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Air France-KLM: On vous explique la crise entre la France et les Pays-Bas - 20 Minutes

Deux avions Air France-KLM sur le tarmac de Schiphol, aux Pays-Bas. — Robin Utrecht / ANP / AFP
  • Le gouvernement néerlandais est entré dans le capital d’Air France-KLM car son influence au sein d’Air France-KLM était insuffisante pour protéger les intérêts nationaux. D’autre part, celui-ci avait des doutes sur la stratégie du groupe.
  • Les deux entités, malgré la fusion, continuent à opérer de façon indépendante. KLM a généré 80 % d’exploitation du groupe en 2018, alors qu’elle ne représente qu’un tiers des effectifs.
  • Cette montée au capital ne devrait pas changer radicalement le rapport de force car l’Etat français « bénéficie d’un droit de vote double sur une partie de ses actions détenues depuis plusieurs années ». Sauf si les Néerlandais parviennent à coaliser des actionnaires.

A la surprise générale, le gouvernement néerlandais a annoncé, mardi, avoir acquis une participation de 12,68 % dans Air France-KLM, pour 680 millions d’euros, et compte porter sa participation au même niveau que celle de la France. Pourquoi les Pays-Bas ont-ils agi de la sorte, et que change cet investissement dans les rapports de force au sein du groupe ? Éléments de réponse.

Qu’est-ce qui a motivé la décision néerlandaise ?

Selon le ministre néerlandais des Finances, Wopke Hoekstra, l’Etat néerlandais réfléchissait depuis plusieurs années à entrer au capital en raison d’importants doutes sur la stratégie du groupe. « La position de KLM s’est sans cesse érodée ces derniers mois », a-t-il fait valoir lors d’une conférence de presse à La Haye mardi soir.

Cette décision fait également suite à une série de grèves chez Air France l’an dernier, qui avait suscité l’inquiétude des Néerlandais sur la stabilité de la compagnie française. La question d’une croissance équilibrée des deux compagnies revient régulièrement depuis la fusion de 2004, KLM progressant sagement, Air France étant régulièrement secouée par des conflits sociaux. Ainsi, en 2018, KLM a généré à elle seule 80 % du résultat d'exploitation du groupe, alors qu’elle ne représente qu’un tiers des effectifs.

Enfin, le mois de février a été une période de fortes tensions autour du renouvellement du mandat de Pieter Elbers, PDG de KLM depuis 2011, finalement reconduit dans ses fonctions. En effet, malgré la fusion, les deux entités continuent à opérer de façon largement indépendante. Mais le nouveau patron du groupe, Benjamin Smith, entend rapprocher leur fonctionnement. Pire, il va entrer au conseil de surveillance de KLM lors de la prochaine assemblée générale de la compagnie néerlandaise, place qui a été refusée à tous ses prédécesseurs.

Y a-t-il d’autres raisons que les questions de gouvernance ?

Pour le quotidien de référence néerlandais De Volkskrant, le gouvernement s’est senti contraint à investir dans le capital de la compagnie car il s’est rendu compte que son influence au sein d’Air France-KLM était insuffisante pour protéger les intérêts nationaux, à savoir la bonne santé financière de l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol. Le gouvernement néerlandais craint qu’à terme, une grande partie des vols de KLM ne soit transférée à Paris, ce qui ferait perdre à l’aéroport de Schiphol sa fonction de hub, selon la ministre de l’Infrastructure néerlandaise, Cora van Nieuwenhuizen.

Qu’est-ce que ça change dans le rapport de force au sein du groupe ?

Jusqu’ici, le capital était détenu par l’Etat français (14,3 %), Delta Air lines (8,80 %), China Airlines (8,80 %), les employés (3,90 %) et près de 64 % des parts étaient aux mains d’actionnaires non identifiés. Comme l’a indiqué Wopke Hoekstra, « avec cette acquisition, le gouvernement néerlandais veut pouvoir influencer directement le développement futur d’Air France-KLM afin d’assurer de la meilleure façon possible l’intérêt public néerlandais », car « il est devenu évident que les décisions importantes concernant la stratégie de KLM sont prises de plus en plus au niveau d’Air France-KLM ».

Cependant, cette montée au capital ne devrait pas changer radicalement le rapport de force, comme l’explique Les Echos : l’Etat français « bénéficie d’un droit de vote double sur une partie de ses actions détenues depuis plusieurs années, qui lui confère un peu plus de 23 % des droits de vote. En y ajoutant les quelque 4 % du capital détenus par les salariés d’Air France, le bloc de contrôle français restera prépondérant ». Sauf si les Néerlandais réussissent à convaincre Delta et China Eastern de joindre leurs voix aux leurs.

Comment a réagi de la France ?

Cette opération est très mal perçue par le gouvernement français, qui n’en avait pas été informé. Le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, recevra d’ailleurs son homologue néerlandais « en fin de semaine », « pour avoir une discussion franche et amicale » sur le sujet. Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a pour sa part appelé les Etats à se mêler « le moins possible » de la marche du groupe. Pourtant, la France a déjà pratiqué le même type de « coup de force » : en avril 2015, Emmanuel Macron, qui était ministre de l’Economie, a fait monter l’État au capital de Renault en passant de 15,01 % à 19,74 %, pour forcer le constructeur à adopter les droits de vote doubles prévus par la loi Florange, déclenchant une crise avec Nissan.

Que peut-il se passer désormais ?

A la Bourse de Paris, l’action Air France-KLM a bondi de 5,38 % à 12,73 euros mardi, avant de s’effondrer de 13,59 % à 11,01 euros ce mercredi peu avant 11h. Cette opération « est probablement positive pour la concurrence au sein du groupe [c’est-à-dire qu’elle met la pression sur Air France pour améliorer sa rentabilité] mais pourrait aboutir à une escalade de tensions, la compagnie devenant encore plus politique », soulignent les analystes de la Société Générale dans une note à leurs clients investisseurs. Ils ajoutent : « Le gouvernement néerlandais va maintenant demander une représentation au conseil d’administration. » Celui-ci, qui compte déjà un représentant du gouvernement hollandais, se réunit ce mercredi.

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