées, «évidemment, il ne peut rester à la tête du groupe Renault». Les politiques français restent pour l'instant prudents, respectant la présomption d'innocence, mais chacun s'accorde pour espérer une stabilisation rapide de la situation de l'alliance automobile.

Du côté des salariés de Renault, l'ambiance était aussi glaciale que la météo mardi. À l'usine Renault de Flins (Yvelines), les employés retournaient travailler après avoir appris la veille l'arrestation de leur PDG. Dans la file de voitures qui franchit les barrières du site industriel, peu sont ceux qui souhaitent s'exprimer sur le sujet. Mais lorsque certains s'arrêtent pour donner leur ressenti, ils en gros sur le cœur. «On est dégoûtés», répondent bon nombre d'employés de la plus vieille usine Renault de France en activité. «Moi, je viens pour gagner mon pain (...), c'est bien fait pour lui ce qui lui arrive», confie Mickaël, intérimaire depuis trois mois dans cette usine qui comptait 2.437 employés fin 2017. Comme la plupart de ses collègues, il ne souhaite pas donner son nom de famille.

La bourse a réagi violemment à cette affaire : mardi matin, le titre de Nissan a clôturé sur un recul de 5,45% à 950,7 yens. Le titre Renault a perdu ce mardi 1,19% à 58,36 après avoir chuté de 8,43% la veille.

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