
La bataille financière aurait pu s'éterniser. Atos avait lancé une OPA sur Gemalto le 11 décembre pour 4,3 milliards d'euros. Six jours plus tard, Thalès contre-attaque en lançant à son tour une contre OPA pour 4,8 milliards d'euros. Le soir-même, Atos annonçait dans un communiqué laconique qu'il jetait l'éponge. Le lundi matin, réuni pour une conférence de presse, Philippe Vallée, directeur général de Gemalto, et Patrice Caine, patron de Thalès, annonçaient officiellement le mariage des deux entreprises. Les pourparlers duraient " depuis plusieurs mois " a indiqué Philippe Vallée alors qu'Atos ne s'est déclaré qu'à la mi-novembre. " Nous avons été étonnés qu'Atos mette son offre sur la place public ", a poursuivi le patron de Gemalto. De son côté, Thierry Breton a indiqué qu'il avait annoncé son OPA pour couper court aux rumeurs qui agitaient les marchés et qu'il avait l'accord tacite de la Banque publique d'investissement " Il y a toujours des rumeurs a conclu Philippe Vallée, mais c'est vrai que le cours avait beaucoup baissé et que nous étions attractifs. " Un activiste aurait pu vouloir en profiter. Pour l'Etat, actionnaire indirect (8,51%) de Gemalto à travers BPIfrance, pas question de risquer de voir partir ce fleuron technologique entre des mains étrangères. Il était parfaitement au courant des deux propositions de rachat venant de deux acteurs français, d'autant plus qu'il détient 25,8% du capital de Thalès. Aurait-il laissé Atos jouer le rôle du lièvre pour faire monter les enchères ?
Les marchés applaudissent le rachat
A la bourse de Paris, Atos est en baisse de 1,36% tandis que Thalès grimpe de 8% signant ainsi la plus forte hausse du SBF 120. "En termes d'ADN, les deux entreprises se ressemblent beaucoup plus, a déclaré Richard-Maxime Beaudoux, analyste chez Bryan Garnier. Pour l'emploi, c'est beaucoup mieux aussi, ils gardent tous les employés et le prix est meilleur", Ce n'est pas qu'un deal financier, au contraire du coup tenté par Atos par opportunisme, a-t-il ajouté. Le président de Thales a souligné de son côté la complémentarité entre les deux entreprises, toutes deux déjà très présentes dans la cyber sécurité et les contrats avec les gouvernements, deux activités clés de Gemalto, et les cartes eSIM, des cartes SIM intégrées dans divers appareils connectés comme les drones ou les voitures connectées. " Thalès est numéro 1 dans le contrôle aérien, rappelle Patrice Caine, mais comment gérer l'arrivée des drones ? " Ces derniers sont en nombre croissant et il ne sera pas possible de se passer d'un système automatisé. " Il faut les identifier, c'est le savoir-faire de Gemalto ", poursuit-il. Outre la carte à puce, Gemalto est surtout présent dans la gestion et l'attribution des identifiants, qu'il s'agisse d'identifiants bancaire, télécom ou officiels (comme les puces insérées dans les passeports). Inversement, Gemalto admet qu'il ne possède pas de " machine learning " et qu'il sous-traite cette activité que Thalès maîtrise.
Numéro 2 mondial de la cyber sécurité
Patrice Caine a indiqué son intention de conserver toutes les activités de Gemalto, y compris les cartes SIM, répondant à une inquiétude manifestée dimanche par les syndicats du groupe. Le plan de 288 suppressions de poste annoncé fin novembre par Gemalto est toutefois maintenu. Thales, qui a proposé de donner accès aux salariés de Gemalto concernés à ses plans de mobilité interne et à ceux de sa filiale à 35% Naval Group (ex-DCNS) s'est engagé à préserver l’emploi dans les activités françaises de Gemalto.
Avec la fusion, Thalès affirme qu’il sera le numéro 2 mondial de la cyber sécurité, derrière l’américain Symantec. Les activités de cyber sécurité seront regroupées dans une business unit qui agrègera Gemalto et les activités de sécurité de Thalès. Cette dernière devrait être pilotée par Philippe Vallée. La nouvelle entité aura une croissance de 5% par an et dégagera 100 à 150 millions d’euros de synergie d’ici 2021. Thalès vaut 19,7 milliards d’euros en bourse. Avec Gemalto dont la capitalisation atteint 4,4 milliards d’euros, la nouvelle entité dépassera largement les 20 milliards, nettement plus gros qu’Atos (13 milliards d’euros). Mais Atos est au CAC 40 ce qui n’est pas le cas de Thalès.
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