Le tribunal de commerce de Grenoble a placé, jeudi 19 janvier, le distributeur d’articles sportifs Groupe Go Sport en redressement judiciaire. « Par un jugement solidement motivé, le tribunal (…) a constaté l’état de cessation des paiements de la société Groupe Go Sport et a ouvert une procédure en redressement judiciaire », a annoncé le parquet de Grenoble dans un communiqué. Il a précisé que « la société Go Sport France n’est pas déclarée en cessation des paiements, mais sa situation sera impactée par celle de sa société mère ».
Cette annonce intervient dans un climat lourd pour les milliers de salariés du groupe de magasins de sport. Mercredi, le parquet de Grenoble a annoncé avoir ouvert en novembre 2022 une enquête préliminaire pour « abus de bien social » concernant Groupe Go Sport, après que « les commissaires aux comptes ont transmis plusieurs révélations de faits délictueux ».
Les 2 160 salariés en France de Go Sport attendaient anxieusement la décision, quelques semaines après la liquidation de Camaïeu – qui appartenait au même groupe (Hermione People & Brands), branche distribution de la Financière immobilière bordelaise, un fonds d’investissement de l’homme d’affaires bordelais, Michel Ohayon.
Remontée de 36 millions d’euros vers la maison mère
Jean-Henri Miszel, membre du comité social et économique central (CSEC), craint que « le redressement judiciaire de Groupe Go Sport n’entraîne le redressement judiciaire de Go Sport France ».
Un représentant du syndicat majoritaire, la CGT, s’est lui inquiété du fait que « les magasins du réseau intégré vendent les produits issus de la centrale d’achat au siège du groupe ». « Si ce dernier n’est plus en mesure de payer les fournisseurs, comment les magasins seront-ils approvisionnés ? », s’interroge-t-il.
Les représentants syndicaux et le CSEC s’inquiétaient de la santé financière du groupe, s’alarmant en particulier d’une remontée de 36 millions d’euros de trésorerie de Go Sport vers sa maison mère, le groupe HPB (Hermione People & Brands).
Le parquet a décidé de lancer une enquête après que « les commissaires aux comptes ont transmis plusieurs révélations de faits délictueux ». « Cette enquête pourrait sans doute prouver que les salariés de l’entreprise Go sport, comme avant nos collègues de Camaïeu, et peut-être demain Gap, ne pourraient être que les victimes de la gestion incompétente et malveillante de sa holding HPB. Aujourd’hui, c’est une première victoire car la justice pénale avance », ont déclaré les représentants du personnel dans un communiqué.
Deux prêts garantis par l’Etat
HPB a pour sa part affirmé que Go Sport n’est « pas en état de cessation de paiements » et devrait même renouer avec les bénéfices cette année après dix-sept ans de pertes.
Dans sa décision, le tribunal a constaté que Groupe Go Sport se trouvait en cessation des paiements, citant le rapport du cabinet Eight Advisory & Associés établissant au 5 janvier un passif s’élevant à plus de 14 millions d’euros.
Go Sport, fondé en 1978 et basé à Sassenage en banlieue de Grenoble, avait été repris par HPB fin 2021 pour 1 euro symbolique auprès de la maison mère du groupe de distribution alimentaire Casino, la société Rallye, elle-même lourdement endettée. La chaîne de magasins de sport a bénéficié de deux prêts garantis par l’Etat, d’un montant de 55 millions d’euros, pour l’aider à surmonter ses difficultés au moment de la crise sanitaire.
Selon Libération, qui cite des sources proches du dossier, l’enquête préliminaire en cours s’intéresse à deux « ponctions » suspectes : 18 millions d’euros, pour les salaires de Camaïeu, 36 millions d’euros pour financer l’achat du réseau de 21 magasins de vêtements Gap, racheté pour un euro par HPB, pour les intégrer à Go Sport. HPB a annoncé le 12 janvier « l’acquisition de GAP France par Go Sport » pour un montant de 38 millions.
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