Mettre le grappin sur une grande entreprise cotée en Bourse au point d'en intégrer la direction en 24 heures. C'est le tour de force accompli par l'entrepreneur Elon Musk sur Twitter en ce début de semaine. Lundi 4 avril, le créateur de Tesla et de Space-X annonçait à la surprise générale avoir acquis 9,2% du capital du réseau social, devenant de fait son premier actionnaire.
Le soir même (mardi 5 à 2h30 heure française), le milliardaire et critique virulent de Twitter lançait sa première offensive : un sondage pour savoir si les utilisateurs souhaitent pouvoir modifier leurs tweets a posteriori. Si l'initiative peut paraître inoffensive au premier abord, Musk touche là un point de blocage majeur, car la direction de Twitter était farouchement opposée à l'idée d'éditer les tweets post-publication par crainte des dérives, malgré la popularité de la demande. Avec ce sondage, Musk remettait donc publiquement en doute une décision au cœur de la stratégie de modération de l'entreprise.
Mardi 5 avril au petit matin, l'auto-proclamé défenseur de la liberté d'expression, par ailleurs accusé de possibles manipulations de cours par le gendarme des marchés financiers pour des propos tenus sur Twitter, obtenait de Parag Agrawal, l'actuel CEO du réseau social, une place au sein du conseil d'administration de l'entreprise.
[Je suis ravi de partager que nous nommons Elon Musk au sein du conseil d'administration ! A travers les conversations avec Elon ces dernières semaines, il était devenu clair qu'il apporterait une grande valeur à notre Conseil d'administration]
L'action Twitter gagnait 6% avant la cloche d'ouverture, après avoir fini en hausse de plus de 27% lundi.
Changements "majeurs" à venir, promet Elon Musk
Lundi matin, le milliardaire à la relation chaotique avec Twitter avait pris soin de préciser que son entrée spectaculaire au capital était "passive" et ne s'accompagnait d'aucune intention d'influer en quoi que ce soit sur la stratégie de l'entreprise. Une promesse difficile à croire étant donné sa volonté affichée de "réparer" Twitter, comme le soulignait alors La Tribune.
24 heures plus tard, le voilà au Conseil d'administration et ses intentions sont désormais limpides, à l'inverse de ce qu'il a déclaré à la SEC :
[J'ai hâte de travailler avec Parag & le conseil d'administration de Twitter pour amener des améliorations majeures à Twitter dans les prochains mois!]
La question qui se pose est donc désormais : où s'arrêtera-t-il ? D'après le document envoyé par l'entreprise à la SEC [Securities and Exchange Commission, le gendarme de la Bourse] et révélé par le site The Verge, Elon Musk est promu directeur de classe 2, c'est-à-dire jusqu'à l'assemblée générale des actionnaires en 2024. Il fait donc partie des 11 directeurs de l'entreprise. Pendant son mandat et jusqu'à 90 jours après, il ne pourra pas détenir plus de 14,9% du capital de l'entreprise, ce qui lui permettra tout de même de dépasser le seuil de 10% et donc de devenir un actionnaire activiste.
Elon Musk, un activiste de la "liberté d'expression" contre la "censure"
Twitter affiche un chiffre d'affaires annuel en 2021 en hausse de 37% et s'établit à 5,08 milliards de dollars, pour un résultat net de 221 millions de dollars. Ses coûts augmentent également de 35% au dernier trimestre, en raison d'embauches, de frais marketing et d'investissements dans les infrastructures. La plateforme annonçait 217 millions d'utilisateurs quotidiens en fin d'année, en progression de 13 % sur un an et vise 315 millions fin 2023... soit une hausse de 45% d'utilisateurs par an.
Mais si Twitter est un média extrêmement influent dans le monde entier, les chiffres de l'oiseau bleu font pâle figure à côté de l'empire des réseaux sociaux de Mark Zuckerberg, notamment Facebook qui revendique 2,9 milliards d'utilisateurs par mois. L'entreprise est critiquée pour ses difficultés à faire croître de manière significative son utilisation -elle stagne autour de 300 millions depuis cinq ans- et donc à monétiser le trésor des données personnelles.
Twitter subit aussi les critiques de toutes parts au sujet de sa modération : les régulateurs l'accusent d'être laxiste en ne réussissant pas à empêcher la prolifération des fake news, des discours de haine et de harcèlement. De l'autre côté du spectre, des personnalités comme Donald Trump ou Elon Musk lui reprochent de trop modérer et de contrevenir à la liberté d'expression en censurant les propos jugés problématiques.
Bref, Twitter était la cible idéale pour un actionnaire activiste prompt à surfer sur le mécontentement des investisseurs et une partie des utilisateurs. Et maintenant qu'il siège au Conseil d'administration, difficile d'imaginer Elon Musk, patron de deux entreprises à succès et homme le plus riche du monde fin 2021, s'asseoir tranquillement au fond de la salle et rester un acteur de second plan. La bourse apprécie déjà : l'action Twitter gagnait 6% avant la cloche d'ouverture, après avoir fini en hausse de plus de 27% lundi.
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