Le groupe français Imerys compte extraire 34.000 tonnes par an de ce métal, dans l'Allier.
C'est un projet absolument majeur pour l'indépendance industrielle de la France qui a été dévoilé lundi. Le groupe français Imerys, spécialiste des minéraux industriels, a annoncé le lancement d'un projet d'exploitation de lithium sur son site de Beauvoir, dans l'Allier. « Nous visons une production de 34. 000 tonnes d'hydroxyde de lithium par an, ce qui permettrait d'équiper 700 000 véhicules électriques », se réjouit Alessandro Dazza, le directeur général du groupe.
Le lithium est devenu une ressource stratégique, ces dernières années, avec le développement de la voiture électrique. Métal ultraléger et conducteur électrique, il est indispensable pour fabriquer les célèbres batteries lithium-ion. S'il existe plusieurs variantes technologiques de batteries, toutes utilisent du lithium. « Dans une batterie de 50 kWh, qui équipe une voiture d'une taille moyenne, il faut 40 kilogrammes de lithium », précise Alessandro Dazza.
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Depuis la crise sanitaire, les pays européens ont pris conscience de l'importance de la souveraineté industrielle. Les constructeurs automobiles investissent pour fabriquer moteurs et véhicules électriques sur le Vieux Continent. Les projets de giga-usines de batteriesse sont multipliés ces dernières années en Europe, dont trois en France. Sauf qu'il faut également s'assurer d'un accès sécurisé aux matières premières : cobalt, nickel, manganèse et lithium. « L'approvisionnement en métaux sera critique » dans le cadre du « basculement d'une économie reposant sur les hydrocarbures vers une économie reposant sur les métaux », avait averti en janvier Philippe Varin, ancien dirigeant de PSA et de France Industrie, dans un rapport remis au gouvernement.
Exploiter les réserves européennes
Aujourd'hui, l'approvisionnement mondial de lithium est assuré très majoritairement par l'Australie (48 %), le Chili (22 %) et la Chine (17 %). Quelques centaines de tonnes proviennent du Portugal ; mais leur qualité n'est pas suffisante pour approvisionner les fabricants de batteries. Certes, la plupart des constructeurs automobiles européens ont signé des accords d'approvisionnement à long terme avec des producteurs de métaux hors d'Europe. Mais cela ne les met pas à l'abri de turbulences géopolitiques. Surtout, la demande pour le lithium va exploser dans les prochaines années, avec l'envolée des ventes de voitures électriques.
En 2035, l'Europe a prévu un arrêt total de la commercialisation de voitures neuves équipées de moteur thermique. Les consultants du BCG estiment ainsi que la demande en lithium sera de 2,2 millions de tonnes dans le monde en 2030, contre à peine 100.000 tonnes aujourd'hui. Il faut donc exploiter les réserves européennes. Car elles existent. De nombreux projets sont en développement sur le Vieux Continent. Le problème est qu'il est difficile de les mener à bien. Le plus gros, en Serbie, a été annulé suite à des protestations locales. Le suivant, en Allemagne, se fonde sur des technologies totalement nouvelles
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Ce n'est pas le cas de celui d'Imerys. Aujourd'hui, le groupe exploite du kaolin, utilisé pour la vaisselle ou le carrelage, sur son site de Beauvoir. Depuis des études menées dans les années 1960 par le BRGM, le Bureau de recherches géologiques et minières, on sait que du lithium existe en dessous de la carrière de kaolin. Ces deux dernières années, Imerys a décidé d'investir pour en déterminer le potentiel exact. « Les premières études du BRGM faisaient état d'une réserve de 320. 000 tonnes de lithium, détaille Alessandro Dazza. Les études que nous avons menées nous ont permis de déterminer qu'il y avait au moins 1 million de tonnes. Ce qui représente vingt-cinq ans de production. Et le gisement va plus loin. Nous devons encore mener des recherches pour déterminer sa taille exacte. »
Exploitation en 2028
Sur le plan technique, outre la mine proprement dite, Imerys va également construire une usine pour transformer le mica lithinifère en hydroxyde de lithium, une poudre directement utilisable dans les giga-usines de batteries. De gros efforts vont être réalisés pour minimiser l'impact environnemental du projet. Les opérations minières seront ainsi totalement souterraines (entre 75 et 350 mètres de profondeur), ce qui réduira l'empreinte au sol et les poussières générées. Tous les engins miniers seront électriques. Un pipeline sera mis en place entre la mine et un premier lieu de chargement en bord de voie ferrée, qui permettra d'expédier le lithium vers l'usine de transformation. Cette dernière, située à une centaine de kilomètres de la mine, sera installée dans une des zones industrielles déjà artificialisées présélectionnées. « Nous respecterons les critères de la mine responsable, ce cadre poussé par les groupes miniers australiens, canadiens et sud-africains recommandé par Philippe Varin dans son rapport », précise encore Alessandro Daza.
La mise en exploitation de l'usine est aujourd'hui prévue pour 2028. Les dirigeants d'Imerys espèrent que le projet dispose de suffisamment d'atouts pour vaincre les oppositions qui ne manqueront pas d'apparaître. Outre les efforts en matière d'environnement, le fait qu'il existe déjà une carrière exploitée de longue date là où la mine sera installée est un avantage. Le groupe compte également beaucoup sur le soutien des pouvoirs publics. « Nous avons des mines de lithium en France et nous allons les développer grâce au nouveau code minier ; c'est clé pour notre souveraineté », a ainsi expliqué Emmanuel Macron, dans un entretien accordé aux Échos, le 16 octobre.
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Ce projet représente des investissements colossaux pour Imerys, de l'ordre de 1 milliard d'euros, avec la création de 1000 emplois directs à la clé. Le groupe a déjà investi environ 30 millions d'euros afin de réaliser des sondages et de mener les premières études préliminaires sur le projet. Il va ensuite falloir déterminer précisément la taille du gisement, les choix techniques etla localisation exacte du site de transformation, et calibrer définitivement le montant des investissements. Imerys envisage de loger cette mine dans une structure ad hoc et de mettre en place un financement dédié. Des organismes publics pourraient sans doute participer à l'opération. De même que des clients, notamment les constructeurs automobiles, qui garantiraient des volumes par la même occasion.
Les coûts de production de l'hydroxyde de lithium français devraient se situe entre 7 et 9 euros le kilo. Le prix de vente du lithium est, lui, actuellement autour de 70 euros le kilo. Sur ces niveaux de prix, le chiffre d'affaires annuel généré par cette seule mine devrait approcher 2,4 milliards d'euros. Le projet devrait donc être très rentable, en dépit de l'amortissement de l'investissement.
Cinq chantiers
Le gouvernement vient de rendre public les lauréats de 5 appels à projets « métaux critiques », qu'il va financer en partie :
● Imerys, avec sa mine de lithium ;
● le projet Viridian, en Alsace, de raffinage de lithium ;
●le recyclage de batteries lithium-ion porté par Eramet ;
● Sanou Koura, un projet dans les Ardennes d'extraction des métaux critiques contenus dans les déchets électroniques ;
● l'augmentation de capacité du site WEEecycling, en Seine-Maritime, qui recycle également les déchets électroniques.
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