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Hausse des prix : « Nous sommes entrés dans une période d’inflation longue », prévient Michel-Edouard Leclerc - 20 Minutes

Après la clôture des négociations commerciales entre les supermarchés et l’industrie agroalimentaire, 20 Minutes a interrogé Michel-Edouard Leclerc, président du comité stratégique des centres E.Leclerc Ces négociations annuelles permettent de fixer les prix et les conditions auxquelles les grandes surfaces s’approvisionnent auprès des industriels, et auront des répercussions sur le ticket de caisse des consommateurs.

Quel est le bilan des négociations commerciales qui se sont achevées avec les fournisseurs ?

Nous sortons de ces négociations avec une prévision de hausse des prix dans l’univers des supermarchés de l’ordre de 10 %. Les industriels ne sont pas complètement satisfaits, et de fait la distribution a beaucoup négocié, mais ces 10 % viennent se rajouter aux 15 % de 2022, et en dix-huit mois les ménages sont fortement impactés.

Quelles conséquences cela aura-t-il chez vous ?

Notre idée est de diluer au maximum l’effet de ces hausses de manière à ne pas pénaliser nos 19 millions de clients, et nous allons répercuter les augmentations au consommateur jusqu’en juillet. Nous allons également adapter notre offre, secteur par secteur.

Cela aurait-il pu être pire ?

Les demandes [des fournisseurs] qui ont été faites à Leclerc depuis décembre étaient exorbitantes. Dans beaucoup de cas c’était du poker, dans la majorité il s’agissait de demandes excessives surtout par panique, par anticipation excessive, avec cette idée que si on ne demande pas maintenant, les plats ne repasseront pas. Dans un pays où l’administration a balisé l’exercice de la négociation, sans tenir compte véritablement des aléas du marché, la tentation est grande de vouloir résoudre les problèmes d’augmentation des charges en une fois. L’année dernière, le gouvernement lui-même a pourtant rouvert un cycle de négociations compte tenu de la guerre en Ukraine et de la crise de l’énergie.

Les fournisseurs assurent qu’ils répercutent la hausse du prix de l’énergie et des matières premières, vous trouvez néanmoins que cela manque de transparence ?

C’est un exercice difficile, tant pour les industriels que les distributeurs, d’anticiper l’année qui va venir, alors que nous avons tous des factures qui ont augmenté. Mais la plupart des industriels n’ont pas été transparents, et nous sommes frustrés de cela. Moi, je reste sur ma faim sur l’absence d’explications. On nous a fait le coup l’année dernière, on nous a présenté des hausses de factures très élevées, l’alimentaire a été augmenté de 15 %, et finalement, on s’aperçoit que les grandes entreprises internationales affichent des hausses de dividendes. Aujourd’hui, tout le monde constate qu’industriels et distributeurs avons surpayé le prix des containers, pour ne citer que cet exemple. Derrière le revenu du petit agriculteur qu’on invoque, il y a des plus gros qui se planquent, et en répercutant ces demandes de hausse au consommateur, le système a fait payer aux Français autre chose que de la matière première ou les effets de la crise de l’énergie. La guerre en Ukraine a eu bon dos, et les consommateurs ont donc des raisons d’être perplexes sur ces vagues de hausse. Parallèlement, je trouve que les pouvoirs publics n’ont pas été à nos côtés.

Que pensez-vous du projet de « panier anti-inflation » que le gouvernement pourrait mettre en place ?

Je ne suis pas contre l’idée de faire de la publicité sur un panier anti-inflation, mais nous, nous n’avons aucun intérêt à communiquer sur trente ou quarante articles, quand nous sommes généralement moins chers sur beaucoup plus de produits que cela. C’est pourquoi dans ce contexte où tout augmente, nous allons inviter nos consommateurs à comparer. A partir de lundi, nous allons relancer notre plateforme de comparateurs de prix. Nous disons au consommateur Leclerc d’aller jeter un œil dans d’autres enseignes, pour nous assurer que nous sommes moins chers. C’est une initiative parmi d’autres. Ce week-end nous organisons une opération de carburant à prix coûtant. Il s’agit juste de notre marge que l’on restitue aux consommateurs, et elle est très faible, de l’ordre de quelques centimes, mais c’est aussi un acte d’engagement. On confirme que l’on reste bien sur le créneau des prix.

Quel impact cette crise de l’inflation a-t-elle sur la consommation ?

Les produits un peu « premium » en qualité, en labellisation, et donc un peu plus chers, se retrouvent pénalisés. Le bio, notamment, tout comme les viandes racées. Il y a aussi un report des grandes marques vers les marques distributeurs, et même à l’intérieur de celles-ci les marques premiers prix sont à + 10 % en volume.

Comment pensez-vous que la situation va évoluer dans les prochains mois, les prochaines années ?

Je crois que nous sommes entrés dans une période d’inflation longue. Nous connaissons en ce moment une inflation de transition, qui est à la fois un mélange de spéculation, de l’effet de la guerre, de désorganisation post-Covid… Celle-ci ne va pas durer, avec un pic qui sera atteint en juillet. Mais après, nous resterons sur une phase d’inflation permanente pendant dix ans, qui sera davantage due au changement des modes de production.

Nous allons aller vers une alimentation plus soucieuse de l’environnement, vers la fin des énergies fossiles, et vers une relocalisation d’une partie de notre production dans les secteurs stratégiques. Ces trois mouvements vont faire que les produits vont coûter plus cher, parce que ça coûte plus cher de produire chez nous qu’en Chine, et plus cher de produire propre et durable. Il faudra évidemment accompagner cette inflation de mesures en faveur du pouvoir d’achat, par les salaires, la redistribution, une moindre fiscalité, mais il va y avoir un enjeu d’acceptabilité. Nous, Leclerc, il faut qu’on se batte pour que cette nouvelle économie qui va coûter plus cher, soit quand même vendue le moins cher possible. De cette crise, il faut tirer des leçons, et quand nous supprimons les prospectus qui représentaient 60.000 tonnes de papier, on commence déjà à basculer vers l’ère décarbonée.

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