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Les médiocres résultats de Nissan mettent son patron, Hiroto Saikawa, sous pression - Le Monde

Hiroto Saikawa, le directeur général de Nissan, lors de la présentation des résultats financiers 2018-2019 du constructeur automobile japonais, à Yokohama, près deTokyo, le 14 mai.
Hiroto Saikawa, le directeur général de Nissan, lors de la présentation des résultats financiers 2018-2019 du constructeur automobile japonais, à Yokohama, près deTokyo, le 14 mai. BEHROUZ MEHRI / AFP

Visage fermé, impassible mais transpirant sous les projecteurs, Hiroto Saikawa, le directeur général exécutif de Nissan a, comme attendu, égrené des résultats financiers 2018-2019 franchement médiocres, mardi 14 mai, lors d’une conférence de presse au siège du groupe à Yokohama (banlieue de Tokyo), procédant au passage à la courbette d’excuses dans la grande tradition japonaise des affaires.

Et il y avait de quoi. Nissan a annoncé une dégringolade de ses bénéfices annuels, au plus bas en près d’une décennie, et prévoit une nouvelle chute cette année, témoignant de difficiles mois à venir pour le groupe fragilisé par la chute de son ancien patron Carlos Ghosn. Sur l’exercice 2018-19 clos fin mars, le constructeur japonais, allié de Renault et de Mitsubishi, a dégagé un bénéfice net en baisse de 57 % sur un an, à 319 milliards de yens (2,59 milliards d’euros), loin de son objectif initial de 500 milliards de yens (environ 4 milliards d’euros).

Pire : les résultats 2019-2020 devraient être plus mauvais encore. Selon les prévisions du groupe japonais, le bénéfice sera encore divisé par deux en 2019-2020 pour atteindre 170 milliards de yens (1,4 milliard d’euros), la marge opérationnelle déjà basse à 2,8 % l’an passé étant attendue en recul à 2 % cette année.

Une politique axée sur les volumes

Il faut remonter à 2010-11 pour trouver des profits aussi bas : à l’époque, Nissan se remettait lentement de la crise financière mondiale et venait d’être touché par les effets industriels du tsunami de mars 2011. Nissan pâtit à présent de mauvais résultats aux Etats-Unis et en Europe, alors que la conjoncture automobile y est quand même moins mauvaise qu’à l’époque, le Japon et la Chine demeurant des marchés rentables pour le partenaire de Renault.

Conséquence : le dividende versé aux actionnaires, qui a pu être maintenu au titre de 2018-2019, sera en recul de 30 % pour l’année suivante. Cela pourrait coûter à Renault, qui est le premier actionnaire de Nissan avec 43,3 % du capital, environ 500 millions d’euros l’an prochain.

Dans ces conditions, Hiroto Saikawa peut-il demeurer à la tête de Nissan ? Directeur général du constructeur japonais depuis 2016, il porte au moins une partie de la responsabilité de ce revers. Mais sa défense consiste à mettre en cause non seulement la crise liée à l’affaire Ghosn mais aussi la stratégie imposée par le président déchu de Nissan, et en particulier la politique axée sur les volumes, fortement mise en œuvre aux Etats-Unis.

« Prendre un nouveau départ »

« En 2018, il y a eu incapacité de nous concentrer sur nos activités, a déclaré le patron du groupe japonais lors de la conférence de presse. Cela est reflété dans les résultats de l’entreprise. Mais la plupart des problèmes que nous rencontrons sont l’héritage négatif de la précédente direction. » Interrogé sur un éventuel départ il a laissé entendre qu’il se verrait continuer jusqu’en 2022 afin d’aider Nissan à « prendre un nouveau départ ».

Reste que dans les semaines qui viennent, M. Saikawa va faire face à quelques échéances importantes pour son avenir : un conseil d’administration de Nissan puis de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, fin mai, suivis le 25 juin d’une assemblée générale (AG) de Nissan.

Le 8 avril, lors de la précédente AG du japonais, la réunion avait été houleuse. La responsabilité de M. Saikawa dans l’affaire Ghosn – sa signature apparaît sur certains documents – avait été évoquée. « Maintenir Saikawa signifie maintenir le régime Ghosn », déclarait le même jour un investisseur institutionnel au quotidien économique Nihon Keizai. « Les actionnaires vont tomber sur Saikawa, juge un bon connaisseur du dossier. Pourquoi voudraient-ils garder des actions avec de tels résultats ? Il y a une vraie nervosité. »

De plus en plus isolé

Sa gestion récente est également remise en cause. Depuis sa nomination au poste de PDG, Hiroto Saikawa a soutenu les résultats par une politique de réductions de coûts, sans véritable vision ni projet. Le prochain nouveau véhicule de Nissan n’est pas attendu avant fin 2020. « M. Saikawa a peut-être supervisé les opérations quotidiennes, mais c’est M. Ghosn qui prenait toutes les décisions importantes », estime Koji Endo, analyste chez SBI Securities.

Selon une source proche de la gouvernance de Nissan, M. Saikawa devrait malgré tout passer l’été. « Mais il est clairement sous pression, ajoute un autre bon connaisseur du dossier. Dans les fréquents échanges qu’il a avec Jean-Dominique Senard, le président de Renault, il est devenu de plus en plus nerveux, moins direct, et apparaît de plus en plus isolé. »

La tension dans les relations avec Renault rend également inconfortable sa position. Après des semaines de discorde qui ont suivi l’arrestation de Carlos Ghosn, une trêve avait été conclue mais un projet de fusion a rouvert les plaies. M. Saikawa, farouchement opposé à cette idée, a tenté mardi de calmer le jeu. Il a reconnu « des différences d’opinion » avec Renault sur l’avenir de l’alliance mais, selon lui, le président du groupe français juge lui aussi prématuré de telles négociations. « Le point sur lequel Jean-Dominique Senard et moi sommes d’accord, c’est que ce n’est pas le moment de discuter [des participations croisées] », a déclaré le dirigeant. « Nissan doit pleinement se concentrer sur son redressement », a-t-il conclu.

Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance) et Éric Béziat

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https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/05/14/nissan-le-benefice-net-annuel-plonge-de-57_5461900_3234.html

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