C'est une déclaration qui n'a l'air de rien, mais qui symbolise toute l'ambiguïté de la position de l'État français sur l'affaire Ghosn, très discret sur le dossier, mais impliqué tout de même. Dans un entretien accordé à nos confrères de l'agence Reuters, mardi 14 janvier, Carlos Ghosn a expliqué avoir été «choqué par [son] arrestation», en novembre 2018. L'ancien président de l'Alliance raconte avoir reçu la visite de «l'ambassadeur de France» au Japon, le lendemain et précise la teneur de leurs échanges : ce dernier l'a informé, selon ses dires, de la fronde qui débutait alors contre lui depuis les rangs de Nissan.
«La première chose que j'ai demandée» après l'arrestation «était que Nissan soit au courant, pour qu'ils puissent m'envoyer un avocat. Le deuxième jour, 24h plus tard, j'ai reçu une visite de l'ambassadeur de France, qui m'a dit : “Nissan se retourne contre vous”. C'est à ce moment que j'ai compris que tout ceci n'était qu'un complot», déclare l'ancien titan de l'automobile. Une accusation réitérée un peu plus tard par Ghosn : «Quand [l'ambassadeur de France] m'a dit que deux ou trois heures après mon arrestation, [Hiroto] Saikawa est allé en conférence de presse et a fait sa fameuse déclaration, où il dit : “Je suis horrifié, mais ce que j'apprends...”, je me suis dit : “Oh mon Dieu, c'est un complot”».
Carlos Ghosn avait effectivement reçu la visite de l'ambassadeur de France au Japon, Laurent Pic, le 20 novembre. À l'époque, les autorités expliquaient que la rencontre s'inscrivait dans le cadre de la protection consulaire des citoyens français à l'étranger. Cette visite avait pour objectif de vérifier que les droits du détenu étaient bien respectés, et qu'il était détenu dans des conditions correctes.
Contactée par Reuters, l'ambassade de France au Japon n'a pas encore réagi sur cette rencontre. De son côté, Nissan maintient pour l'heure ses accusations à l'encontre de son ancien chef, rappelant avoir découvert de «nombreux actes d'inconduite» de la part de son ancien dirigeant. Le groupe automobile explique avoir des «preuves irréfutables», ce que nie toutefois Ghosn. «Nissan continuera de faire ce qu'il faut en coopérant avec les autorités judiciaires et réglementaires chaque fois que cela est nécessaire», prévenait l'entreprise dans une déclaration la semaine dernière.
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Un dossier délicat pour l'exécutif
Cette révélation met en exergue la position délicate de l'État français dans l'affaire Carlos Ghosn. Par le passé, l'ancien PDG de l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi avançait l'hypothèse que le gouvernement restait discret sur ce sujet pour ne pas froisser les autorités nippones et éviter de tendre les relations franco-japonaises. Lors de sa conférence de presse, il a déclaré n'attendre «rien du tout» de l'exécutif et d'Emmanuel Macron, tout en reconnaissant que l'occupant de l'Élysée avait rappelé à plusieurs reprises la présomption d'innocence dont il bénéficiait.
Certains responsables critiquent la position mitigée de l'État français, estimant que le gouvernement aurait pu prendre davantage la défense de l'homme d'affaires. C'est notamment le cas du président de la commission des Finances à l'Assemblée nationale, le député (LR) Eric Woerth : «La France a très vite lâché» Carlos Ghosn, a-t-il critiqué, appelant l'exécutif à «mieux s'expliquer» sur ce «lâchage». «Je n'ai pas compris que le patron de Renault qui a plutôt eu des succès chez Renault, créant quasiment le 1er groupe mondial d'automobiles avec des Japonais, je ne comprends pas qu'il puisse avoir été lâché aussi vite, a insisté l'ancien ministre. Probablement il y a des raisons, le gouvernement doit mieux s'expliquer, a-t-il ajouté. Peut-être que Monsieur Ghosn a beaucoup de choses à se reprocher, je n'en sais rien, mais je voudrais savoir ce qui s'est passé exactement».
L'État, actionnaire, avait officiellement laissé tomber Carlos Ghosn en janvier dernier, il y a un an, en demandant la nomination d'un successeur rapidement pour prendre la tête de Renault. «J'ai toujours indiqué [...] que s'il devait être durablement empêché, nous devrions passer à une nouvelle étape. Nous y sommes», s'était justifié le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire. Ni l'État, ni Renault ne souhaitaient voir émerger un conflit avec Nissan, qui aurait pu mettre en danger l'Alliance automobile. A la même période, une mission avait été envoyée au pays du Soleil Levant, afin de reprendre des discussions avec les autorités nippones comme le constructeur.
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