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Veolia et Suez sont engagés dans une bataille sans merci - Le Monde

Bertrand Camus, directeur général de Suez, le 14 janvier 2020.

Les positions des deux frères ennemis des services à l’environnement sont devenues irréconciliables. Dans un entretien publié lundi 7 septembre par Le Figaro, Bertrand Camus, directeur général de Suez, juge que le projet de Veolia d’absorber son groupe est « aberrante pour Suez et funeste pour la France ». Mais un nouveau protagoniste est intervenu dans la bataille : la Caisse des dépôts et consignations, qui détient 5,7 % de Veolia. « La création d’un champion national nous semble une bonne chose (…) Il est possible qu’un accord amical soit préparé », a déclaré lundi son directeur général, Eric Lombard, isolant un peu plus le patron de Suez.

M. Camus, à la tête du groupe depuis mai 2019, a été pris de court par l’offensive de Veolia lancée le 30 août. Même si son PDG, Antoine Frérot, ne lui a jamais caché son projet de marier leurs deux entreprises. Il lui a présenté son offre comme « amicale » et son projet comme une chance unique de construire « le champion mondial de la transformation écologique » présent dans l’eau, les déchets et les services d’économies d’énergie.

Dans un premier temps, le numéro 1 mondial du secteur reprendrait 29,9 % de Suez, soit l’essentiel de la part du groupe d’énergie Engie (32,1 %) ; puis il lancerait une offre publique d’achat sur le solde du capital. Cette opération valoriserait la « cible » à 10 milliards d’euros si le prix de Veolia (15,50 euros par action) reste en l’état, ce qui est peu probable. Il donnerait naissance à un groupe pesant plus de 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires et doté de technologies uniques au monde pour le traitement des eaux et la valorisation des déchets, notamment les rebus industriels les plus dangereux.

Pour Bertrand Camus, il ne s’agit rien moins que d’« une tentative de déstabilisation majeure d’une entreprise phare de notre pays (…), une opération financière opportuniste, avec une démarche baroque » qui « sous-valorise les actifs de Suez ». La durée de l’opération paralyserait Suez « pendant 12 à 18 mois », plaide-t-il encore, et elle vise à « démanteler 40 % de notre activité en France ». Selon des proches, le projet de dégager 500 millions d’économies avec la fusion entraînerait la suppression d’au moins 4 000 emplois, notamment au siège de La Défense (Hauts-de-Seine), sur les 11 000 que Suez eau compte dans l’Hexagone. « Les méga-fusions sont synonymes de casse sociale, souligne-t-il. Ce qui compte, c’est l’innovation, l’agilité pas la taille ! »

Ce scénario du pire est rejeté par Veolia et Meridiam, le fonds français de gestion des infrastructures, qui s’est engagé à reprendre cette activité eau. Le groupe fusionné aurait pesé près de 60 % du marché de l’eau en France. Cette cession est donc nécessaire, sinon suffisante, pour que l’Autorité de la concurrence française et la Commission de Bruxelles donnent leur feu vert au projet. Dans un entretien au Parisien dimanche, Thierry Déau, le président-fondateur de Meridiam, affirme que le prix de l’eau n’augmentera pas. Quant à l’emploi, ajoute-t-il, « non seulement je le garantis, mais je pense qu’on [le] développera. »

Face à cette « Blitzkrieg », Philippe Varin, le nouveau président de Suez, et M. Camus attendent la mobilisation des salariés, prévue mardi 8 septembre, pour dévoiler une « offre alternative ». Depuis une semaine, ils frappent à de nombreuses portes pour trouver des industriels ou des financiers désireux de reprendre la part d’Engie : les propres actionnaires de Suez, comme la banque catalane Caïxa (6 %), l’italien Caltagirone (3,5 %) ou les salariés (2,6 %) ; des institutionnels publics, comme la Caisse des dépôts et consignations ; des fonds privés tricolores comme Ardian (ex-Axa Private Equity), voire des étrangers qui devraient alors être très minoritaires ; et pourquoi pas des industriels du BTP.

Le patron de Veolia veut éviter l’enlisement

Les dirigeants de Suez savent qu’il est urgent de « desserrer l’étau », notamment « des délais déraisonnables compte tenu des enjeux humain ». Leur « priorité », selon M. Camus, est de présenter une contre-offre. Le patron de Veolia, lui, doit rester le maître des horloges pour arriver à ses fins. Pour éviter l’enlisement, il a imprimé un rythme soutenu en donnant au conseil d’Engie jusqu’au 30 septembre pour se prononcer. Son président, Jean-Pierre Clamadieu, a prévenu que « le compte n’y est pas » à 15,50 euros, tout en jugeant le projet « attrayant » sur le plan industriel. Comme le premier ministre, Jean Castex, qui estime que l’opération a « du sens ».

M. Frérot a marqué un point décisif en obtenant un feu orange du gouvernement. Mais pour atténuer le sentiment d’avoir pris trop vite le parti de Veolia, le ministre de l’économie, des finances et de la relance a affirmé, dimanche, sur Europe 1, qu’il peut y avoir d’autres offres. Bruno Le Maire a indiqué qu’« elles seront toutes examinées avec la même équité ». Aussi bien en termes de maintien des emplois en France que de valorisation de la part d’Engie, dont l’Etat détient 23,6 % du capital.

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