La juridiction britannique a estimé que les chauffeurs avaient le droit à un salaire minimum et à des congés payés.
Coup de tonnerre pour Uber et les plateformes numériques : la Cour suprême britannique a estimé vendredi que les chauffeurs pouvaient être considérés comme des «travailleurs» salariés, rejetant le recours du géant américain de réservation de voitures dont le modèle économique au Royaume-Uni pourrait être chamboulé.
La plus haute juridiction britannique a donné tort à Uber à l'unanimité, mettant un terme à cette affaire lancée en 2016.
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Cette décision signifie que les chauffeurs Uber, qui étaient jusque-là des travailleurs indépendants, devraient avoir droit par exemple à un salaire minimum et à des congés payés, ce qui pourrait même faire boule de neige pour l'ensemble des plateformes numériques et la «gig economy», l'économie des petits boulots au Royaume-Uni.
Uber avait saisi la Cour suprême après avoir perdu à plusieurs reprises devant des tribunaux. La compagnie estimait que les chauffeurs sont des travailleurs indépendants, choisissant leurs horaires et lieux de travail, et collaborant parfois à plusieurs applications en même temps.
«Nous respectons la décision de la Cour», a réagi Jamie Heywood, patron d'Uber pour l'Europe du Nord et de l'Est. «Nous sommes décidés à faire plus et nous allons consulter tous nos chauffeurs en activité au Royaume-Uni pour comprendre les changements qu'ils veulent voir».
Uber, qui devrait en dire plus sur ses intentions dans les semaines à venir, assure que la décision ne prévoit pas que tous les chauffeurs soient automatiquement reclassés comme travailleurs. La plateforme insiste sur le fait que la Cour suprême se prononçait sur le statut de «travailleur» plutôt que celui d'«employé», dont les droits sont un peu plus élevés selon la loi britannique.
Malgré ces nuances, la justice aura donné à chaque fois raison à un groupe d'une vingtaine de chauffeurs qui estimaient avoir droit au statut de travailleur, compte tenu du temps passé connectés à l'application et du contrôle exercé par le groupe par exemple sur leur évaluation.
Deliveroo bientôt concerné ?
La Cour suprême a estimé «qu'en se connectant à l'application Uber à Londres, un chauffeur dans le cadre de la plainte est considéré comme un travailleur en entrant dans un contrat». Les deux chauffeurs Uber qui ont initié la première plainte, James Farrar et Yaseen Aslam, ont déclaré vendredi à la BBC être «ravis et soulagés».
Cette décision de la Cour suprême fait que les chauffeurs qui ont porté la plainte pourront se tourner vers un tribunal pour obtenir des indemnisations. En théorie, d'autres chauffeurs pourront alors demander à la justice d'obtenir le statut d'employé.
La plateforme, qui n'est pas rentable à l'échelle mondiale, pourrait n'avoir d'autres choix que d'augmenter ses tarifs au Royaume-Uni, quitte à perdre des parts de marchés si ses concurrents ne sont pas soumis à ces mêmes règles. L'action Uber chutait de 3% à Wall Street dans les échanges électroniques avant l'ouverture du marché vendredi.
Le syndicat GMB a qualifié la décision de «victoire historique». Un de ses représentants, Mick Rix, a estimé sur Twitter qu'il s'agissait d'un nouveau «clou dans le cercueil de ceux qui cherchent à exploiter la gig economy».
La décision pourrait faire tache d'huile pour l'ensemble des plateformes numériques. Les livreurs de la plateforme de livraisons de repas Deliveroo tentent devant la Cour d'appel de Londres de pouvoir bénéficier d'une convention collective.
De son côté, Uber explique avoir fait évoluer ses pratiques depuis le début de cette affaire. Les chauffeurs peuvent désormais choisir quand et où ils conduisent et avoir accès gratuitement à des assurances maladie, ainsi qu'à des indemnisations pour des congés parentaux.
La plateforme plaide en outre pour la création d'un fonds financé par le secteur qui permettrait aux chauffeurs d'accéder à des aides et à la protection sociale, comme d'être payés pendant leurs congés. Uber avait pour projet de pouvoir répliquer en Europe ce qu'elle a proposé en Californie.
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