
Avant sa première interview à la télévision Française dimanche soir, le chef de l'Etat plaide pour l'héroïsme politique, critique les médias et célèbre sa proximité avec Angela Merkel.
A l’une de l’hebdomadaire Der Spiegel, Emmanuel Macron s’affiche en gros plan avec son inévitable regard hypnotique. «Je ne suis pas arrogant», lui fait dire le journal en gros titre. Il est vrai que les austères Allemands, souvent perplexes ou parfois fascinés par les envolées lyriques et l’assurance de ce jeune président avaient besoin, sur ce point d’être rassurés. Le seront-ils vraiment ? Pas sûr.
Car Macron assume et revendique cette part de «grandeur», selon lui inhérente à la fonction présidentielle. Contrairement à l’Allemagne protestante, il explique que la France catholique a le goût de la verticalité. Avant d’être politique, sa fonction aurait «une haute valeur symbolique» qui ne peut se comparer à celle d‘un simple chef de gouvernement. «Je ne me prends pas pour un roi» prend-il toutefois soin de préciser. «Mais que cela plaise ou non l’histoire de la France est unique en Europe. En forçant le trait, on pourrait dire que la France est un pays de monarchiste régicide, ou encore que les Français élisent un roi mais qu’ils veulent à tout moment pourvoir le renverser».
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— DER SPIEGEL (@DerSPIEGEL) 13 octobre 2017
C’est pourquoi le locataire de l’Elysée doit se préparer à être «dénigré, insulté, moqué». Car on ne peut être président et «vouloir être aimé». On notera toutefois que ces cruelles paroles sont prononcées en présence du chien de l’Elysée, Nemo, un sympathique labrador noir croisé de Griffon. Le Spiegel a d'ailleurs jugé bon de publier un portrait de l’animal. Une touche de tendresse et de simplicité dans cet entretien tout en majuscule…
«Je ne suis pas arrogant, je suis déterminé»
Comme dans le grand entretien qu’il a donné au Point fin août, Macron explique qu’il est temps de «renouer avec l’héroïsme politique» et de retrouver le sens du «récit historique», un discours assez exotique au pays d’Angela Merkel même si, là encore, le chef de l’Etat prend soin de préciser qu’il n’est pas dans ses intentions «de jouer au héros». Pour mener à bien cette entreprise de réappropriation de l’héroïsme, Macron constate, pour le regretter, qu’il ne faudra pas compter avec les médias, trop souvent imprégnés de cette idée «postmoderne» selon laquelle «le récit historique devrait être déconstruit». Le président se désole de voir que «les médias sont souvent les premiers à entretenir la méfiance», comme s’il y avait «nécessairement quelque chose de mal dans la grandeur»
Et ce sont encore ces mêmes médias qui seraient à l’origine de l’injuste procès en arrogance qui lui est fait. S’il se tient à distance des journalistes c’est qu’il veut privilégier «le contact direct avec les Français». Ce n’est pas parce qu’il «bavarde sans cesse» avec presse qu’un président peut se prévaloir d’être «proche du peuple» fait-il valoir, visant implicitement ses prédécesseurs Hollande et Sarkozy. Il revendique, lui, d’avoir «mis un terme aux marchandages entre politique et média».
Pourquoi donc traite-t-il les gens de fainéant ? En guise de réponse au Spiegel, Macron proclame son amour des Français : «Si je ne les aimais pas, je ne serais pas ici. Je ne suis pas arrogant avec les Français, je suis déterminé». Il se décrit comme un enfant de la «classe moyenne provinciale», loin de cette élite dont serait forcément issu le «président des riches». Selon lui, la caricature du banquier coupé du peuple qu’agitent ses adversaires serait une expression d'une «jalousie française», ce «triste réflexe» qui, selon lui, «paralyse le pays».
Avec Merkel, une relation «très amicale» et un «grand respect»
Mais ne la joue-t-il pas un peu trop personnel sur le terrain diplomatique et européen, demande le journal allemand en citant l’initiative européenne de la Sorbonne ? Macron proteste qu’il a pris soin de donner à lire à Merkel avant de le prononcer le texte de son discours du 26 septembre. Il confie même que cela l’a amené à «laisser ouverts certain points» afin de ne pas «déclencher en Allemagne des discussions qui auraient amené la chancelière à prendre ses distances avec [son] discours». Allusion implicite au budget de la zone euro, point sur lequel Macron est effectivement resté particulièrement très vague à la Sorbonne.
Sur la chancelière, le président français ne tarit pas d'éloge. Leurs relations sont «très amicales», il lui témoigne un «grand respect» et prend bien soin de «ne pas répète les erreurs que ses prédécesseurs ont pu commettre, ces 12 dernières années». En fait, Macron se trouve beaucoup de ressemblance avec son amie Angela : «nous sommes tous deux méthodiques, attentifs aux détails. Dans les sommets internationaux, nous sommes parmi les rares à nous échanger des mots…». Saluant son courage au moment de la crise des migrants, il estime que la chancelière qui «incarne le destin allemand au 20e siècle» sera aussi celle de «la refondation» de l’Europe. «A aucun moment elle n’a essayé de freiner mon élan. (...) Elle m’a dit : je ne serai pas celle qui prétend avoir tout vu et tout vécu»,confie Macron au Spiegel.
Alors qu’on lui demande s’il n’aurait pas l’intention céder lui aussi à cette manie littéraire des responsables politiques français – l'hebdomadaire rappelle qu’Edouard Philippe et Bruno Le Maire ont tous deux publié des romans, autre étrangeté française aux yeux des Allemands – Macron répond qu’il ne cesse pas d’écrire mais que, pour l'instant, sa production rejoint «dans les tiroirs» ses trois romans non publiés. «Je n’ai jamais publié mais je me suis toujours dit que je le ferai un jour». La confidence fera rêver le monde de l'édition, réunit à Francort pour sa foire annuelle inaugurée mardi par le président Français : son livre programme, «Révolution» aurait trouvé preneur chez une vingtaine d'éditeurs internationaux.
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