Le clan Ghosn lance sa contre-attaque. Par le biais de ses avocats, le magnat déchu de l’industrie automobile a demandé ce jeudi l’annulation des poursuites intentées contre lui au Japon. Il accuse les procureurs « d’actes illégaux », et d’avoir comploté avec son ancien employeur pour le faire tomber.
Le procès ne s’ouvrira qu’en avril mais les avocats Hiroshi Kawatsu, Junichiro Hironaka et Takashi Takano, ont déjà présenté leurs arguments au cours d’une audience préliminaire. Les inculpations sont « politiquement motivées depuis le début, fondamentalement biaisées », et « cette affaire n’aurait jamais dû donner lieu à des poursuites pénales », ont-ils dénoncé dans un communiqué.
Les avocats dénoncent des discriminations contre Ghosn
L’enquête contre Carlos Ghosn est « totalement illégale et préjudiciable », a écrit Me Kawatsu dans un autre document obtenu par l’AFP. Et de dénoncer « un abus de l’autorité publique chargée des poursuites pénales à des fins déloyales dans un contexte de discrimination à l’égard de la race, de la nationalité et du statut social de M. Carlos Ghosn ». Les défenseurs du franco-libano-brésilien, qui fut le chef d’entreprise le mieux payé du Japon, exigent en conséquence « l’annulation des poursuites ». Ils ont transmis aux juges et à la presse les éléments qui, selon eux, démontrent que leur client est innocent et qu’il est victime d’une machination ourdie en dehors des règles.
Il existe, toujours selon eux, « de multiples actes illégaux d’investigation qui remettent fondamentalement en question l’intégrité et la viabilité » des accusations. Carlos Ghosn est sous le coup de quatre inculpations : deux pour des revenus différés non déclarés aux autorités boursières par Nissan (qui est aussi poursuivi sur ce volet), et deux pour abus de confiance aggravé. Outre la négation de toute malversation avancée depuis toujours, la défense tente cette fois de démontrer que l’enquête en elle-même est truffée de failles de procédure.
Une « task force » secrète
« Les accusations portées contre M. Ghosn sont le fruit d’une collusion illicite entre les procureurs, des membres du ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie (Meti) et des dirigeants de Nissan, qui ont formé une « task force » secrète chargée de rechercher à imputer artificiellement des actes répréhensibles à Carlos Ghosn », assène le communiqué. Pour les avocats, l’objectif de cette manœuvre était clair : « écarter M. Ghosn pour l’empêcher de mener à bien une intégration renforcée entre Nissan et Renault, qui aurait menacé l’autonomie de l’un des fleurons de l’industrie japonaise, passé sous pavillon français ».
Les avocats accusent aussi les enquêteurs japonais d’avoir sous-traité une partie de leur travail à « des consultants et cadres de Nissan » afin d’obtenir des documents préjudiciables à Carlos Ghosn. D’après la défense, le parquet a aussi procédé à des saisies illégales (par exemple les téléphones de l’épouse de Carlos Ghosn) et à d’autres irrégularités, dont celle de l’avoir « arrêté et inculpé arbitrairement », « tout en ignorant les conduites répréhensibles d’autres dirigeants de Nissan, de nationalité japonaise » et bénéficiant d’un accord de coopération avec les enquêteurs. « Si les accusations ne sont pas écartées, M. Ghosn est prêt à les combattre vigoureusement », ont promis les avocats.
Toujours assigné à résidence
Carlos Ghosn a été éjecté de ses sièges de président de Nissan et de Mitsubishi Motors (3e membre de l’alliance) dans les jours suivant son interpellation. Il a ensuite démissionné de Renault, avant même que d’autres investigations ne soient menées en France à son encontre. Celui qui était salué comme « le sauveur de Nissan » après son arrivée dans le groupe en 1999 avait été arrêté le 19 novembre 2018 à son arrivée dans la capitale japonaise.
Carlos Ghosn a passé au total 130 jours en détention provisoire. Relâché sous caution au printemps, il est actuellement assigné à résidence à Tokyo. Une audience préliminaire a lieu chaque mois. Celle de jeudi étant la première au cours de laquelle les avocats ont répondu point par point aux accusations portées par l’unité spéciale du bureau des procureurs envers leur client.
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